Ne pas être qu'un "patient" ...

Le point sur la Maladie de Parkinson en 2005 (seconde partie)

n.b. : Ce texte a initia­le­ment été publié sous forme de 10 messages adres­sés à la liste de diffu­sion Park­liste par le docteur Claude Mange, qui auto­rise aima­ble­ment le Gp29 à les repro­duire sur ce site. La publi­ca­tion se fera en plusieurs parties au cours des mois de mai et Juin.

Méca­nismes théra­peu­tiques de la MP.

Une cause incon­nue déclenche la mort des neurones dopa­mi­ner­giques dans le cerveau, notam­ment dans la substance noire, mais aussi dans d’autres systèmes neuronaux.
C’est la baisse du taux de dopa­mine qui est à l’ori­gine des prin­ci­paux signes de la maladie.
Depuis la décou­verte de la dopa­thé­ra­pie en fin des années 60, de nouvelles tech­niques ont été mises en oeuvre pour trai­ter la MP.
On peut clas­ser ces tech­niques en 3 catégories :

1) trai­te­ments symptômatiques ;
2) restaurateurs ;
3) neuroprotecteurs.

Les trai­te­ments symp­tô­ma­tiques repré­sentent l’es­sen­tiel sinon la quasi tota­lité des trai­te­ment actuels de la MP.
Ils essaient de corri­ger le manque de dopa­mine dans le cerveau ou ses effets : il s’agit de la L.Dopa, des agonistes et de la chirurgie.
Ils modi­fient nette­ment les symp­tômes mais non l’évo­lu­tion de la MP, ni les symp­tômes dépen­dant des lésions non dopaminergiques.

Les trai­te­ments restau­ra­teurs (ou répa­ra­teurs) veulent soit rempla­cer les neurones dopa­mi­ner­giques atteints par la mala­die (greffes de cellules nerveuses), soit appor­ter dans le cerveau des facteurs trophiques stimu­lant la repousse des neurones.
Ces tech­niques, bien que promet­teuses, sont encore au stade expé­ri­men­tal (cellules souches, théra­pie génique, etc.).

La neuro­pro­tec­tion veut empê­cher ou tout au moins ralen­tir la mort neuronale.
Des essais sont actuel­le­ment en cours, mais à ce jour il n’a pas été possible de démon­trer un effet neuro­pro­tec­teur quelconque.

Nous retrou­ve­rons ces diffé­rentes tech­niques prochainement.

Trai­te­ment par la Dopamine :

La L.Dopa (lévo­dopa) se trans­forme en dopa­mine dans le cerveau.
Elle est ssociée à des produits inhi­bant la trans­for­ma­tion en dopa­mine avant d’at­teindre le cerveau, le bensé­ra­side pour le Modo­par, la carbi­dopa pour le Sinemet.
Elle est présen­tée sous des formes diverses, stan­dard, à libé­ra­tion prolon­gée, disper­sible et même une forme utili­sable en infu­sion duodénale.
L’avan­tage de ces diffé­rentes présen­ta­tions est de dispo­ser de produits dont la concen­tra­tion maxi­mum aprés absorp­tion et la demi-​vie sont diffé­rentes, ce qui permet une souplesse de prescription.

Certains produits, les inhi­bi­teurs enzy­ma­tiques, modi­fient le méta­bo­lisme de la dopa­mine dans le cerveau. Ainsi les IMAO‑B (sélé­gline ou Dépré­nyl et rasa­gi­line ou Azil­tec) dimi­nuent sa vitesse de dégradation.
D’autres comme les ICOMT ( Inhi­bi­teurs de la catéchol-​ortho-​méthyl-​transférase) (Tolca­pone ou Tasmar et enta­ca­pone ou Comtan) en augmentent la concen­tra­tion dans le cerveau et prolongent son action. (L’en­ta­ca­pone est asso­cié au Sine­met dans le Stalévo).

En 2005 la L.Dopa reste le trai­te­ment de réfé­rence de la MP, amélio­rant l’aki­né­sie et la rigi­dité, dans une moindre mesure les tremblements .
Elle peut donner des effets indé­si­rables en début de trai­te­ment, notam­ment des nausées amélio­rées par la prise de dompéridone.
Elle doit être intro­duite trés progres­si­ve­ment pour en accroître la tolé­rance et surtout l’uti­li­ser à la dose mini­male efficace.

Avec l’évo­lu­tion de la mala­die il est néces­saire d’en augmen­ter les doses, mais au bout d’un certain nombre d’an­nées peuvent appa­raitre des « compli­ca­tions motrices  » : fluc­tua­tions d’ef­fets et mouve­ments invo­lon­taires (dyski­né­sies ) .
Pour retar­der l’ap­pa­ri­tion des compli­ca­tions il a été recom­mandé de rempla­cer la L.Dopa par des agonistes dopa­mi­ner­giques en début de traitement.

Il semble cepen­dant que l’élé­ment prépon­dé­rant pour eviter les compli­ca­tions motrices soit la « pulsa­bi­lité  » de la stimu­la­tion dopa­mi­ner­gique : c’est à dire les « à‑coups » de concen­tra­tion de dopa­mine aprés la prise du médicament.
Autre­ment dit la pres­crip­tion de L.Dopa devrait cher­cher une stabi­lité de stimu­la­tion non seule­ment en début de trai­te­ment mais à toutes les étapes.

En fait avec l’évo­lu­tion de la mala­die, la sévé­rité de la dépo­pu­la­tion neuro­nale s’ac­croît et les neurones survi­vants sont inca­pables d’amor­tir les varia­tions de concen­tra­tion céré­brale de la L.Dopa.

Compli­ca­tions motrices de la L.Dopa .

Elles sont multiples et résultent d’une insuf­fi­sance d’ac­tion du trai­te­ment aprés un certain temps d’évo­lu­tion de la mala­die : il y a « résur­gence » des signes parkinsoniens.
Clas­si­que­ment on distingue des akiné­sies du petit matin, de fins de dose, nocturne…
Des dyski­né­sies de « pic de dose », de milieu de dose, inté­res­sant la face, la langue, la bouche, de mouve­ments choréiques du tronc, des membres, de la tête. Ces dysto­nies peuvent être doulou­reuses, comme la dysto­nie « du petit matin  » avec orteil en griffe, rota­tion du pied …

L’ef­fet « on/​off » traduit le passage en quelques minutes d’un état normal ou presque normal, à un état parkin­so­nien caractérisé.
L’en­rayage ciné­tique (blocage) notam­ment de la marche, traduit, avec l’ap­pa­ri­tion de l’ins­ta­bi­lité postu­rale, une aggra­va­tion de la maldie.

A côté de ces fluc­tua­tions motrices et paral­lè­le­ment, existent des fluc­tua­tions non motrices, quel­que­fois non ratta­chées à la mala­die et son trai­te­ment, souvent décon­cer­tantes, toujours inattendues.
Il peut s’agir de troubles végé­ta­tifs : sueurs profuses, pâleur, sensa­tions de chaleur, d’étouf­fe­ment, des douleurs abdo­mi­nales, des mictions impérieuses.
De troubles sensi­tifs, douleurs variées, syndrome de jambes sans repos.
De troubles cogni­tifs : angoisse, attaque de panique, irri­ta­bi­lité, dépres­sion, asthé­nie intense, hallucinations.

Toutes ces mani­fes­ta­tions, ces compli­ca­tions, rendent la mala­die parti­cu­liè­re­ment pénible et justi­fient une adap­ta­tion du trai­te­ment, ce que nous verrons par la suite.

Les troubles moteurs non dopa-sensibles.

Les signes non « dopa-​sensibles » appa­raissent progres­si­vemnt et compro­mettent l’au­to­no­mie du malade, son inser­tion sociale, profes­sion­nelle et familiale.
Ils sont sans doute en rapport avec d’autres systèmes que dopaminergique.

Au premier rang de ces troubles : les chutes !
Elles concernent 70 % au moins des parkin­so­niens. La MP est la mala­die neuro­lo­gique la plus fréquem­ment respon­sable de chutes .
Rares lors des premières années de la mala­die, leur appa­ri­tion et leur répé­ti­tion témoigne du  » déclin moteur ». Leurs consé­quences sont graves, frac­tures, hospi­ta­li­sa­tions, grabatisations …
Elles peuvent surve­nir en toutes circons­tances : au lever, au demi-​tour, au main­tien de la station debout ou à l’oc­ca­sion d’un blocage moteur (enrayage cinétique).

Le blocage moteur (free­zing) se mani­feste essen­tiel­le­ment au cours de la marche : les pieds restent collés au sol, soit à l’ini­tia­tion de la marche, soit pendant la marche, au fran­chis­se­ment d’une porte, au demi-​tour. Il est favo­risé par l’émo­tion, la fatigue, un stimu­lus audi­tif ( appel, sonne­rie du tél.) ou visuel.
Il peut s’ob­ser­ver lors de la parole ou de l’écriture.
Il concerne plus de trente pour cent des malades.

Avec l’ag­gra­va­tion de la mala­die on peut consta­ter d’autres signes non dopa-​sensibles : diffi­cul­tés à parler, à déglu­tir notamment.

Tous signes qui contri­buent à l’iso­le­ment du malade.

Le point sur la maladie de Parkinson en 2005 (première partie)

Méde­cin géné­ra­liste retraité, conjoint de parkin­so­nienne depuis 30 ans, je suis convaincu de la néces­sité pour les malades et leur entou­rage d’avoir le plus possible de connais­sances sur la mala­die et sa prise en charge, ne serait-​ce que pour éviter le recours illu­soire à des théra­peu­tiques non éprouvées.

C’est dans cet esprit qu’à la demande du GP29 je vous propose cette serie de messages sur ce que l’on sait aujourd’­hui de la MP et son traitement.

n.b. : Ce texte a initia­le­ment été publié sous forme de 10 messages adres­sés à la liste de diffu­sion Park­liste par le docteur Claude Mange, qui auto­rise aima­ble­ment le Gp29 à les repro­duire sur ce site. La publi­ca­tion se fera en trois parties au cours du mois de mai.

En ce début 2005 , la média­ti­sa­tion de la mort du pape, parkin­so­nien , ne peut permettre de cacher ni les souf­frances , ni la dégra­da­tion, pour ne pas dire la déchéance physique du parkin­so­nien « évolué » ..

Et effec­ti­ve­ment les spécia­listes fran­çais de la MP mettent l’ac­cent sur les douleurs physiques, long­temps sous-​estimées mais si fréquentes, les atteintes non motrices qui sapent le moral des parkin­so­niens et déroutent leurs proches …

Et pour­tant le grand public ( mais aussi des méde­cins … !) conti­nuent de ne voir en les parkin­so­niens que  » des petits vieux qui tremblent .. » !

Nous savons tous que la MP c’est bien autre chose , c’est bien d’autres choses …

Si en 2005 on s’ouvre à d’autres hori­zons , malheu­reu­se­ment les causes de la MP sont toujours mécon­nues , les trai­te­ments toujours symp­to­ma­tiques malgré les avan­cées de la recherche …

Car bien des incon­nues subsistent , non seule­ment quant aux causes de la MP que sur les méca­nismes de la mort neuro­nale et l’évo­lu­tion de la MP ..

Nous essaie­rons de faire le point sur nos connais­sances en 2005 …

Facteurs géné­tiques de la MP 
Prés de 15 % des parkin­so­niens auraient un proche ou appa­renté atteint de la MP.
Ces cas de MP connaissent en géné­ral un début précoce mais une évolu­tion beau­coup plus lente que les formes dites idiopathiques.
Ces cas fami­liaux peuvent corres­pondre à une muta­tion d’un gène.
Depuis 1997 on a ainsi décou­vert 5 gènes impli­qués dans le deve­lop­pe­ment de la MP ; il y en a certai­ne­ment d’autres …

Le premier gène décou­vert l’a été à l’oc­ca­sion de l’étude d’un cas fami­lial : il s’agit du gène de la synu­cléine alpha dont la muta­tion ( dupli­ca­tion ou tripli­ca­tion ) est à la base de certines formes de MP.
La synu­cléine est l’un des consti­tuants essen­tiels des corps de Léwy.
Par ailleurs une anoma­lie du système ubiquitine-​protéasome est impli­quée dans de nombreux proces­sus, peut-​être dans la MP ?

Un deuxième gène, la parkine, est à l’ori­gine de formes fami­lales de la MP. Cette protéine est indis­pen­sable dans le bon fonc­tion­ne­ment du système ubiquitine-​protéasome. Une muta­tion de la parkine pour­rait abou­tir à la forma­tion de protéines toxiques pour les neurones. A noter que les inhi­bi­teurs du protéa­some sont capables chez l’ani­mal de produire un syndrome parkinsonien.

Mais d’autres formes fami­liales de la MP paraissent liées plutôt à un dysfonc­tion­ne­ment des mito­chon­dries, rappe­lant les effets nocifs du MPTP …
La roté­none ( un herbi­cide ) a un mode d’ac­tion identique …

De toutes ces données, on peut penser qu’en dehors des cas fami­liaux liés à une muta­tion spéci­fique d’un gène précis, la MP pour­rait résul­ter de facteurs géné­tiques prédis­po­sant et de facteurs présents dans l’en­vi­ron­ne­ment, ces deux facteurs pouvant varier d’un indi­vidu à l’autre …
Mais il s’agit là d’hy­po­thèses qui restent à démon­trer par des études néces­saires sur de nombreux malades.

Symp­tômes au début de la maladie :
Clas­si­que­ment la MP est carac­té­ri­sée par une triade : trem­ble­ment de repos , rigi­dité et lenteur des mouve­ments. On pour­rait y ajou­ter la varia­bi­lité des symp­tômes, plus fréquente que les tremblements.
Mais il s’agit là de symp­tômes notés lors d’une mala­die évoluant depuis plusieurs années.
Les débuts sont souvent insi­dieux, discrets, trom­peurs, non spéci­fiques, égarant d’au­tant plus le diag­nos­tic qu’il n’existe aucun marqueur biolo­gique confir­mant ou non une MP.
(On reverra ces problèmes en parlant du diag­nos­tic de la MP).

Tout d’abord l’âge du début est éminem­ment trom­peur : si la moyenne d’âge au début se situe autour de 57/​58 ans, on peut dire d’une MP qu’elle est précoce quand elle débute entre 20 et 40 ans, et qu’il s’agit de forme juvé­nile si elle débute avant 20 ans (souvent formes fami­liales, muta­tion du gène parkine). Il existe aussi des formes tardives débu­tant aprés 75 – 80 ans ..
Le début peut certes atteindre le système moteur, mais ici il faut insis­ter sur les signes non moteurs inau­gu­rant une MP qui ne sera recon­nue quel­que­fois que plusieurs années plus tard !
Dans 40 à 60 % des cas il existe des mani­fes­ta­tions doulou­reuses, arti­cu­laires, notam­ment la cein­ture scapu­laire, d’où les errances de diagnostic .…
Dans de nombreux autres cas le patient ressent des sensa­tions diffi­ciles à décrire, des impres­sions de serre­ment interne , de trem­ble­ment inté­rieurs, de brûlures … Toutes mani­fes­ta­tions peu convain­cantes et pouvant alors être étiquet­tées hystériques …

De même des troubles aussi variés que la consti­pa­tion, des sueurs profuses, des sensa­tions de froid, peuvent précé­der les signes moteurs de la MP .. Sans oublier la fatigue qui touche 40 % des patients …
La sébor­rhée précède souvent les symp­tômes moteurs et peut s’ag­gra­ver nette­ment une fois la mala­die diagnostiquée …
A signa­ler, un défi­cit olfac­tif trés précoce chez prati­que­ment tous les malades, mais dont ils n’ont géné­ra­le­ment pas conscience. Des troubles oculaires visuels, diffi­culté à la lecture, séche­resse des yeux, troubles de la vision des couleurs, de la percep­tion des contrastes …
Enfin des troubles du sommeil, un syndrôme de jambes sans repos, sans oublier bien sûr l’an­xiété et /​ ou la dépres­sion qui précède les signes moteurs chez 20 % des malades ..

Diag­nos­tic de la MP 
De la même manière que nous ne connais­sons pas la (ou les ) cause de la MP, en 2005 le diag­nos­tic de la MP est et reste avant tout clinique : aucun marqueur spéci­fique, image­rie encore du domaine de la recherche …
Nous avons vu que de nombreux signes plus ou moins trom­peurs précèdent les mani­fes­ta­tions motrices de la MP.
L’âge n’est pas un critère ; par contre l’asy­mé­trie des symp­tômes en est un bon : la MP débute d’un côté, puis enva­hit le côté opposé quelques mois ou années plus tard.
Autre bon critère de diag­nos­tic de MP : une réponse à la L.Dopa marquée et durable.

Certes ce problème concerne avant tout les méde­cins, et plus parti­cu­liè­re­ment les neuro­logues spécia­li­sés dans les mouve­ments anormaux.
Mais l’an­nonce d’un tel diag­nos­tic a un tel impact sur le patient et son entou­rage qu’il faut bien évoquer ce problème ! Ce diag­nos­tic implique une atteinte de l’au­to­no­mie et des pertur­ba­tions plus ou moins graves dans la vie person­nelle, fami­liale et profes­sion­nele, ainsi que des néces­si­tés théra­peu­tiques et un suivi prolongé et régulier !
D’où l’im­por­tance de ce diagnostic …
Qui reste clinique essen­tiel­le­ment, ce que ne comprennent pas toujours les malades ni leur entourage !
Cepen­dant il faut savoir que le scan­ner et l’IRM sont normaux dans la MP . Ils ne sont indi­qués que pour élimi­ner d’autres affec­tions en cas de doute .
Mais les tech­niques d’ima­ge­rie dite fonc­tion­nelles, tomo­gra­phie par émis­sion de posi­tons (TEP ), tomo­gra­phie par émis­sion mono­pho­to­nique ( SPECT ) permettent de visua­li­ser trés préco­cé­ment la perte neuro­nale dopa­mi­ner­gique, et ainsi de confir­mer ou non une MP
Cepen­dant ces examens sont rare­ment possibles dans la réalité en raison de leur prix et du manque d’équi­pe­ments. En outre le SPECT ( DAT-​Scan ) ne permet pas de diffé­ren­cier une MP dite idio­pa­thique d’un autre syndrome parkin­so­nien dégénératif .

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