Ne pas être qu'un "patient" ...

Les troubles du comportement

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT N°39 – décembre 2009

Inter­ven­tion de Bruno HELLEUX à l’AG CECAP du 30 septembre 09

INTRODUCTION :
Parmi les symp­tômes dits «  secon­daires  » obser­vés dans la Mala­die de Parkin­son, les troubles psychia­triques, même s’ils sont rares et tardifs, sont ceux qui inquiètent et déroutent le plus les malades et leurs aidants.

Je propose ici de vous faire part de mon expé­rience profes­sion­nelle en établis­se­ment hospi­ta­lier psychia­trique et d’évoquer la néces­sité d’adapter notre atti­tude à la patho­lo­gie du malade.

Sans entrer dans un exposé tech­nique, il est utile de préci­ser quelles sont les diffé­rentes patho­lo­gies que nous rencon­trons et d’en donner une défi­ni­tion aussi simple que possible (cf. en annexe les défi­ni­tions sommaires des termes utilisés) :

  1. les PSYCHOSES : parmi les quelles on peut ressor­tir trois catégories : 
    • la schi­zo­phré­nie
    • la para­noïa
    • les patho­lo­gies maniaco-dépressives
  2. les NEVROSES : parmi lesquelles on peut observer : 
    • la névrose obsessionnelle
    • la névrose phobique
    • la névrose hystérique
    • la dépres­sion
    • les Toc ou «  troubles obses­sion­nels compulsifs »
  3. les COMPORTEMENTS PSYCHOPATHIQUES : Appe­lés «  états limites  », ils se situent aux fron­tières entre la psychose et la névrose. Ils se carac­té­risent par une grande into­lé­rance à la frus­tra­tion qui se mani­feste par des passages à l’acte souvent de nature agressive. 
  4. les CONDUITES ADDICTIVES : Situa­tion de dépen­dance physique ou psycho­lo­gique face à un désir impé­rieux à prendre une substance. Parmi ces addic­tions on trouve entre autre : 
    • l’alcoolisme et la toxicomanie
    • la bouli­mie et l’anorexie
    • le taba­gisme etc …

    Il peut s’agir d’un besoin d’ordre psycho­lo­gique tel que l’addiction au jeu ou les autres besoins compul­sifs (achats, ou sexuels par exemple).
    En présence d’un patient qui présente l’un de ces troubles ou une forme appa­ren­tée, il est néces­saire d’accompagner la personne dans les actes essen­tiels de la vie quoti­dienne en tenant compte de ses besoins et de son degré d’autonomie.

I — ÉTAT CLINIQUE D’UNE PERSONNE
Le soignant doit être en mesure d’apprécier l’état clinique du malade à partir des points suivants :

  • obser­ver la personne et noter les chan­ge­ments de son état clinique (physiques ou psychiques)
  • iden­ti­fier les signes de détresse et de douleur
  • iden­ti­fier les risques encou­rus par le malade
  • esti­mer le carac­tère urgent et aler­ter les inter­ve­nants compé­tents en fonc­tion du degré de risque.

Néces­sité pour le soignant : 

  • de diffé­ren­cier la notion de mala­die soma­tique et de mala­die psychique,
  • de noter les signes de dépression,
  • de faire la diffé­rence entre les diffé­rentes patho­lo­gies que nous avons évoquées pour défi­nir le soin et le proto­cole de soin adapté.

II – OBJECTIFS : 

  • écou­ter le malade et son entou­rage, prendre en compte les signes non verbaux de commu­ni­ca­tion sans porter de jugement.
  • Faire expri­mer les besoins et les attentes de la personne, les refor­mu­ler et propo­ser le soin adapté.
  • Iden­ti­fier les situa­tions de crise ou de violence en prenant du recul par rapport au malade, ce qui est plus aisé pour un soignant que pour un aidant proche.

Dans le cas de compor­te­ment perturbé de type psychia­trique, il convient de se préoc­cu­per de savoir si le trouble est dû à la recherche d’une solu­tion face à un effet de sa mala­die ou d’un trouble réel­le­ment psychiatrique. 

Exemples : un malade qui déam­bule ou semble s’agiter est, en psychia­trie consi­déré comme étant en situa­tion de trouble alors que le Parkin­so­nien déam­bule ou quitte son siège pour relâ­cher les contrac­tures musculaires.

De même, pour le malade Parkin­so­nien, les troubles de la parole sont le plus souvent la consé­quence des effets indé­si­rables du trai­te­ment. Ils se mani­festent par une voix atone ou anor­ma­le­ment forte qui semble expri­mer la dépres­sion ou la colère. 

Il faut prendre en compte égale­ment le fait que certains compor­te­ments compul­sifs peuvent être induits par le trai­te­ment pharmaceutique. 

III- DEMARCHE DE SOIN :
Il est donc néces­saire avant de poser un diag­nos­tic de trouble psychique de s’assurer que ces compor­te­ments ne sont pas dus à la mala­die elle-​même ou à son trai­te­ment. Dans les deux cas, il convient :

  • d’avoir une atti­tude calme pour ne pas stres­ser ou désta­bi­li­ser le malade et l’aider à reprendre la maîtrise dans ces moments critiques.
  • de trans­mettre ces obser­va­tions aux inter­ve­nants compé­tents tels que le méde­cin trai­tant, l’infirmière, le kiné, l’orthophoniste (dans le cadre d’une coor­di­na­tion) afin que les soins les mieux adap­tés soit mis en place.
  • de veiller à ce que la trans­mis­sion de l’information soit ciblée, orale mais aussi écrite pour que les inter­ve­nants qui ne se rencontrent pas toujours puissent adop­ter la même démarche de soin.
  • de stimu­ler le malade, ne pas se substi­tuer à lui, dans les actes quoti­diens même s’il les réalise plus lentement.
  • d’assurer une commu­ni­ca­tion verbale et non verbale (exemple par le toucher) pour contri­buer au bien-​être du malade.
  • de ne pas cher­cher à suppri­mer des troubles (comme les tocs) ce qui risque­rait de créer pour le malade un senti­ment de frus­tra­tion encore plus impor­tant, mais plutôt d’aider le malade à mieux les gérer.
  • il en va de même pour les accès de colère ou d’agressivité : cher­cher à oppo­ser au malade une atti­tude calme et rassu­rante avant d’opposer un compor­te­ment plus ferme si la situa­tion l’exige.
  • de signi­fier au malade qu’il n’est pas jugé mais qu’il est en droit d’attendre des soignants de la compré­hen­sion, de l’aide en même temps qu’un cadre bien défini pour répondre à sa pathologie.

Ces atti­tudes sont d’autant plus valables face à un malade parkin­so­nien qu’il est le plus souvent conscient des troubles qu’il présente et en éprouve un senti­ment de culpa­bi­lité et de déva­lo­ri­sa­tion de soi. 

En outre la même atti­tude d’écoute, de conseil est adop­tée vis-​à-​vis des familles et des aidants qui vivent souvent ces situa­tions de façon conflic­tuelle ou angois­sée, en leur donnant les conseils adap­tés s’ils les sollicitent.

CONCLUSION :
L’attitude du soignant n’est pas compa­rable à celle de l’aidant du Malade Parkin­so­nien. Le soignant n’a pas de lien affec­tif avec le malade contrai­re­ment à l’aidant. Il lui est plus facile d’adopter une atti­tude calme et rassu­rante face aux troubles du malade alors que l’aidant est dans une rela­tion affec­tive qui rend ces troubles diffi­ci­le­ment suppor­tables tant au plan de l’épuisement physique que moral.

Néan­moins les soignants en milieu hospi­ta­lier doivent porter leur effort sur la spéci­fi­cité de la M.P en parti­cu­lier pour le respect scru­pu­leux des horaires de distri­bu­tion des médicaments. 

Pour ces raisons deux axes me semblent indis­pen­sables à dégager :

  • patience, calme, écoute et prise de distance à l’égard du malade face aux situa­tions de troubles.
  • néces­sité pour l’aidant de se faire aider par un inter­ve­nant quali­fié exté­rieur à son entou­rage, près de qui il pourra à son tour trou­ver écoute et aide.

Le malade et son aidant, sont en droit d’attendre de tous les soignants l’aide et l’écoute auxquelles ils ont droit face à l’épreuve que leur impose la Mala­die de Parkin­son ou toute autre patho­lo­gie. C’est dans ce sens que les soignants s’efforcent d’orienter leur démarche de soins en essayant de l’améliorer chaque jour.
Dans le milieu psychia­trique, l’important est de commu­ni­quer, le travail est basé sur la rela­tion et la confiance il se fait avec les familles et l’entourage du malade. Les soignants en Psychia­trie insistent sur le fait qu’il ne faut pas hési­ter à venir leur parler puisque leur travail est basé sur l’écoute.

Rédigé par Bruno HELLEUX

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DÉFINITIONS

I – LES PSYCHOSES :
La schi­zo­phré­nie : du grec «  schi­zein  » (fendre) et «  phrën  » (esprit)

  • disso­cia­tion mentale
  • Discor­dance affective 
  • Acti­vité déli­rante incohérente 
  • Rupture avec le monde extérieur 
  • Repli autis­tique (absence de communication)
    La Para­noïa : Psychose chro­nique carac­té­ri­sée par un délire géné­ra­le­ment bien construit, s’accompagnant de trouble du juge­ment et de la percep­tion mais sans dété­rio­ra­tion intellectuelle.

    Patho­lo­gie maniaco-​dépressive : Psychose maniaco-​dépressive ou psychose bipolaire. 

    1. La phase maniaque :
      • une grande agita­tion chez le patient aussi bien au niveau des idées, du discours que du compor­te­ment (il peut se souve­nir de ses comportements) ;
      • des idées de gran­deur, extrê­me­ment agité, atti­tudes très fami­lières avec son entourage.
      • A la fin de la phase maniaque le malade a un souve­nir précis de son atti­tude, ressent une très forte culpabilité. 
    2. La phase dépres­sive : Ralen­tis­se­ment psycho­mo­teur, les idées sont extrê­me­ment lentes, le malade ressent une forte culpa­bi­lité. L’estime de soi et l’image de soi sont très mauvaises.

    II – LES NEVROSES 
    Contrai­re­ment aux psycho­tiques, les patients névro­tiques sont conscients de leurs troubles mais n’ont pas la capa­cité d’y remé­dier, pas de délire ni d’hallucinations.

    1. Névrose obses­sion­nelle (toc : trouble obses­sion­nel compulsif) :
      • obses­sion : une idée qui enva­hit le système de pensée du patient et qui est présente en perma­nence et se traduit par la compul­sion systématique
      • compul­sion : fait allu­sion à l’incapacité du patient à lutter contre l’idée obsessionnelle

      Ces obses­sions ont valeur d’anxiolytique, c’est-​à-​dire qu’elles lui permettent de lutter contre l’angoisse. Ces névroses sont ryth­mées par des rituels (range­ment, comp­tage, répé­ti­tion des gestes, des phrases, des chiffres, recherche de la symé­trie ou du paral­lé­lisme, lavage, ménage. Ces rituels n’ont pas néces­sai­re­ment de rapport avec l’action en cours, ils peuvent même l’interrompre.

    2. Névrose phobique :
      Ces personnes sont sujettes à des peurs irré­pres­sibles contre lesquelles il leur est quasi­ment impos­sible de lutter. Exemples :
      • agora­pho­bie : peur des grands espaces ou de la foule
      • claus­tro­pho­bie : peur d’être enfermé dans un espace plus ou moins réduit. 
      • arach­no­pho­bie : peur des araignées

      Lorsque ces patients sont confron­tés à l’objet de leur peur, ils éprouvent une angoisse très forte. Cette névrose est très handi­ca­pante sur le plan social. 

    3. Névrose hysté­rique :
      Contrai­re­ment aux défi­ni­tions données aux débuts de la psychia­trie, l’hystérie n’est pas exclu­si­ve­ment fémi­nine, elle se trouve égale­ment chez l’homme sous des formes diffé­rentes et la propor­tion de malades qui en sont atteints est plus faible.

      Il y a deux symp­tômes prin­ci­paux : la séduc­tion et la conver­sion somatique.

      La séduc­tion est présente à la fois dans le discours et le comportement :

      • pour la femme : la rela­tion à l’autre est fondée sur une envie exagé­rée de plaire, les autres femmes sont vécues comme des rivales.
      • pour l’homme : quête de viri­lité et d’amitié mascu­line passion­nelle qui témoigne d’un trouble d’identité sexuelle.

      Ces patients bien que conscients de leur trouble ne sont pas capables de faire autre­ment. L’angoisse est présente et leur souf­france est réelle. 

    III ‑LA DEPRESSION : (névrose)
    Mala­die mentale carac­té­ri­sée par une modi­fi­ca­tion de l’humeur dans le sens de la tris­tesse, de la souf­france morale et du ralen­tis­se­ment psycho­mo­teur, s’accompagnant parfois d’anxiété. Elle entre­tient chez le patient une impres­sion doulou­reuse d’impuissance globale, de fata­lité déses­pé­rante et parfois l’entraîne à des rumi­na­tions subdé­li­rantes à thèmes de culpa­bi­lité, d’indignité et d’autodépréciation pouvant conduire le malade à envi­sa­ger le suicide et parfois à le réaliser.

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