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Le rat : Un bon modèle de la maladie de Parkinson ?

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDEPENDANT ‑N°26 – septembre 2006

Le rat : Un bon modèle de la mala­die de Parkinson ? 

Les études portant sur la mala­die de Parkin­son (comme les autres mala­dies neuro­dé­gé­né­ra­tives) requièrent l’utilisation de modèles animaux. L’utilisation d’un modèle animal perfor­mant, et le plus proche possible de la mala­die humaine, est une des clés de la compré­hen­sion de la mala­die de Parkin­son et de l’amélioration de ses traitements.
L’absence de « mala­die de Parkin­son animale spon­ta­née » rend néces­saire l’utilisation de modèles d’étude « arti­fi­ciels ». De façon sché­ma­tique, la mala­die de Parkin­son peut se résu­mer en l’ex­pres­sion clinique (symp­tômes parkin­so­niens) de la destruc­tion des neurones dopa­mi­ner­giques de la Substance Noire (SN). Ainsi des modèles animaux ont été obte­nus, soit par chirur­gie, soit par trai­te­ment, ayant pour but de détruire ces neurones de manière spécifique.
Ces modèles animaux sont utili­sés depuis main­te­nant plus de 30 ans, et ont sans cesse été amélio­rés au cours des années.
Parmi les modèles animaux (rat, souris, singe), le rat repré­sente un modèle de choix pour plusieurs raisons :
La taille du rat est opti­male (assez grande pour faire de la chirur­gie stéréo­taxique avec préci­sion, et suffi­sam­ment petite pour faci­li­ter le stockage).
Son génome est bien carac­té­risé, ce qui permet d’utiliser tous les outils de la biolo­gie molé­cu­laire (PCR, puces à ADN…)
Il est possible d’utiliser des animaux prati­que­ment iden­tiques CAD de même poids, de même âge et surtout géné­ti­que­ment semblables permet­tant d’avoir des résul­tats reproductibles.
La neuroa­na­to­mie du rat est égale­ment bien carac­té­ri­sée et présente des simi­li­tudes avec celle de l’homme.

Le modèle de rat 6‑OHDA
Le modèle de rat 6‑OHDA obtenu par une injec­tion unila­té­rale de cette toxine dans une zone spéci­fique du cerveau appe­lée : fais­ceau médian du télen­cé­phale (FMT), est incon­tes­ta­ble­ment le modèle animal qui a le plus contri­bué à la recherche précli­nique sur la MP. Ce modèle a été utilisé pour la première fois dans les années 70 et corres­pond à une dégé­né­res­cence unila­té­rale quasi-​totale des neurones dopa­mi­ner­giques de la substance noire, asso­cié à un syndrome bien décrit :

  • Un défi­cit quasi-​total en dopa­mine au niveau de la struc­ture cible des neurones de la SN : le striatum 
  • Une akiné­sie et une brady­ki­né­sie (diffi­culté à se dépla­cer et à initier les mouve­ments) qui peuvent être quan­ti­fiés en utili­sant diffé­rents tests compor­te­men­taux (stepping-​test, rota­rod, open-field …).

Ce modèle permet donc d’étudier la perte de motri­cité due au manque de dopa­mine dans le cerveau. De plus, un trai­te­ment à la lévo­dopa permet d’améliorer la motri­cité des rats sur ces tests.
Cepen­dant, ces rats développent-​ils des dyski­né­sies (ou mouve­ments anor­maux invo­lon­taires qui sont les compli­ca­tions motrices du trai­te­ment de la mala­die, pouvant être plus inva­li­dantes que la mala­die elle-​même) sous ce trai­te­ment et comment les quantifier ?

Cet aspect a été étudié par le groupe du docteur A. Cenci (en Suède). Ces cher­cheurs ont mis au point une tech­nique pour quan­ti­fier ces dyski­né­sies, induites par une injec­tion biquo­ti­dienne de lévo­dopa. Pour quan­ti­fier ces dyski­né­sies, ils ont utilisé une échelle ressem­blant à celle utili­sée chez l’Homme. Ainsi, sur le plan clinique, ces rats présentent une akiné­sie du membre anté­rieur (une diffi­culté à initier le mouve­ment) mise en évidence par diffé­rents tests compor­te­men­taux ; de plus, la récu­pé­ra­tion fonc­tion­nelle entraî­née par le trai­te­ment à la lévo­dopa s’accompagnent (dans 50% des cas) des dyskinésies.

Ce modèle de rat est à présent utilisé, entre autres, pour analy­ser les dyski­né­sies. Ces dernières résultent proba­ble­ment de puis­sants méca­nismes adap­ta­tifs stria­taux consé­cu­tifs à la perte des affé­rences dopa­mi­ner­giques. En effet, chez l’Homme, les primates non-​humains et les rongeurs, le stria­tum est impli­qué, avec d’autres struc­tures céré­brales, dans un circuit neuro­nal impor­tant pour l’apprentissage de tâches motrices et de mémo­ri­sa­tion. Le manque de dopa­mine ou son apport exogène par le trai­te­ment à la lévo­dopa perturbe cette plas­ti­cité. Afin de comprendre ces méca­nismes, la modu­la­tion de la plas­ti­cité synap­tique stria­tale est étudiée sur ce modèle en utili­sant des tech­niques élabo­rées d’enregistrements élec­tro­phy­sio­lo­giques. Ainsi, depuis plus de 10 ans l’équipe du profes­seur Cala­bresi, à Rome, a contri­bué à amélio­rer la compré­hen­sion de ces phéno­mènes complexes de plas­ti­ci­tés dans la mala­die de Parkin­son, pouvant être la base de nouveaux traitements.

Pour finir, ce modèle peut être la base de déve­lop­pe­ment des stra­té­gies théra­peu­tiques de demain :

  • Stra­té­gies de neuro­pro­tec­tion, ayant pour but d’empêcher les neurones dopa­mi­ner­giques encore présents de dégénérer. 
  • Stra­té­gies de rempla­ce­ment, visant à rempla­cer les neurones morts par des cellules souches, cellules géné­ti­que­ment modifiées … 

Ce modèle de rat de la mala­die de Parkin­son, même s’il est impar­fait, est d’un inté­rêt majeur pour comprendre les méca­nismes de la mala­die et la manière dont le cerveau s’adapte à cette mala­die (plas­ti­cité). Ce modèle peut être égale­ment la base d’étude de nouveaux trai­te­ments. Cepen­dant, avant d’envisager des nouveaux trai­te­ments chez l’Homme, des études sont d’abord effec­tuées chez les primates, repré­sen­tant le modèle ultime de la recherche préclinique.

Par Vincent PAILLE vincent_paille@yahoo.fr
Dr es-​Sciences de l’European Brain Reserch Insti­tute à Rome

NB- Nous rappe­lons que ce cher­cheur a été, en partie, financé par CECAP , lors de la présen­ta­tion de sa thèse de doctorat.

5 Commentaires Cliquer ici pour laisser un commentaire

  1. Bjr, je vous remer­cie pour ce para­graphe, je voudrais savoir un peu plus sur le modèle à MPTP

    Commentaire by Madoum-yamani — 20 juillet 2017 #

  2. Pour­quoi, pour­quoi!!! hélas je n’ai aucune réponse à a appor­ter à vos ques­tions — Dans les Asso­cia­tions nous faisons ce que nous pouvons — nous n’avons aucun pouvoir — notre soutien n’est souvent que moral mais cela est appré­ciable . Il est impor­tant de ne pas rester seul face à la mala­die. Vous l’avez compris puisque vous même faites le possible pour aider ceux que vous connais­sez. J’es­père que cette aide vous est rendue puisque vous dites être malade vous même.
    Merci pour ce que vous faites — bien amicalement.E.Six

    Commentaire by GP29 — 16 juillet 2008 #

  3. Bonjour à toutes et tous, j ai par rela­tions, appro­chée de loin ou de plus­rès derniè­re­ment, des proches de parkin­so­nienne et parkin­so­nien et un parki­so­nien, qui avec fran­chise et beau­coup de respect, m a fait part de sa « mala­die » .je suis donc, avec beau­coup d interet sur ce site qu il m a indi­qué (merci Mr Sultan) ; par contre je pense à Denis, qui s occupe seul de ses deux parents et n a aucun soutien dans le dépar­te­ment 31.…Prkoi ???j ai été énor­me­ment decue et profon­dé­ment touchée qu il n ait pas reçu le soutien de l asso­cia­tion qu il a contactée.De plus il assiste d autres parkin­so­niens par le biais de son métier.Je suis tjrs à l écoute lors de nos échanges et Dieu sait s ilvient seule­ment d apprendre les effets de la dopa­mine sur son entou­rage imédiat et professionnel.Prkoi n y a t il pas pr ces profes­sion­nels de la santé de forma­tion et soutien moral par le biais du Minis­tère de la Santé-​Ce n est quand meme pas une mala­die isolée ????Merci à mes deux amis aussi de leurs confiances.Je ne peux que les soute­nir mora­le­ment mais je pense à ts ceux qui en sont atteints .Par la pensée, je suis bien souvent, moi-​meme atteinte par une immo­bi­li­sa­tin doulou­reuse, en train de vous soutenir…Donner, donner, je ne sais faire que donner !!!!Bon courage à tous sincèrement.…

    Commentaire by REINE-PRUDENT — 10 juillet 2008 #

  4. Cher Monsieur,
    Non seule­ment il peut mais il est déjà un outil indis­pen­sable à la recherche sur Parkin­son. En effet, il est rela­ti­ve­ment facile de provo­quer chez le rat des symp­tômes équi­va­lant à ceux de l’être humain. Or, la repro­duc­tion des rats est très rapide, nombreuse et facile ; leur utili­sa­tion est donc beau­coup moins coûteuse que le porc (dont le code géné­tique est à plus de 90% égal à celui de l’homme!). Cepen­dant, pour affi­ner certaines recherches il est néces­saire d’uti­li­ser d’autres cobayes tel que le cochon et, en dernier recours, le singe avant l’ex­pé­ri­men­ta­tion direc­te­ment sur l’homme.
    J’es­père avoir répondu à votre interrogation.
    Je vous remer­cie de l’at­ten­tion portée à notre revue et vous prie d’agréer mes sincères salutations.
    Jean Grave­leau, direc­teur de publication

    Commentaire by JEAN GRAVELEAU — 25 juin 2008 #

  5. bonjour,
    je souhai­tais savoir si dans les dépar­te­ments R&D de l’in­dus­trie phar­ma­ceu­tique, ce modèle de dyski­né­sie chez le rat pouvait deve­nir un outil indis­pen­sable pour le déve­lop­pe­ment de nouveaux trai­te­ments de la mala­die de Parkinson.

    Commentaire by djebili — 23 juin 2008 #

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