Ne pas être qu'un "patient" ...

Graphiques et figures élémentaires pour mieux comprendre le phénomène des blocages et des dyskinésies

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDEPENDANT N°27 – décembre 2006

1. Repré­sen­ta­tion graphique de la concen­tra­tion plasmatique

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La concen­tra­tion du médi­ca­ment dans le sang présente l’allure d’une courbe en cloche : elle croît jusqu’à une valeur maxi­male (Cmax obte­nue après un temps Tmax) puis décroît. La décrois­sance est expo­nen­tielle, la concen­tra­tion dimi­nue de moitié dans un inter­valle de temps carac­té­ris­tique : la ½ vie (T ½) jusqu’à deve­nir nulle ou négligeable.
Les temps Tmax et T ½ varient avec les indi­vi­dus, entre des valeurs limites géné­ra­le­ment données par le Vidal.
Ordres de gran­deurs rete­nues pour la L‑Dopa (Sine­met ou Modopar) :
T max = 1 h ½
T ½ = 2 h ½

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Tous les Parkin­so­niens savent que le trai­te­ment fait son effet envi­ron 30 minutes après inges­tion, ce seuil dit « théra­peu­tique » corres­pond en fait à Cmax/​2 géné­ra­le­ment choisi par le neuro­logue pour les raisons évoquées ci-après.

2. Fréquence d’administration
Problématique :

  • Parve­nir rapi­de­ment à l’efficacité thérapeutique
  • Main­te­nir une concen­tra­tion active le plus long­temps possible tout en évitant des pics de concen­tra­tion exces­sifs suscep­tibles d’entraîner des effets secondaires.

Le seuil théra­peu­tique étant choisi à Cmax/​2, il est néces­saire de déli­vrer la dose suivante avant que la concen­tra­tion ne redes­cende au dessous du seuil théra­peu­tique (une prise toutes les 4 heures : poso­lo­gie bien connue en début de traitement)

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3. Espace théra­peu­tique et effets de la L‑Dopa

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L’effet théra­peu­tique d’un médi­ca­ment est géné­ra­le­ment en grande partie lié à la valeur des concen­tra­tions plas­ma­tiques (dans le sang). On peut observer :

  • un seuil « plan­cher » dit théra­peu­tique (en dessous duquel aucun effet n’est obtenu)
  • un seuil « plafond » dit critique (au delà duquel appa­raissent des effets indésirables)
  • entre les deux, un inter­valle théra­peu­tique dans lequel les concen­tra­tions sont actives et non toxiques. La dose adop­tée doit être telle que la concen­tra­tion maxi­mum soit située dans cet intervalle.

4. Evolu­tion de la fenêtre théra­peu­tique au fil des années (fig 4)

L’équilibre obtenu avec une dose unitaire adap­tée et une fréquence d’administration adéquate n’est pas définitif.
Au fil des années, la fenêtre théra­peu­tique se referme :

  • le seuil théra­peu­tique augmente (accou­tu­mance au médi­ca­ment, modi­fi­ca­tion des para­mètres phar­ma­co­ci­né­tiques de la L‑Dopa par rapport au malade, perte plus impor­tante des neurones dopaminergiques…)
  • le seuil critique s’abaisse et les excès de la L‑Dopa, tolé­rés au début du trai­te­ment, génèrent des compli­ca­tions nouvelles : 
    • fluc­tua­tions d’effet : quand la couver­ture théra­peu­tique n’est plus assu­rée, le patient ressent à nouveau les symp­tômes parkin­so­niens, trem­ble­ments, akiné­sies, hyper­to­nie et son confort devient discon­tinu (malaises en début et fin de dose)
    • effets indé­si­rables : les excès de dosage, inutiles mais sans sanc­tions immé­diates en début de trai­te­ment par la L‑Dopa, engendrent des compli­ca­tions très péna­li­santes (dyski­né­sies) après quelques années (au voisi­nage du maxi­mum de concen­tra­tion plas­ma­tique, au milieu de dose).

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5. Chro­no­bio­lo­gie

Parmi les varia­tions d’efficacité du trai­te­ment, que les malades ressentent, certaines sont pério­diques et la méde­cine a appris à les connaître et à les utili­ser. Les prin­ci­pales sont circa­diennes, sur la durée du jour, comme l’alternance veille/​sommeil, et circan­nuelles (sur l’année) comme la succes­sion des saisons, plus diffi­ciles à iden­ti­fier pour la ques­tion qui nous inté­resse (les centres de géria­trie savent bien que le trai­te­ment est plus impor­tant l’hiver que l’été).

Exemples de varia­tions d’effet circadiennes
Pour une même dose ingé­rée, dans cet exemple, la concen­tra­tion maxi­mum : Cmax, le temps de montée au pic : Tmax et la demi-​vie : T ½, varient prati­que­ment dans le rapport de 1 à 2 ; on imagine les consé­quences sur le choix de la posologie !

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6. Influence des varia­tions d’effet sur l’efficacité du traitement

Dans l’exemple précé­dent, imagi­nons que le seuil théra­peu­tique se situe à un niveau 3, une prise donnée à 7 heures sera effi­cace pendant envi­ron 2h 1/​4, celle donnée à 15 heures sera effi­cace pendant envi­ron 2 heures alors que celle donnée à 23 heures n’aura aucune effi­ca­cité, d’où la perplexité du malade et de son entou­rage. Ce qui peut être le cas pour certains d’entre vous !

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Encore quelques pas vers l’optimisation ?
Pas évident mais compré­hen­sible, non ? oui ?
Demain : interro écrite…
Ceux qui ont en dessous de la moyenne devront faire de solides révi­sions avant de passer au stade de l’optimisation.

Conclu­sions (Tout ça pour ça !)
Sans doute beau­coup d’entre vous seront déçus dans leurs attentes, par cet exposé diffi­cile, qui ne débouche pas sur une solu­tion rapide, valable à très long terme et leur demande une parti­ci­pa­tion exigeante, pas toujours compa­tible avec leur état de forme.
Pour­tant c’est à ce prix que l’on peut arri­ver à mieux connaître sa mala­die et à mieux se soigner en appor­tant son concours à son médecin.
Dimi­nuer l’inconfort et ralen­tir la surve­nue des handi­caps c’est aussi ména­ger l’avenir et garder l’espoir de béné­fi­cier des progrès que la Recherche médi­cale nous promet.

Pierre Lemay & Emile Rainon
Septembre 2006

6 Commentaires Cliquer ici pour laisser un commentaire

  1. Bonjour,
    J’au­rais aimé savoir quelles sont les réfé­rences que vous avez utilisé pour construire ces courbes de phamar­co­ci­né­tique, il y a peu d’ar­ticles qui présentent des profils de courbes indi­vi­duelles et encore moins avec des valeurs quant à la chronopharmacocinétique.
    Merci

    Commentaire by sonia — 28 octobre 2013 #

  2. Bonjour, suite à votre dernier commen­taire, j’ai eu l’oc­ca­sion de déve­lop­per égale­ment un outil de ce type et je me deman­dais s’il est possible de compa­rer nos versions, ou simple­ment échan­ger sur ce type de modèle.
    Ma feuille est là : http://forum.baclofene.org/index.php?p=topic&p_id=75291#p75291
    Elle est issue d’une analyse monocompartimentale.
    Il suffit d’y indi­quer les Tmax, T½ et les doses prises dans la jour­née pour obte­nir le graphe des concentrations.

    Commentaire by Jacques — 10 décembre 2012 #

  3. Bonjour Myriam
    Tout à fait possible, vous m’en­voyez votre adresse mail et je vous envoie ce graphique.
    Nous avons déve­loppé pour notre usage une feuille de calcul sous Excel qui permet de tracer direc­te­ment l’image de la varia­tion de la concen­tra­tion plas­ma­tique d’un trai­te­ment sur une période de 24 heures (fichier de 1M)
    Cordialement

    Commentaire by Lemay Pierre — 17 janvier 2008 #

  4. Très bon exposé, j’au­rai aimai voir la phar­ma­co­ci­né­tique de la l‑dopa à LP (Libé­ra­tion Prolon­gée) à coté de celle de la l‑dopa tout court sur le meme graphique pour bien iden­ti­fier les diffe­rences entre les deux formes.
    Merci.

    Commentaire by Maryam — 9 janvier 2008 #

  5. Mr Lemay vous répond direc­te­ment par courriel .
    bien amica­le­ment E.Six

    Commentaire by E. Six — 12 janvier 2007 #

  6. svp qui sont les auteurs Pierre Lemay & Emile Rainon
    Merci pour cet exposé diffi­cile mais essen­tiel pour comprendre l’éf­fi­ca­cité du trai­te­ment qui se reduit au fil des années (envi­ron 20 ans de taite­ment pour ma soeur agée de 51 ans).

    Commentaire by Jean Marc M — 7 janvier 2007 #

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