Graphiques et figures élémentaires pour mieux comprendre le phénomène des blocages et des dyskinésies
Publié le 06 janvier 2007 à 12:28Article paru dans LE PARKINSONIEN INDEPENDANT N°27 – décembre 2006
1. Représentation graphique de la concentration plasmatique
La concentration du médicament dans le sang présente l’allure d’une courbe en cloche : elle croît jusqu’à une valeur maximale (Cmax obtenue après un temps Tmax) puis décroît. La décroissance est exponentielle, la concentration diminue de moitié dans un intervalle de temps caractéristique : la ½ vie (T ½) jusqu’à devenir nulle ou négligeable.
Les temps Tmax et T ½ varient avec les individus, entre des valeurs limites généralement données par le Vidal.
Ordres de grandeurs retenues pour la L‑Dopa (Sinemet ou Modopar) :
T max = 1 h ½
T ½ = 2 h ½
Tous les Parkinsoniens savent que le traitement fait son effet environ 30 minutes après ingestion, ce seuil dit « thérapeutique » correspond en fait à Cmax/2 généralement choisi par le neurologue pour les raisons évoquées ci-après.
2. Fréquence d’administration
Problématique :
- Parvenir rapidement à l’efficacité thérapeutique
- Maintenir une concentration active le plus longtemps possible tout en évitant des pics de concentration excessifs susceptibles d’entraîner des effets secondaires.
Le seuil thérapeutique étant choisi à Cmax/2, il est nécessaire de délivrer la dose suivante avant que la concentration ne redescende au dessous du seuil thérapeutique (une prise toutes les 4 heures : posologie bien connue en début de traitement)
3. Espace thérapeutique et effets de la L‑Dopa
L’effet thérapeutique d’un médicament est généralement en grande partie lié à la valeur des concentrations plasmatiques (dans le sang). On peut observer :
- un seuil « plancher » dit thérapeutique (en dessous duquel aucun effet n’est obtenu)
- un seuil « plafond » dit critique (au delà duquel apparaissent des effets indésirables)
- entre les deux, un intervalle thérapeutique dans lequel les concentrations sont actives et non toxiques. La dose adoptée doit être telle que la concentration maximum soit située dans cet intervalle.
4. Evolution de la fenêtre thérapeutique au fil des années (fig 4)
L’équilibre obtenu avec une dose unitaire adaptée et une fréquence d’administration adéquate n’est pas définitif.
Au fil des années, la fenêtre thérapeutique se referme :
- le seuil thérapeutique augmente (accoutumance au médicament, modification des paramètres pharmacocinétiques de la L‑Dopa par rapport au malade, perte plus importante des neurones dopaminergiques…)
- le seuil critique s’abaisse et les excès de la L‑Dopa, tolérés au début du traitement, génèrent des complications nouvelles :
- fluctuations d’effet : quand la couverture thérapeutique n’est plus assurée, le patient ressent à nouveau les symptômes parkinsoniens, tremblements, akinésies, hypertonie et son confort devient discontinu (malaises en début et fin de dose)
- effets indésirables : les excès de dosage, inutiles mais sans sanctions immédiates en début de traitement par la L‑Dopa, engendrent des complications très pénalisantes (dyskinésies) après quelques années (au voisinage du maximum de concentration plasmatique, au milieu de dose).
5. Chronobiologie
Parmi les variations d’efficacité du traitement, que les malades ressentent, certaines sont périodiques et la médecine a appris à les connaître et à les utiliser. Les principales sont circadiennes, sur la durée du jour, comme l’alternance veille/sommeil, et circannuelles (sur l’année) comme la succession des saisons, plus difficiles à identifier pour la question qui nous intéresse (les centres de gériatrie savent bien que le traitement est plus important l’hiver que l’été).
Exemples de variations d’effet circadiennes
Pour une même dose ingérée, dans cet exemple, la concentration maximum : Cmax, le temps de montée au pic : Tmax et la demi-vie : T ½, varient pratiquement dans le rapport de 1 à 2 ; on imagine les conséquences sur le choix de la posologie !
6. Influence des variations d’effet sur l’efficacité du traitement
Dans l’exemple précédent, imaginons que le seuil thérapeutique se situe à un niveau 3, une prise donnée à 7 heures sera efficace pendant environ 2h 1/4, celle donnée à 15 heures sera efficace pendant environ 2 heures alors que celle donnée à 23 heures n’aura aucune efficacité, d’où la perplexité du malade et de son entourage. Ce qui peut être le cas pour certains d’entre vous !
Encore quelques pas vers l’optimisation ?
Pas évident mais compréhensible, non ? oui ?
Demain : interro écrite…
Ceux qui ont en dessous de la moyenne devront faire de solides révisions avant de passer au stade de l’optimisation.
Conclusions (Tout ça pour ça !)
Sans doute beaucoup d’entre vous seront déçus dans leurs attentes, par cet exposé difficile, qui ne débouche pas sur une solution rapide, valable à très long terme et leur demande une participation exigeante, pas toujours compatible avec leur état de forme.
Pourtant c’est à ce prix que l’on peut arriver à mieux connaître sa maladie et à mieux se soigner en apportant son concours à son médecin.
Diminuer l’inconfort et ralentir la survenue des handicaps c’est aussi ménager l’avenir et garder l’espoir de bénéficier des progrès que la Recherche médicale nous promet.
Pierre Lemay & Emile Rainon
Septembre 2006
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Bonjour,
J’aurais aimé savoir quelles sont les références que vous avez utilisé pour construire ces courbes de phamarcocinétique, il y a peu d’articles qui présentent des profils de courbes individuelles et encore moins avec des valeurs quant à la chronopharmacocinétique.
Merci
Commentaire by sonia — 28 octobre 2013 #
Bonjour, suite à votre dernier commentaire, j’ai eu l’occasion de développer également un outil de ce type et je me demandais s’il est possible de comparer nos versions, ou simplement échanger sur ce type de modèle.
Ma feuille est là : http://forum.baclofene.org/index.php?p=topic&p_id=75291#p75291
Elle est issue d’une analyse monocompartimentale.
Il suffit d’y indiquer les Tmax, T½ et les doses prises dans la journée pour obtenir le graphe des concentrations.
Commentaire by Jacques — 10 décembre 2012 #
Bonjour Myriam
Tout à fait possible, vous m’envoyez votre adresse mail et je vous envoie ce graphique.
Nous avons développé pour notre usage une feuille de calcul sous Excel qui permet de tracer directement l’image de la variation de la concentration plasmatique d’un traitement sur une période de 24 heures (fichier de 1M)
Cordialement
Commentaire by Lemay Pierre — 17 janvier 2008 #
Très bon exposé, j’aurai aimai voir la pharmacocinétique de la l‑dopa à LP (Libération Prolongée) à coté de celle de la l‑dopa tout court sur le meme graphique pour bien identifier les differences entre les deux formes.
Merci.
Commentaire by Maryam — 9 janvier 2008 #
Mr Lemay vous répond directement par courriel .
bien amicalement E.Six
Commentaire by E. Six — 12 janvier 2007 #
svp qui sont les auteurs Pierre Lemay & Emile Rainon
Merci pour cet exposé difficile mais essentiel pour comprendre l’éfficacité du traitement qui se reduit au fil des années (environ 20 ans de taitement pour ma soeur agée de 51 ans).
Commentaire by Jean Marc M — 7 janvier 2007 #