Ne pas être qu'un "patient" ...

Conférence du 13 mars 2001

Paru dans Le Parkin­so­nien Indé­pen­dant n°6 — septembre 2001

LA SEMAINE DU CERVEAU
Animée par le profes­seur Laurent LESCAUDRON
Et M. Philippe BIENVEILLANT

Inter­ven­tion de Philippe BIENVEILLANT

Parmi les mala­dies neuro­dé­gé­né­ra­tives, trois prin­ci­pales s’attaquent au cerveau à l’intérieur du système nerveux central : la Chorée de Hunting­ton, la mala­die d’Alzheimer qui touche les neurones de l’hippocampe et les neurones corti­caux et la mala­die de Parkin­son qui touche les neurones dopa­mi­ner­giques de la substance noire.

Plusieurs stra­té­gies ont été envi­sa­gées. L’une d’entre elles consiste à proté­ger les neurones contre la mala­die en utili­sant des facteurs neuro­tro­phiques qui les protègent des stimu­lus toxiques. Deux méthodes : soit par voie médi­ca­men­teuse soit par injec­tion directe. Une autre consiste à gref­fer des neurones au niveau de la zone lésée.

Les facteurs neuro­tro­phiques sont des protéines très impor­tantes en embryo­lo­gie pour le déve­lop­pe­ment et la diffé­ren­cia­tion des neurones. Elles peuvent égale­ment proté­ger des neurones adultes in vitro. Les diffé­rents types de molé­cules ont des cibles parti­cu­lières : les neurones poly­ner­giques concer­nés par la mala­die d’Alzheimer, les neurones dopa­mi­ner­giques dans la mala­die de Parkinson.

Cepen­dant un des problèmes impor­tants dans ce type de trai­te­ment neuro­pro­tec­teur, c’est la néces­sité que les neurones soient encore présents. Or les signes cliniques des mala­dies appa­raissent lorsqu’il y a dispa­ri­tion impor­tante des neurones concernés.

C’est pour­quoi l’approche restau­ra­trice qui consiste à rempla­cer les neurones manquant par une greffe suscite beau­coup d’espoir. Pour ce faire, on s’intéresse aux cellules souches neuro­nales que l’on va préle­ver soit sur des cerveaux adultes (mais il y a peu de ce type de cellules) soit sur des embryons.

Après avoir été préle­vées puis disso­ciées, on les fait proli­fé­rer de telle manière que se sont des blocs de cellules que l’on injecte. Cepen­dant ces cellules sont multi potentes et peuvent donner d’autres types cellu­laires du cerveau : les astro­cytes et des oligoen­tro­cytes qui ne sont pas inté­res­santes en l’occurrence.

La recherche se consacre donc à déter­mi­ner comment aller d’une cellule souche à un type de neurone très parti­cu­lier propre à la mala­die concer­née. Il faut donc cher­cher les méca­nismes en cause : soit par l’ajout de facteurs neuro­tro­phiques soit en modi­fiant géné­ti­que­ment les cellules. Les facteurs extrin­sèques de crois­sance corres­pondent à toute une famille de protéines ; les facteurs intrin­sèques corres­pondent à des types d’ADN.

Une étude Joseph WAGNER qui combine les deux éléments – injec­tion d’ADN au sein de cellules du cerve­let et culture en milieu condi­tionné par des astro­cytes – a permis d’obtenir in vitro des neurones thyroxine in oxydase, neurone dopa­mi­ner­gique utile pour répondre à la mala­die de Parkinson.

La ques­tion aujourd’hui est la suivante : peut-​on obte­nir les mêmes résul­tats in vivo, c’est à dire direc­te­ment dans le cerveau ? C’est tout l’objet des recherches sur le rat pour lequel on arrive à créer la mala­die. La recherche devra ensuite passer au primate avant d’atteindre l’homme.

Pour l’instant des cellules souches embryon­naires ont été gref­fées à l’hôpital de La Pitié dans des cas de Chorée de Hunting­ton et de Parkin­son, avec des résul­tats promet­teurs surtout dans le premier cas.

Inter­ven­tion du Profes­seur Laurent LESCAUDRON

Il présente les résul­tats obte­nus au dépar­te­ment neuro­chi­rur­gie du Minnesota.

Tout d’abord qu’est ce qu’une cellule souche ? C’est une cellule qui va se divi­ser en cellules filles qui vont avoir la possi­bi­lité de se diffé­ren­cier et ainsi donner n’importe quel organe : cellules de peau, de muscle, cellules du cerveau, etc … Ainsi à partir de ces cellules on peut espé­rer créer des cellules dopa­mi­ner­giques en rempla­ce­ment des neurones dispa­rus dans le cadre de la mala­die de Parkinson.

Son travail s’est inté­ressé aux cellules présentes chez l’adulte.

Où va-​t-​on les trou­ver ? En, il semble­rait que, partout où l’on cherche, on en trouve : au niveau des muscles, de la peau, du foie, du pancréas et aussi au niveau du cerveau. Il a donc choisi de travailler au niveau de la moelle osseuse qui en comporte une quan­tité suffisante.

On va alors essayer de comprendre ce qu’il faut faire pour que l’organisme puisse utili­ser les cellules à sa dispo­si­tion : soit en les préle­vant pour leur donner ce qui est néces­saire pour leur trans­for­ma­tion soit en appor­tant à l’organisme les moyens de les utili­ser lui-même.

L’intérêt de cette recherche réside dans le fait qu’il n’y a pas de rejet du fait que le patient est son propre donneur ; il n’y a donc pas de problème immunologique.

Dans la moelle osseuse, on trouve des cellules souches de la lignée des mato­po­lié­tiques, les précur­seurs des globules rouges et blancs, et des cellules M.S.C. qui peuvent donner entre autre du tissu nerveux. Ces cellules mises en culture in vitro vont se repro­duire et, sous diffé­rents facteurs décrits précé­dem­ment, sont capables de se déter­mi­ner en neurone dopaminergique.

Ainsi, on prélè­ve­rait la moelle osseuse du malade ; on trans­forme les cellules et on les fait se repro­duire puis ensuite on greffe ces neurones dopa­mi­ner­giques sur le patient. Voilà la théorie.

C’est une nouvelle approche pour répa­rer le cerveau qui a l’intérêt de multi­plier les cellules en quan­tité illi­mi­tée, qui ne pose pas de problème de conta­mi­na­tion puisqu’il s’agit des cellules du patient et aucun des problèmes d’éthique que pose la greffe de neurones d’embryons.

Malheu­reu­se­ment, on n’en connaît pas encore suffi­sam­ment sur les inci­dences et l’évolution de ces cellules pour pouvoir les utili­ser dès à présent sur tous les malades Parkin­so­niens ou Alzheimer.

Les statis­tiques font appa­raître un nombre tout à fait impor­tant de malades suscep­tibles d’être inté­res­sés par cette greffe (chiffres de l’année dernière aux USA : 1,5 millions Parkin­son ; 4 millions ostéo­po­rose, cancer et Alzhei­mer). Ceci inté­resse donc non seule­ment la recherche théo­rique mais bien évidem­ment les indus­triels. Ces labo­ra­toires parient sur les cellules souches et « spon­so­risent » certaines univer­si­tés : ils paient des cher­cheurs pour qu’ils trouvent.

On vient de parler des cellules de la moelle osseuse mais il peut s’agir de n’importe quelles cellules souches et ainsi trai­ter les patients Parkin­so­niens, Alzhei­mer, Hunting­to­niens ou toute dégé­né­res­cence de la moelle osseuse.

Les cellules souches sont donc l’avenir de la recherche aujourd’hui.

Les ques­tions de l’assemblée

La mala­die de Hunting­ton est géné­tique ; n’y a‑t-​il pas néces­sité d’intervenir à nouveau en cas de greffe ?
Bien sûr mais si cela permet de restau­rer la fonc­tion pendant une ving­taine d’année, cela est un vrai progrès.

Les neurones sont fonc­tion­nels par les rela­tions qu’ils ont entre eux. Peuvent-​ils en établir lorsqu’ils sont greffés ?
Cela a été démon­tré par les greffes neuro­nales : ils recréent des rela­tions. En fait, il s’est avéré que chez les patients où il y avait des connexions entre les neurones gref­fés et leurs propres neurones, ces patients avaient une meilleure récu­pé­ra­tion fonc­tion­nelle. Il faut effec­ti­ve­ment qu’il y ait une inté­gra­tion dans tous les cas des cellules gref­fées avec le tissu existant.
On a pu le consta­ter sur des animaux à qui on a greffé des cellules et qui ont pu récu­pé­rer une partie de leur capacité.
Tout dépend de la distance entre l’endroit où on dépose les cellules à gref­fer et la cible : plus on en est proche, plus les connexions se font facilement.
Quels sont les risques poten­tiels d’implanter des cellules souches dans le cerveau ?
Il y a toujours le risque de perdre le contrôle de la cellule qui risque de deve­nir maligne. Il faudrait alors essayer une stra­té­gie de destruc­tion. Ainsi dans les premières greffes on a constaté des progrès la première année puis un effet inverse commen­çait à appa­raître du fait que les cellules deve­naient trop actives.
En fait, le remède est la tech­nique de mani­pu­la­tion géné­tique qui permet d’installer des contrôles de la cellule.

A propos de la mala­die d’Alzheimer

Les mala­dies neuro­dé­gé­né­ra­tives semblent être le propre de l’homme sans du à l’extraordinaire complexité du déve­lop­pe­ment du cortex céré­bral. C’est peut-​être cette compli­ca­tion là qui explique la mémoire très déve­lop­pée de l’homme mais en même temps les problèmes de santé à ce niveau.

La mala­die d’Alzheimer est fréquem­ment liée à l’âge mais il existe des formes jeunes. Il existe deux formes de lésions consta­tées post-​mortem : soit des plaques séniles soit des neurones dystro­phiques qui contiennent des éléments hyper­phos­pho­ri­sés. Ces lésions se situent au niveau du cortex anto­ri­nal puis au niveau de l’hippocampe. Or le cortex est la zone noble du cerveau : c’est le siège de la mémo­ri­sa­tion, du compor­te­ment, des appren­tis­sages. La perte de neurones à ce niveau entraîne donc l’apparition de la mala­die qui va progres­ser au fur et à mesure de la dégé­né­res­cence des cellules.

Les études sur la plaque sénile conduisent à décrire les éléments essen­tiels qui la composent : un peptide de 42 acides animés qui dérive d’une grosse protéine qui peut compor­ter jusqu’à 770 acides animés. On a pu ainsi étudier des familles dont les membres ont une forme jeune de la mala­die et commen­cer la séquence de leur ADN diffé­rente des autres personnes.

Le travail aujourd’hui consiste à déve­lop­per des molé­cules ou de nouveaux concepts pour tenter de préve­nir voir guérir la mala­die. Des scien­ti­fiques suisses travaillent sur des souris trans­gé­niques qui déve­loppent des plaques séniles mais ces modèles sont-​ils proches de l’homme ? Toute la ques­tion est là.

La mala­die d’Alzheimer est la mala­die dégé­né­ra­tive du cerveau la plus courante. Elle concerne 350 000 personnes. Extrê­me­ment rare avant 65 ans, elle peut toucher près d’un tiers des personnes de plus de 65 ans ; du fait de la longé­vité en augmen­ta­tion, le nombre de malades est à prévoir en augmentation.

Les trai­te­ments actuels cherchent à stabi­li­ser les troubles du compor­te­ment et rendre plus agréable la vie de l’entourage. Il s’agit de psycho­tropes, de calmants, d’antidépresseurs, de neuroleptiques.

La mala­die de Parkin­son peut-​elle débou­cher sur la mala­die d’Alzheimer ?
Parfois les patients ont une mala­die asso­ciée, mais les parkin­so­niens n’ont pas plus de risques que les autres de déve­lop­per une mala­die d’Alzheimer.

Compte rendu réalisé par : Chris­tine RICHEBOEUF
Résumé par : Jean GRAVELEAU

2 Commentaires Cliquer ici pour laisser un commentaire

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    Commentaire by big — 20 mai 2006 #

  2. j’ai besoin de rece­voir les infor­ma­tion concer­nant les malades nerveuses

    Commentaire by big — 20 mai 2006 #

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