Incontinence urinaire, comment venir à bout de ce tabou ?
Publié le 17 septembre 2016 à 10:06Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°66
Les blessés médullaires souffrent de nombreux troubles associés dont certains altèrent considérablement la vie quotidienne. Parmi eux, l’incontinence urinaire serait même le premier désagrément. Aujourd’hui, la médecine apporte des réponses. Le Pr Xavier Gamé, urologue à l’Hôpital de Toulouse, fait le point.
Les troubles urinaires s’avèrent souvent associés à une lésion de la moelle épinière. Une situation qui, vécue comme une honte, affecte encore plus la qualité de vie des blessés médullaires. « Chez les personnes handicapées motrices, l’incontinence représente même la première cause d’altération de la vie quotidienne », souligne le Pr Xavier Gamé, urologue au CHU de Toulouse et membre de l’Association française d’urologie (AFUL).
Hélène, 52 ans, est handicapée à 80% depuis 1998. Suite à une opération pour une hernie discale, les nerfs du bas de sa colonne vertébrale ont été touchés ; elle souffre du syndrome de la queue de cheval. « Je ne sais plus exactement quand j’ai commencé à avoir des fuites urinaires mais c’était très perturbant pour moi car je n’osais plus sortir. Je porte des protections même si, au début, j’avais peur que cela se voit et d’avoir des odeurs. Maintenant je n’ai plus aucun problème avec et ne suis pas gênée d’en parler ».
La toxine botulique comme traitement de seconde intention :
Dans la majorité des cas, une cause vésicale provoque l’incontinence chez les blessés médullaires. Il s’agit de contractions anormales de la vessie entraînant une hyperactivité vésicale. « Les personnes en fauteuil, ont fréquemment envie d’uriner mais sans avoir le temps d’y aller. Une situation qui provoque les fuites », décrit le Pr Gamé.
Heureusement, il existe des traitements ayant prouvé leur efficacité. Celui de première intention, repose sur des médicaments efficaces chez une personne sur quatre mais pas toujours bien toléré, comme l’Oxybutynine (Ditropan) qui a comme effets secondaires possibles : « une sécheresse buccale, une constipation, une altération des fonctions supérieures chez le sujet âgé et des troubles visuels. » En seconde intention, « depuis 1999, le principal traitement reste l’injection de toxine botulique dans la vessie », explique le Pr Gamé. Après son succès contre les rides, les migraines ou son efficacité chez les personnes souffrant d’une transpiration excessive, une nouvelle application a été découverte au Botox®.
Depuis 2011, l’Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et son équivalent américain (FDA) ont donné leur aval pour l’utilisation de la toxine botulique afin de traiter l’incontinence des personnes souffrant d’un trouble neurologique (sclérose en plaques ou lésion de la moelle épinière). Et, depuis quelques années, l’Agence du médicament a autorisé sa mise sur le marché pour cette nouvelle indication « Le recours à cette technique est envisagé après l’échec d’un traitement médicamenteux. Ces injections apportent un résultat satisfaisant chez deux tiers des patients », précise le Pr Gamé. C’est avec ce traitement qu’Hélène se soigne. « J’ai des injections annuelles. Avec ce traitement, je n’ai presque plus de fuites. Ce n’est pas du 100% mais une amélioration. Au quotidien, je dois réaliser six à huit sondages ; ce n’est pas évident mais j’ai appris à vivre avec ».
Comment cela fonctionne ? Sous endoscopie, du Botox® est injecté par un médecin urologue dans différents points de la vessie. La toxine botulique cible les nerfs sensoriels et permet de relâcher le muscle hyperactif. Les effets bénéfiques se font ressentir quelques jours après l’intervention mais ne demeurent pas définitifs. « L’injection doit être répétée tous les huit mois environ car le Botox® s’atténue au fil des mois ». Le bémol ? Ce traitement cause, dans certains cas, des effets secondaires que détaille le Pr Gamé : « du sang peut être présent dans les urines pendant 24 heures après l’intervention. Chez 7% des patients, il est aussi possible de souffrir d’une infection urinaire. Dans certains cas exceptionnels, les patients ressentent une fatigue généralisée ».
Du bon usage de la parole :
Cependant, pour les patients atteints d’une sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson ou après un accident vasculaire cérébral (AVC) une autre solution existe. « Pour ceux qui ne pratiquent pas l’auto-sondage, des stimulations électriques peuvent être mises en place. Les résultats sont bons mais pas chez les blessés médullaires complets » temporise le Pr Gamé.
Hormis les traitements, le spécialiste rappelle qu’il n’existe malheureusement pas de bons gestes pour limiter l’incontinence au quotidien. « Je suis en auto-sondage depuis cette époque. Le matériel a beaucoup évolué. Si, au début il me fallait des poches, des sondes etc.… maintenant j’utilise des kits très discrets et très pratiques » raconte Hélène. Et elle se souvient : « Cela n’a pas été facile. Heureusement que j’étais à l’hôpital, une infirmière me faisait mes soins plusieurs fois par jour. Pour me permettre de rentrer chez moi, j’ai dû apprendre à faire mes auto-sondages. »
Pourquoi devrait-on avoir honte des problèmes urinaires ?
Mais le Pr Gamé souhaite délivrer un message encourageant aux patients. « Dans le cas de l’incontinence urinaire, ils ne doivent pas hésiter à consulter un spécialiste et à en parler avec leur médecin. Nous avons aujourd’hui les moyens de les traiter. La médecine possède un arsenal thérapeutique adapté ». En France, l’incontinence urinaire touche au moins 2,6 millions de personnes de plus de 65 ans. Des contractions anormales de la vessie (schéma de gauche) entraînent une hyperactivité vésicale. Le plancher pelvien n’est alors plus assez tonique et ne retient pas l’urine (schéma de droite).
Article de Johanna Anselme du magazine Faire Face.
Transmis par Nicole Lecouvey
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