Ne pas être qu'un "patient" ...

Une journée entre nous,malades, accompagnants

paru dans Le Parkin­so­nien Indé­pen­dant n°15 — décembre 2003

Samedi 22 novembre 2003

Comme chaque année, depuis main­te­nant trois ans, l’association de Loire Atlan­tique propose à ses adhé­rents une jour­née « parti­cu­lière » où se retrouvent, en groupes de travail sépa­rés, les malades et leurs accom­pa­gnants. La mise en commun de l’après midi permet de se
dire le « vécu » de chacun et, quel­que­fois, des réflexions qui ne se disent pas entre les partenaires.

Le diag­nos­tic :

Cette année, sur une cinquan­taine de personnes, plus des trois quarts étaient « nouvel­le­ment affec­tées » par la mala­die. Elles ont redit ce que chacun d’entre nous a vécu dans son histoire person­nelle : la violence du diag­nos­tic et les réac­tions de « fuite », d’agressivité ou de « refus » qu’il a provoqué.

L’un des signes avant-​coureur le plus fréquent : la douleur dans l’épaule ressem­blant à de l’arthrose et les diffi­cul­tés à écrire pour laquelle la recherche ne va pas s’orienter de prime abord vers le neuro­logue mais plutôt vers le rhuma­to­logue ou le scanner.

Lorsque la rencontre se produit avec le neuro­logue, les tests cliniques – qui paraissent d’une simpli­cité presque sommaire – lui permettent d’annoncer le diag­nos­tic qui s’avère juste quand l’utilisation des médi­ca­ments apporte un soula­ge­ment quasi immédiat.

Mais tous nous avons d’énormes diffi­cul­tés à l’entendre prononcé d’autant qu’il nous projette dans un avenir de « dégé­né­res­cence » des neurones et donc de notre acti­vité ! C’est du moins ce qu’on imagine immé­dia­te­ment. Et puis on est confronté à son propre vieillis­se­ment : il faut faire le « deuil » de sa vie rêvée.

Accom­pa­gner un malade :

Les accom­pa­gnants soulignent alors l’espèce de subtile sépa­ra­tion qui s’instaure entre le malade et le monde qui les entoure : certains ne veulent pas infor­mer leur entou­rage – y compris leurs enfants – pour ne pas être « plaints » et accueillis comme des malades.

Ils soulignent aussi la « culpa­bi­lité » qu’ils subissent, ou qu’ils s’infligent, de ne pas être malade ! Et les atti­tudes dépri­mantes quel­que­fois agres­sives de leur compa­gnon ou de leur compagne.

Ils insistent sur la néces­sité de se proté­ger, de trou­ver des acti­vi­tés qui les fassent sortir du cycle infer­nal de la mala­die que leur impose leur parte­naire. Mais en même temps, là aussi, ils se culpa­bi­lisent d’agir en dehors de leur « malade » ou d’être obligé de faire appel à des aides exté­rieures pouvant aller jusqu’au « place­ment » dans un établis­se­ment spécialisé !

Qu’est ce que la mala­die m’a apporté de positif ?

Voila une ques­tion que nous n’avions pas envi­sa­gée et qu’un malade a propo­sée au groupe. Ce fût éton­nant de voir combien elle a permis de sortir des « recettes de cuisine » habi­tuelles : quel est votre trai­te­ment ? Combien de ceci ou de cela ? Est-​ce que je suis bien soigné ? Des ques­tions auxquelles nous ne pouvons pas – et ne voulons pas – répondre parce que ce n’est pas de notre compé­tence et que chaque cas est unique.
Pour certains d’entre nous, la mala­die a amené à rela­ti­vi­ser les choses, à remettre en pers­pec­tive les préoc­cu­pa­tions de la vie courante. Il nous faut aller à l’essentiel. Et puis lorsque la mala­die est asso­ciée à d’autres affec­tions, pour certaines à l’issue éven­tuel­le­ment plus fatales (cancer par exemple), des prio­ri­tés se dégagent.

Elle permet de revoir sa propre échelle des valeurs.

Elle entraîne la rencontre d’autres personnes – à l’exemple de cette jour­née – de parta­ger des situa­tions simi­laires. Le partage, l’humour, la prise de distance, un ensemble de mots ou d’attitudes qui nous font évoluer et avan­cer dans notre quoti­dien ainsi que de mieux se connaître soi-même.

Pour d’autres, elle a permis de se décou­vrir des talents cachés : l’écriture par exemple ou la randon­née, la marche, la décou­verte de nouveaux horizons.

De toutes les façons, elle a amené le couple à s’interroger sur son avenir et sur ce qui le faisait vivre. Pour certains, cette épreuve de vérité a entraîné la rupture pour d’autres le rappro­che­ment, pour d’autres, enfin, la décou­verte d’un nouvel amour. (Retrou­vez l’éditorial du numéro 10 : « un médi­ca­ment toujours effi­cace : l’amour »).

La prise en compte de la maladie :

L’un d’entre nous a parlé de la notion de « chef d’équipe » défi­nis­sant ainsi le rôle dans lequel il se voit : c’est à lui de coor­don­ner les diffé­rents tech­ni­ciens qui l’entourent (neuro­logue, kiné­si­thé­ra­peute, etc.…). Il se veut respon­sable à part entière de son traitement.

Lorsqu’elle ne se voit pas, la mala­die est plus suppor­table pour l’entourage ; mais inver­se­ment, on ne comprend pas bien les défaillances du parkin­so­nien lorsqu’elles se produisent.

Pour autant, il appa­raît judi­cieux d’éviter de trop verser dans le « cocoo­ning », le mater­nage : ce n’est pas une bonne chose pour accom­pa­gner le malade qui, au contraire, a besoin d’être stimulé et mis en confiance sur ces capa­ci­tés à agir.

Quant aux trai­te­ments phar­ma­co­lo­giques, ils sont et devraient être adap­tés au plus juste par rapport à chaque cas qui évolue diffé­rem­ment suivant les personnes. Ainsi a été évoquée l’homéopathie dont certaines personnes ressentent une réelle effi­ca­cité. On ne peut pas se pronon­cer en la matière d’autant plus que la mala­die de Parkin­son est sujette à varia­tions en fonc­tion du contexte psycho­lo­gique qui entoure le malade.

Parkin­son et sexualité :
Plusieurs couples ont tenu à expri­mer leur désar­roi devant un phéno­mène abso­lu­ment caché par les tech­ni­ciens qui pres­crivent des médi­ca­ments qui, en fait, ont des effets sur la libido ou sur l’érection.

Ils regrettent avec viva­cité que personne n’en parle. Bien sûr on évoque l’impuissance mais comme une réac­tion normale due au vieillis­se­ment. Par contre, on n’évoque pas ou très rare­ment les effets inverses de certains médi­ca­ments, ce qui peut poser des problèmes très vifs dans le couple.

En forme de conclusion

Chacun a pu s’exprimer tran­quille­ment en étant écouté par les autres et toutes les ques­tions même inat­ten­dues ont pu être évoquées : c’est là la réus­site de ces jour­nées dont on nous demande la reprise chaque année même si, en tant que respon­sables, nous pour­rions penser usure et répé­ti­tion de la formule.

Compte rendu proposé par Jean GRAVELEAU
En colla­bo­ra­tion avec :
Mary­vonne ROGINSKI, psychologue 

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