Ne pas être qu'un "patient" ...

La kinésithérapie

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT N°37 —  juin 2009

Confé­rence du 2 avril 2009 à Parthe­nay D’Alain Boyer 

Je vous féli­cite pour votre action en faveur de la recon­nais­sance, de la prise en charge et de la vulga­ri­sa­tion des connais­sances sur la Parkin­son. Mon rôle de kiné­si­thé­ra­peute m’a permis au sein de l’enseignement et de la recherche, d’appréhender un peu mieux la mala­die au demeu­rant variée, lais­sant dire que chaque parkin­so­nien a sa propre forme et évolu­tion. C’est en partie vrai, mais en statis­tiques médi­cales le nombre de patients et les formes permettent de tirer des géné­ra­li­tés que l’on retrouve de manière récurrente. 

Pour cette raison, je vous propose un descrip­tif de la mala­die, les moyens en kiné­si­thé­ra­pie et dans la vie courante, diffé­rents programmes de gymnas­tique, et les adju­vants massages physio etc … Pour une ques­tion de compré­hen­sion, j’ai choisi de décrire le rôle de la kiné­si­thé­ra­pie et les diffé­rentes fonc­tions générées. 

Je vous parle­rai donc des objec­tifs pour chaque exer­cice présenté. Natu­rel­le­ment ces exer­cices ne sont pas exhaus­tifs, d’autres profes­sion­nels peuvent vous présen­ter d’autres formes ayant les mêmes objectifs. 

Rappel de neuropathologie :
Comme vous le savez, la mala­die de parkin­son est due à une affec­tion dégé­né­ra­tive des noyaux du système extra­py­ra­mi­dal. Le noyau gris central le plus affecté par ce proces­sus est le Locus Niger. Ce système commande la partie instinc­tive et auto­ma­tique de l’activité motrice. Il réalise, hors du champ de la volonté, un schéma moteur d’ensemble, mobi­li­sant les masses postu­rales, permet­tant les mouve­ments syner­giques de la posture et de la marche, faci­lite l’expression corpo­relle et la mimique. 

La mala­die est la mani­fes­ta­tion d’un désordre fonc­tion­nel, de certains noyaux gris centraux, résul­tant de la suppres­sion du contrôle exercé par la boucle nigros­trio­ni­grique. Il existe une dégé­né­res­cence sévère du locus Niger consti­tué de neurones dopa­mi­ner­giques. L’élément déter­mi­nant la patho­gé­nie du Parkin­son, c’est la chute du taux de Dopa­mine dans le Puta­men, le noyau Caudé et le Locus Niger. 

C’est la compré­hen­sion de cette patho­gé­nie qui a provo­qué une véri­table révo­lu­tion permet­tant de maîtri­ser l’évolution, d’atténuer les effets et de permettre une autre vie à nos amis parkinsoniens.

Rappel clinique :
Vous connais­sez tous les diffé­rents troubles provo­qués par la mala­die de Parkin­son, je vous en rappelle les diffé­rents signes de manière succincte. 

Début lent et progres­sif. Fati­ga­bi­lité. Maladresse. Lenteur des mouve­ments. Perte du balan­ce­ment des bras lors de la marche. Trem­ble­ment au repos.

Faute de trai­te­ment équi­li­bré les trois grands symp­tômes appa­raissent : ce sont ces symp­tômes qui seront à combattre lors de la kiné­si­thé­ra­pie. Trem­ble­ment, rigi­dité, akiné­sie.

  • le trem­ble­ment
    Il appa­raît au repos au niveau de l’extrémité distale des membres supé­rieurs, le pied, la langue et la mâchoire.
  • la rigi­dité
    On dit que le parkin­so­nien est figé en flexion tête en avant dos courbé avant bras et genou en légère flexion, bras collés au corps, le faciès amimique, appelé aussi de « porce­laine ».
    Vous avez aussi vu votre méde­cin ou kiné impri­mant un mouve­ment de flexion des coudes ou des poignets, il perçoit ainsi votre hyper­to­nie muscu­laire s’opposant aux mouve­ments et cédant par à‑coups succes­sifs. C’est la recherche du signe de la « roue dentée ».
  • l’akinésie :
    Elle se traduit par un dysfonc­tion­ne­ment de l’activité volon­taire et auto­ma­tique. Lors de la marche, le patient avance à petits pas, tête en avant avec l’impression qu’il va courir après son centre de gravité, les bras collé au corps. Au moindre obstacle, il va piéti­ner et se bloque. Une voix lente. Une écri­ture trem­blée, lettres fines dimi­nuant en taille (micro­gra­phie). Acti­vité plus ralentie.
    Voici donc les diffé­rents troubles que nous aurons à prendre en charge en kiné­si­thé­ra­pie et vous-​même dans la vie courante. 

Mais, le parkin­son ne vous évitera pas de subir les effets dus à l’âge :
Arthrose, colonne verté­brale dans son ensemble aggra­vée par les contrac­tures muscu­laires. Douleurs des épaules. Consti­pa­tion. Trouble de la venti­la­tion thoracique.

Notre action aura pour prin­cipe de prévenir :

  1. Les raideurs : du rachis cervi­co­dorso, du thorax en insis­tant sur le travail diaphrag­ma­tique ; des membres supé­rieurs et inférieurs.
  2. La proprio­cep­tion debout cher­chant à conser­ver ou à retrou­ver des appuis.
  3. La motri­cité oculaire : amélio­rer le réflexe occulomoteur.
  4. Le bien-​être : dans ce corps qui bouge les efforts sont plus intenses, les massages sont appro­priés mais pas une arme théra­peu­tique unique.

Malgré la chro­ni­cité du parkin­son, l’ensemble médi­ca­ments, kiné­si­thé­ra­pie et volonté, avec l’aide des accom­pa­gnants, ont permis un confort dans la durée. 

Massages :
S’ils sont béné­fiques, ils ne sont pas un trai­te­ment global du Parkin­son. Du fait des dyski­né­sies quasi perma­nentes les muscles se comportent comme ceux des spor­tifs et produisent de l’acide lactique, qui lui-​même favo­rise les crampes et contrac­tures. Alors, comme pour les spor­tifs, le massage est un acte essen­tiel mais pas unique dans le trai­te­ment kiné­si­thé­ra­pie du parkinsonien. 

Nous cher­chons à détendre les contrac­tures, tant au niveau du rachis cervi­cal que du rachis lombaire sans oublier les épaules et les membres infé­rieurs et supé­rieurs. Pour cela, nous prati­quons des massages relaxant au début suivis de pétris­sage mode­lage en obte­nant une détente neuro­mus­cu­laire, asso­cié à la ther­mo­thé­ra­pie (enve­lop­pe­ments de boue ou utili­sa­tion d’infrarouges). C’est une prépa­ra­tion à la gymnastique.

Natu­rel­le­ment il existe une multi­tude de massages, n’en citer qu’un ne reflète pas l’éventail des tech­niques et leurs effets. Néan­moins ceux que j’ai décrits sont les plus rencon­trés. Certaines tech­niques comme les tech­niques myoten­sives (polak) ou micro­ki­né­sie présentent égale­ment un inté­rêt sachant qu’il ne s’agit que d’aide, la gymnas­tique ayant ma faveur. 

Nous allons donc voir ensemble les buts recher­chés et les moyens pour y arriver.

Mise en garde :
Avant de prati­quer ces exer­cices, chacun d’entre vous doit s’adresser à son méde­cin trai­tant ou à son neuro­logue (méde­cin réfé­rant) puis à son kiné­si­thé­ra­peute afin d’étudier le programme le plus appro­prié à votre état. Votre théra­peute vous guidera en vous montrant les exer­cices les plus appro­priés en tenant compte du moment (fatigue, cran­tage, tremblements…). 

Nous allons voir le type d’exercices en fonc­tion de l’objectif recher­ché tel que défini au préalable.

Les raideurs du rachis cervico dorso lombaire :
Elles sont présentes dès le début de la mala­die, mais l’âge et l’activité modé­rée rendent le diag­nos­tic Parkin­son diffi­cile car qui n’a pas de raideurs passé 55 ans et un travail pénible. Si les massages décon­trac­tu­rant sont inté­res­sants et même recom­man­dés, ils ne doivent pas être le seul trai­te­ment, mais être un moyen favo­ri­sant la cessa­tion de raideurs lors de phase off. 

Par contre, la gymnas­tique de place­ments et de recherche de mobi­lité doit être privi­lé­giée à la maison. Les nombreuses tech­niques (douces ex Pilates ou proprio­cep­tives) permettent une réelle amélio­ra­tion. Elles sont toutes réali­sées avec un travail respi­ra­toire diaphragmatique. 

Je vous propose donc pour débu­ter un travail de posi­tion­ne­ment :

  • le sujet est debout, regarde droit devant, les jambes droites mais pas tendues, les bras le long du corps, le ventre légè­re­ment rentré, les épaules rame­nées en arrière. Respi­ra­tion thora­cique en recher­chant l’écartement des côtes flot­tantes à l’inspiration : 15 fois
  • sujet debout même atti­tude dos collé au mur, recher­cher un étire­ment maxi­mum du rachis en insis­tant sur la respi­ra­tion et l’ampliation thora­cique, jambes tendues. Durée : 2 à 3 minutes. La respi­ra­tion en insis­tant sur l’expiration permet la détente musculaire. 
  • même posi­tion lever une jambe légè­re­ment fléchie 5cm en avant sans se déchar­ger sur la jambe d’appui. L’amplitude n’est pas impor­tant seul compte le placement. 

Etire­ments des muscles du rachis cervical :
Même posi­tion, main droite sur la tempe gauche, tirer avec la main, en souf­flant, la tête vers l’épaule droite. L’épaule gauche cherche à descendre comme si vous vouliez allon­ger le bras. Faire de même pour l’autre côté. 10 respirations.

Travail proprio­cep­tif :

  • les yeux : tout en marchant, prendre un point fixe laté­ral dans un couloir ou une grande pièce, marcher en regar­dant ce point tout en tour­nant juste la tête, pas le tronc. Faire 10 allers et retours.
  • même exer­cice mais marche sur le côté en regar­dant toujours un point au mur en tour­nant la tête. 5 allers et retours.
  • légè­re­ment penché en avant, regar­der en tour­nant la tête à droite et à gauche 10 fois de chaque côté.

Ces exer­cices contri­buent égale­ment à une mise en œuvre du système vesti­bu­laire respon­sable entre autre de l’équilibre.

Etire­ment du rachis dans son ensemble :

  • debout tout en souf­flant, mettre les mains derrière le haut de la nuque et descendre petit à petit en s’enroulant.
  • à quatre pattes passer en posi­tion de prière et en souf­flant s’étirer, les bras en avant. Prati­quer 20 fois.
  • mains sur une table, se recu­ler un peu de telle façon à ce que les jambes et le buste fassent un angle proche de 90°, souf­fler en essayant de descendre les vertèbres dorsales et rentrer le ventre. Vous senti­rez une tension dans les jambes et une brûlure au milieu des vertèbres dorsales. Atten­tion, il faut démar­rer ferme­ment mais ne pas provo­quer de douleurs intenses aux mollets et aux épaules.
  • toujours devant une table ou un mur, en appuis avec les mains, cher­cher à descendre en bloc, sans cambrer ni cour­ber le dos ni décol­ler les talons, le tout en souf­flant pendant la descente vers le mur.

Tous ces exer­cices doivent être exécu­tés lentement. 

Travail d’assouplissement des épaules et du thorax :

  • sur le dos, prendre un bâton des deux mains et lever le bâton derrière la tête si possible, lente­ment en souf­flant en montant et inspi­rant en descen­dant. Il ne faut pas provo­quer de douleurs aux épaules.
  • debout avec le bâton en avant cher­cher à exécu­ter des mouve­ments de pagayage pour provo­quer une coor­di­na­tion du geste et une détente scapulo-humérale.
  • debout ou assis, cher­cher à descendre les épaules et à emme­ner l’articulation scapulo-​humérale en arrière, les omoplates ont tendance à se rappro­cher sans se lever. Exer­cice diffi­cile néces­si­tant un travail devant une glace et la correc­tion d’une tierce personne.
  • travail avec un ballon de plage, bras en avant, debout, cher­cher à tour­ner en bloc tout le haut du buste sans rota­tion de la tête ni du bassin. Cela améliore les fixa­teurs des omoplates et contri­bue à l’assouplissement du rachis dorsolombaire.
  • debout, avec un ballon, passer ce dernier autour de votre corps et dans les deux sens.

Tous ces exer­cices tendent à lutter contre tous les types d’enraidissements ou de dévia­tions, pas seule­ment dus à la mala­die de Parkin­son, mais à l’âge égale­ment. Vous remar­que­rez le rôle impor­tant que nous attri­buons à la respiration.

Respi­ra­tion : pour­quoi insis­ter sur la respiration ?
Comme vous le savez, la respi­ra­tion permet les échanges gazeux entre le poumon et le cœur en appor­tant, notam­ment de l’O2 néces­saire aux fonc­tions vitales et permet­tant une meilleure fonc­tion muscu­laire, parti­cu­liè­re­ment une détente, ce qui est prépon­dé­rant chez le parkin­so­nien, une amélio­ra­tion des fonc­tions céré­brales et elle évite l’acide lactique, fréquente dans les muscles spas­més, cause de manque d’élasticité musculaire. 

Mais l’effet piston du diaphragme qui monte et descend alter­na­ti­ve­ment provoque un phéno­mène de chasse au niveau de l’intestin et de ce fait parti­cipe à l’amélioration du tran­sit. C’est égale­ment un facteur dyna­mique pour la circu­la­tion au niveau du petit bassin et, de ce fait, améliore la circu­la­tion au niveau des membres infé­rieurs et même au niveau du thorax lors du retour diaphragmatique.

Ne pas effec­tuer quoti­dien­ne­ment ces exer­cices respi­ra­toires, c’est dimi­nuer l’action de la gymnas­tique de plus de 50%. Ces exer­cices peuvent être effec­tués au lit !

Respi­ra­tion abdo­mi­nale en gonflant le ventre sans compen­sa­tion du dos.
Respi­ra­tion thora­cique en cher­chant à faire rentrer l’air et en ouvrant le thorax, sans compen­sa­tion de la colonne verté­brale, soit dos au sol.

Pertes de mobilité :
Il faut aussi parler du problème de la perte de mobi­lité, pas forcé­ment l’apanage du parkin­so­nien, mais fréquem­ment rencon­trée. C’est une réalité vécue par les aidants.

  1. 1‑La marche : elle doit être recher­chée et aidée par diffé­rentes faci­li­ta­tions : aide audi­tive (métro­nome ou claque­ment des mains), aide tech­nique en deman­dant au patient de lever les jambes de façon exagé­rée, aide de lignes sur la chaus­sée ou obstacle, balan­ce­ment des bras comme un mili­taire lors d’un défilé. Ne pas hési­ter de marcher en sous-​bois ou dans les esca­liers sachant qu’ils sont un élément facilitateur.
  2. 1‑Se lever d’un fauteuil : c’est le problème majeur pour tous les parkin­so­niens et personnes âgées en géné­rale. Il ne faut surtout pas tirer sur les bras, vous géné­re­rez des douleurs au parkin­so­nien mais vous allez surtout vous en provo­quer au niveau de la région lombaire. La raison est simple le remède égale­ment. Le fait de se lever est un déséqui­libre en avant. Pour se faire il faut passer les épaules en avant de l’axe des genoux et provo­quer un mouve­ment vers le haut et en avant. L’aide d’un dossier de chaise ou un déam­bu­la­teur est suffi­sante. Parfois on peut aider le patient en appuyant légè­re­ment vers le haut au niveau de la 1ère vertèbre dorsale. 
  3. 1‑La marche aidée : comme pour le lever, point n’est besoin d’effort impor­tant, il suffit de se posi­tion­ner côté droit ou gauche du patient et de lui deman­der d’appuyer légè­re­ment sur vos doigts, cela suffit pour obte­nir une réac­tion entraî­nant la marche. 

Conclu­sions :
Pitié pour les Parkin­so­niens, cela ne sert à rien de la traî­ner, vous risquez un lumbago ou une douleur des rota­teurs de l’épaule avec un conflit acro­mio humérale. 

Ne cher­chez pas à vouloir vous acti­ver en période « off ».

N’en faites pas trop lorsque vous êtes en période « on ».

Si vous arri­vez chez le kiné en période «  off  », profi­tez des massages ; il faut s’adapter à son état.

Faites la séance de kiné en période «  on  » : pour cela réali­sez sur un semai­nier un relevé en marquant les diffé­rentes périodes et les prises de médicaments. 

Texte de la confé­rence de Alain BOYER
Trans­mis par Raoul GRIFFAULT de l’APDS
Repris par Jean GRAVELEAU

1 Commentaire Cliquer ici pour laisser un commentaire

  1. j’ai 40 ans est on m’a diag­nos­ti­qué le Parkin­son un peut tard, je traîne ma jambe gauche et ma main gauche est rigide ‚est ce que le trai­te­ment peut déblo­quer mon pied et ma main .

    Commentaire by mariana — 15 mars 2015 #

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