Ne pas être qu'un "patient" ...

La caféine nuit au développement du cerveau des souris

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°56

Une étude menée sur des souris indique que la prise de caféine pendant la gesta­tion peut nuire au déve­lop­pe­ment céré­bral du fœtus. Or, s’il ne fait plus aucun doute que l’ab­sorp­tion – même mineure – d’al­cool ou de tabac par la mère durant la gros­sesse ne va pas sans dégâts, la ques­tion reste en débat en ce qui concerne la caféine. Elle vaut autant pour le petit noir et le grand crème que pour tout produit conte­nant cette substance : thé, choco­lat, bois­sons éner­gi­santes et certains sodas. 

Jusqu’ici, « la plupart des études sur le sujet ont été peu concluantes », déplore Pierre Gres­sens, cher­cheur de l’Ins­ti­tut natio­nal de la santé et de la recherche médi­cale (Inserm) à l’hô­pi­tal Robert-​Debré de Paris et profes­seur de néona­ta­lo­gie et de neuro­lo­gie fœtale au King’s College de Londres. Pour­tant, la caféine est une des substances « psychoac­tives » (c’est-​à-​dire capables de modi­fier l’ac­ti­vité des neurones, ces cellules exci­tables du cerveau) les plus consom­mées au monde, y compris chez la femme enceinte.

Mais une étude publiée le 7 août dans la revue Science Trans­la­tio­nal Medi­cine livre des résul­tats sans appel : la prise régu­lière de caféine par des souris gestantes (l’équi­valent de deux à trois tasses de café par jour chez l’homme) affecte nota­ble­ment le déve­lop­pe­ment du cerveau de leur progéniture.

Deux effets délétères : 
« Au cours du déve­lop­pe­ment normal, les neurones naissent dans des régions céré­brales parti­cu­lières, puis migrent vers les zones céré­brales où ces cellules sont desti­nées à fonc­tion­ner », explique Chris­tophe Bernard, prin­ci­pal auteur de cette étude menée par l’In­serm à l’uni­ver­sité d’Aix-​Marseille. « Mais lorsque nous ajou­tons de la caféine dans l’eau de bois­son des souris femelles, tout au long de la gesta­tion, cela retarde la migra­tion d’une sous-​population de neurones dans le cerveau des souri­ceaux. » La caféine ralen­tit de moitié la vitesse de migra­tion de ces neurones.

Ce blocage a deux effets délé­tères, l’un à court terme et l’autre à long terme. Les souri­ceaux de moins d’une semaine sont plus sensibles aux crises d’épi­lep­sie. Et une fois adultes, ces animaux présentent des troubles de la mémoire spatiale. 

« C’est la première étude à démon­trer les effets néfastes de la caféine durant la gesta­tion sur le cerveau en déve­lop­pe­ment, souligne M. Bernard. Cela justi­fie de futures études chez la femme enceinte. » Celles-​ci seront déli­cates à conduire, car de nombreux biais peuvent faus­ser les résul­tats. D’au­tant qu’en février dernier, une étude scan­di­nave menée chez près de 60 000 femmes enceintes montrait qu’une consom­ma­tion de 125 mg de caféine par jour indui­sait un poids de nais­sance plus faible, cette réduc­tion restant au demeu­rant plutôt faible.

Selon Chris­tophe Bernard, on pour­rait néan­moins progres­ser en inter­ro­geant les familles, lors­qu’un enfant a fait une crise d’épi­lep­sie, sur la consom­ma­tion de caféine de sa mère durant la gros­sesse. Autre diffi­culté : « une même substance psychoac­tive peut avoir des effets oppo­sés selon le stade du déve­lop­pe­ment céré­bral », souligne Pierre Gres­sens. En témoigne le fait que des déri­vés de la caféine sont utili­sés comme médi­ca­ments chez des nouveau-​nés préma­tu­rés souf­frant d’in­suf­fi­sance respi­ra­toire. Or ces produits semblent amélio­rer les troubles cogni­tifs de ces nourrissons.

Recom­man­da­tions floues : 
Les recom­man­da­tions actuelles en la matière restent floues et variables selon les pays. En France, l’Ins­ti­tut natio­nal de préven­tion et d’édu­ca­tion pour la santé préco­nise d’ « éviter de consom­mer trop de bois­sons conte­nant de la caféine (pas plus de trois tasses de café par jour) pendant la gros­sesse et la période d’al­lai­te­ment ».

Faudra-​t-​il revoir ces recom­man­da­tions ? Et peut-​on tout inter­dire à la femme enceinte ? « Si les dangers de l’al­cool durant la gros­sesse sont géné­ra­le­ment bien compris, les fumeuses ont du mal à suivre les recom­man­da­tions d’abs­ten­tion totale vis-​à-​vis du tabac », note Marc Gamerre, chef du service de gynécologie-​obstétrique à l’hô­pi­tal de la Concep­tion à Marseille. Mais, pour Pierre Gres­sens, « cette étude vient étayer d’autres données qui poussent à limi­ter autant que possible la consom­ma­tion de caféine lors d’une gros­sesse. Des consom­ma­tions supé­rieures ou égales à 8 tasses par jour sont à décon­seiller forte­ment aux femmes enceintes ».

Chez la souris, la caféine consom­mée par la femelle gestante retarde la migra­tion de certains neurones dans le cerveau en construc­tion du souri­ceau. Ces vidéos comparent, sur des cellules en culture, la migra­tion de neurones en l’ab­sence ou en présence de caféine. Chris­tine Métin et Chris­tophe Bernard, Inserm-​Université Aix-Marseille.

Le Monde le 09.08.2013 à 11h56 Par Florence Rosier
Lu par Soizic Vignon

A souli­gner que, dans le numéro précé­dent de notre jour­nal, nous indi­quions les béné­fices de la caféine contre la mala­die de Parkin­son décou­verts par des neuro­logues canadiens… !
Jean Grave­leau

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