Ne pas être qu'un "patient" ...

Les mouvements anormaux

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT N°37 – juin 2009

  1. Intro­duc­tion
    Les mouve­ments anor­maux sont dus à un trouble de la program­ma­tion ou de l’exécution du mouve­ment. Très souvent, ils sont la consé­quence d’un dysfonc­tion­ne­ment, d’une lésion ou d’une mala­die dégé­né­ra­tive dans le système des noyaux gris centraux appelé « système extra­py­ra­mi­dal ». Rappe­lons que ce système extra­py­ra­mi­dal est respon­sable aussi des mouve­ments auto­ma­tiques, le système pyra­mi­dal étant lui respon­sable de l’exécution volon­taire du mouvement.

    Il en résulte que les mouve­ments anor­maux sont peu ou pas contrô­lés par la volonté (pour cette raison, ils sont aussi appe­lés mouve­ments invo­lon­taires) et ils surviennent en l’absence de paralysie.
    Souvent atteints de trem­ble­ments et parfois de dyski­né­sies, les Parkin­so­niens font partie de la caté­go­rie de patients atteints de mouve­ments anormaux.

    Il existe de nombreux types de mouve­ments anor­maux. Dans le texte qui suit, on se propose de décrire successivement :

    • les diffé­rents types de mouve­ments anor­maux, et les critères qui permettent au neuro­logue de les diagnostiquer,
    • les prin­ci­paux types de trem­ble­ment et leurs caractéristiques,
    • plus en détail le trem­ble­ment parkinsonien,
    • enfin les dysto­nies et dyski­né­sies parkinsoniennes.
  2. Les diffé­rents types de mouve­ments anormaux
    La recon­nais­sance des diffé­rents types de mouve­ments anor­maux est faite par le neuro­logue à partir d’un examen clinique et la prise en compte de diffé­rents critères :
    • leurs circons­tances de surve­nue : brutale, progressive,
    • leurs carac­tères : brefs ou prolon­gés, ryth­miques ou irré­gu­liers, chao­tiques ou stéréotypés,
    • leur siège : proxi­mal ou distal
    • leur ampli­tude maxi­male : au repos, au main­tien d’une posture ou lors d’un mouvement.

    Certains mouve­ments anor­maux ne concernent pas le Parkin­so­nien. Nous les cite­rons pour mémoire. Il s’agit :

    • des chorées, mouve­ments aryth­miques, brusques, impré­vi­sibles et chao­tiques, souvent de rota­tion (du grec khoreia = danse).
    • des myoclo­nies, secousses muscu­laires brusques et brèves,
    • des tics, mouve­ments habi­tuel­le­ment brefs et soudains, ayant une cari­ca­ture de geste naturel.

    Le Parkin­so­nien, par contre, pourra être sujet :

    • aux trem­ble­ments : Les trem­ble­ments provoquent des oscil­la­tions ryth­miques invo­lon­taires de tout ou partie du corps autour de sa posi­tion d’équilibre.
    • aux dysto­nies : Les dysto­nies provoquent des contrac­tions muscu­laires soute­nues, fixant un membre ou un segment de membre dans une posi­tion extrême.
    • aux dyski­né­sies : Le terme de dyski­né­sie recouvre des mouve­ments anor­maux complexes et anar­chiques, mêlant diffé­rentes carac­té­ris­tiques déjà citées, comme l’aspect choréique.
  3. Les trem­ble­ments
    Le trem­ble­ment est le mouve­ment invo­lon­taire le plus fréquent. Il résulte de mouve­ments oscil­la­toires ryth­miques au niveau d’une articulation.
    On distingue plusieurs types de trem­ble­ments qui ne doivent pas être confon­dus, car ils résultent de patho­lo­gies diffé­rentes et se traitent différemment.
    • Le trem­ble­ment de repos : le trem­ble­ment Parkin­so­nien que nous le détaille­rons après
    • Le trem­ble­ment postu­ral et d’action : La cause la plus fréquente en est le trem­ble­ment essen­tiel, assez fréquent (il touche en France envi­ron 200.000 personnes). Il est présent dans la posture, mais aussi dans l’action (écri­ture, mani­pu­la­tion d’un verre). Sa fréquence est de 6 à 12 Hz. Il est souvent héré­di­taire et commence plutôt aux extrêmes de la vie (sujet jeune ou âgé). Son trai­te­ment utilise des béta­blo­quants comme le Propa­no­lo­lol ou des barbi­tu­riques comme la Mysoline.
    • Le trem­ble­ment d’action ou d’intention : Appelé aussi souvent céré­bel­leux, lorsqu’il résulte d’une atteinte du cerve­let, il s’accentue avec la vitesse du mouve­ment et à l’approche de la cible (inten­tion) .Le mouve­ment est géné­ra­le­ment ample. Son trai­te­ment est diffi­cile, car il répond peu aux médicaments.
  4. Le trem­ble­ment de repos
    Il s’agit du trem­ble­ment parkin­so­nien. Il a les carac­té­ris­tiques suivantes :
    • Présent au repos et dispa­rais­sant au mouvement,
    • fréquence de 4 à 6 Hz,
    • touchant les membres, éven­tuel­le­ment la mâchoire,
    • unila­té­ral ou très asymétrique
    • aggravé par le stress.

    Pour le grand public, le trem­ble­ment carac­té­rise la mala­die de Parkin­son. C’est ainsi que James Parkin­son la dénom­mait : « shaking palsy » ou para­ly­sie agitante. Nous avons vu que tous les trem­ble­ments ne sont pas Parkin­so­niens, et par ailleurs, tous les Parkin­so­niens ne tremblent pas. Cepen­dant, plus de la moitié des mala­dies de Parkin­son commencent par un trem­ble­ment et la majo­rité des malades tremblent après quelques années de maladie.
    Au début de la mala­die, le trem­ble­ment reste discret et doit parfois pour appa­raître, être provo­qué (le patient écrit un texte ou fait un calcul mental). Le patient dont la main tremble effec­tue alors des mouve­ments de la main et du poignet, comme s’il émiet­tait du pain.

    Rela­ti­ve­ment lent par rapport aux autres types de trem­ble­ments, le trem­ble­ment de repos touche au début de la mala­die, le membre supé­rieur du côté où la mala­die a commencé, puis va s’étendre au membre infé­rieur du même côté, puis aux autres membres. Il reste très souvent asymé­trique. Il peut atteindre la mâchoire, la langue, les lèvres, mais jamais la tête.

    Le trem­ble­ment n’est pas actif en perma­nence pendant la jour­née et dispa­rait pendant le sommeil. Il se réac­tive et s’aggrave en cas de stress.

    Le trem­ble­ment de repos n’est pas très handi­ca­pant pour le patient sur le plan moteur. Par contre, il est très déva­lo­ri­sant sur le plan social, car il suggère à l’entourage l’existence de la mala­die de Parkinson.

    Le diag­nos­tic du trem­ble­ment de repos est rela­ti­ve­ment aisé, le neuro­logue obser­vant par exemple le patient assis, les avant bras repo­sant sur une table ou sur des accou­doirs. Les carac­té­ris­tiques du trem­ble­ment Parkin­so­nien de repos (fréquence, héré­dité, asymé­trie, organes touchés etc..), sont très diffé­rentes des trem­ble­ments préci­tés et permettent un diag­nos­tic sûr. Toute­fois, le neuro­logue peut être confronté à la présence chez le même patient de deux trem­ble­ments diffé­rents (de repos et postu­ral par exemple), ainsi qu’à des trem­ble­ments dus à l’usage de médi­ca­ments, comme les neuroleptiques.

    Le trem­ble­ment de repos peut consti­tuer le symp­tôme prédo­mi­nant chez le patient ; on parle alors de forme trem­blante de la mala­die. Dans ce cas, le trai­te­ment peut être spéci­fique et fait appel :

    • aux anti­cho­li­ner­giques (Artane, Parki­nane, Lepticur)
    • aux agonistes dopa­mi­ner­giques (en parti­cu­lier le Trivastal),
    • ensuite à la Lévodopa,
    • enfin aux béta­blo­quants ou à la Mysoline
  5. Dyski­né­sie et dystonies :
    Les dyski­né­sies sont souvent iatro­gènes (dues à l’usage de médi­ca­ments comme les neuro­lep­tiques), mais sont appa­rues aussi comme une consé­quence de l’introduction de la Levo­dopa (L‑Dopa), dans les trai­te­ments parkin­so­niens, depuis 1967.
    On ne dispose pas de chiffre précis sur la fréquence de surve­nue de dyski­né­sie, mais on estime qu’un tiers des patients souffre de dyski­né­sies après 3 ans de trai­te­ment par Levodopa.

    Comment se présentent les diffé­rentes dyski­né­sies liées à la Levo­dopa ? Si on prend comme modèle la courbe donnant en fonc­tion du temps, le taux de Levo­dopa dans le sang, à partir d’une prise unique, le matin à jeun, on peut distin­guer trois caté­go­ries de mouve­ments anor­maux involontaires :

    • les dysto­nies de « off » appe­lées aussi dysto­nies du petit matin, elles appa­raissent avant toute prise de médi­ca­ments, mais peuvent réci­di­ver dans la jour­née, lors de la surve­nue d’une période « off ». Elles se mani­festent par une posture dysto­nique, pouvant être doulou­reuse, et attei­gnant géné­ra­le­ment le pied le plus atteint sous la forme d’une exten­sion du gros orteil ou d’un varus équin ou le « pied en griffe ».
    • les dyski­né­sies bipha­siques de début et de fin de dose. Elles appa­raissent 20 à 30 minutes après la prise du médi­ca­ment et réap­pa­raissent en fin de dose. Elles affectent de préfé­rence le membre infé­rieur le plus atteint et sont douloureuses.
    • les dyski­né­sies de milieu ou de pic de dose. Ce sont les plus fréquentes. Elles surviennent, alors que le patient béné­fi­cie d’un déblo­cage maxi­mal. Elles sont de type choréique essen­tiel­le­ment et affectent les membres supé­rieurs, le visage et le cou. Para­doxa­le­ment, elles sont mieux suppor­tées par le patient (qui redoute davan­tage les blocages), que par son entourage.

    Les facteurs de risques de surve­nue de dyski­né­sies liées à la Levo­dopa sont :

    • un âge de début précoce de la mala­die (entre 20 et 40 ans), augmen­te­rait le risque de surve­nue de dyski­né­sies, qui serait moindre au delà de 56 ans.
    • une déner­va­tion dopa­mi­ner­gique impor­tante : une dégra­da­tion impor­tante des neurones du locus Niger semble être une condi­tion néces­saire à la surve­nue de dyskinésie.
    • la durée, la dose et le mode de prise de la Levo­dopa. Un trai­te­ment par agoniste dopa­mi­ner­gique en mono­thé­ra­pie réduit les risques de surve­nue de dyski­né­sie. Réduire la dose de Levo­dopa, lors d’une bithé­ra­pie (agoniste + Levo­dopa) réduit le risque de surve­nue, par rapport à une mono­thé­ra­pie à Levodopa.

      La fréquence des dyski­né­sies augmente avec la durée du trai­te­ment par Levo­dopa. Plus simple­ment, le risque augmente avec les années et la quan­tité de Levo­dopa absor­bée. D’où la stra­té­gie de retar­der si possible son utili­sa­tion dans la phase initiale de la mala­die, et ensuite d’en limi­ter les doses. 

Pour dimi­nuer les risques de dyski­né­sies et en retar­der le début, il serait souhai­table d’appliquer les recom­man­da­tions conte­nues dans la Confé­rence de Consensus.
Le lecteur Parkin­so­nien tirera profit de ces recom­man­da­tions pour comprendre, la stra­té­gie théra­peu­tique que lui propose le neuro­logue, afin de retar­der le début des dyskinésies.

Biblio­gra­phie
La mala­die de Parkin­son de Fabien Zagnoli et Fran­çois Rouhart
Orien­ta­tion diag­nos­tique devant des mouve­ments anor­maux (322)
Dyski­né­sies liées à la Lévo­dopa de Valé­rie Fraix

Par Jean Pierre LAGADEC 

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