Ne pas être qu'un "patient" ...

Les thérapies alternatives ou MAC

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°53
Par Jean Pierre Lagadec

En Janvier 2013, parais­saient dans le numéro 282 de Valeurs Mutua­listes, jour­nal de la MGEN, sous la signa­ture de Claire Rouillon, deux articles très inté­res­sants sur les théra­pies alter­na­tives, appe­lées aussi non conventionnelles.

Dans les pays déve­lop­pés comme la France, les patients se tournent géné­ra­le­ment vers des méde­cines dites conven­tion­nelles. Ces méde­cines sont basées sur la preuve : les méde­cins et les person­nels de santé doivent possé­der des diplômes recon­nus par les pouvoirs publics. Les théra­pies et les médi­ca­ments font l’objet d’essais cliniques, avant d’être pres­crits aux patients. 

A côté de ces méde­cines, on trouve des méde­cines non conven­tion­nelles. Qu’appelle-t-on méde­cines non conven­tion­nelles ? Selon l’OMS : « ces méde­cines regroupent des approches, des pratiques, des produits de santé, qui ne sont pas habi­tuel­le­ment consi­dé­rés comme faisant partie de la méde­cine conventionnelle. 

Le terme « méde­cines non conven­tion­nelles » est donc l’expression rete­nue par plusieurs insti­tu­tions, dont le Parle­ment euro­péen, pour dési­gner les idées et pratiques visant à réta­blir ou préser­ver la santé qui ne sont pas celles du système domi­nant à une époque et dans une aire géogra­phique données. Ainsi, sont-​elles souvent défi­nies par oppo­si­tion à la méde­cine allo­pa­thique. On parle aussi de « méde­cines tradi­tion­nelles » à l’OMS, de « méde­cines complé­men­taires ou alter­na­tives » dans les pays anglo-​saxons, de « méde­cines douces », « natu­relles », « paral­lèles » ou « holis­tiques » en France. On trouve aussi la termi­no­lo­gie « Méde­cines Alter­na­tives et Complé­men­taires », en abrégé les MAC.

Une multi­tude de MAC : 
Elles sont très nombreuses (certains citent le chiffre de 300 !) et il n’en existe pas de liste exhaustive.

En France, la plus fréquente est de loin l’homéopathie : les Fran­çais en sont les premiers consom­ma­teurs au monde. Citons égale­ment la phyto­thé­ra­pie, l’ostéopathie, l’acupuncture, la natu­ro­pa­thie (prisée en Alle­magne et au Portu­gal), la réflexo­lo­gie (surtout au Dane­mark) et le yoga (très répandu en Espagne).

Le NCCAM (Natio­nal center for comple­men­tary and alter­na­tive medi­cine), centre gouver­ne­men­tal améri­cain, les classe en trois familles : les méde­cines fondées sur des produits natu­rels (plantes, miné­raux, etc), les théra­pies du corps et de l’esprit (médi­ta­tion, yoga, hypno­thé­ra­pie, etc) et celles fondées sur la mani­pu­la­tion (ostéo­pa­thie, chiro­praxie, shiatsu, réflexo­lo­gie plan­taire, etc). Dans cet ensemble, il distingue les systèmes médi­caux complets repo­sant sur un corpus théo­rique et pratique global (homéo­pa­thie, méde­cine chinoise, méde­cine ayur­vé­dique, etc).

En réalité, il arrive assez souvent que la fron­tière ne soit pas nette­ment marquée. Certaines tech­niques sont ensei­gnées en faculté de méde­cine, dispen­sées par des profes­sion­nels de santé recon­nus et rembour­sés, comme l’homéopathie en France. 

L’essor des MAC : 
Les MAC séduisent de plus en plus les Fran­çais. On se fait hypno­ti­ser pour arrê­ter de fumer ; on court chez l’os­téo­pathe – 15 millions de consul­ta­tions par an – pour chas­ser le mal de dos ; on avale des granules homéo­pa­thiques contre le rhume ; on pratique le tai-​chi pour garder la forme. En 2007, 39% des Fran­çais ont déclaré avoir eu recours aux méde­cines natu­relles au moins une fois dans l’an­née. Les femmes davan­tage que les hommes : 47 % contre 31 %. 

Citons encore quelques chiffres four­nis par le CAS (Centre d’analyse stratégique) :

  • 75% des Fran­çais admettent avoir eu recours au moins une fois aux méde­cines non conven­tion­nelles ou complémentaires.
  • dans les pays déve­lop­pés, 25% des patients se tournent vers ces pratiques chaque année.
  • le taux de recours aux méde­cines non conven­tion­nelles dépend des patho­lo­gies. Il atteint 80% chez les personnes atteintes de cancer.

Pour accom­pa­gner cet engoue­ment, les théra­peutes en méde­cines non conven­tion­nelles pullulent et nombre de méde­cins clas­siques s’y sont conver­tis. Le Conseil natio­nal de l’ordre des méde­cins recon­naît et auto­rise quatre MAC : l’acu­punc­ture, l’ho­méo­pa­thie, la méso­thé­ra­pie et l’os­téo­pa­thie, qui seraient prati­quées par près de 24 000 méde­cins, soit un sur quatre. 

Pour­quoi un tel engouement ? 
Confron­tés aux effets secon­daires des trai­te­ments, au manque de temps des soignants ou à l’absence de remèdes effi­caces aux maux du quoti­dien, les usagers des systèmes de santé des pays déve­lop­pés se tournent de façon crois­sante vers les méde­cines non conventionnelles.

L’une des prin­ci­pales raisons du succès des MAC, c’est la déshu­ma­ni­sa­tion de la méde­cine moderne. Le malade est souvent perçu comme un assem­blage d’or­ganes, de viscères et de fluides à trai­ter sépa­ré­ment, sans s’adres­ser à la tête. À l’hô­pi­tal, le malade n’iden­ti­fie même plus le méde­cin, qui s’ef­face derrière des machines intru­sives qui ponc­tionnent, mesurent… En ville, le méde­cin de famille est une espèce en voie d’ex­tinc­tion. En moyenne, un méde­cin consacre aujourd’­hui seize minutes à son patient. La méde­cine « scien­ti­fique » n’a pas perdu son effi­ca­cité, mais son humanité.

C’est donc celle-​ci que beau­coup de patients recherchent dans les méde­cines douces qui se disent holis­tiques — globales — et s’adressent tant au corps qu’à l’es­prit. Les nouveaux outils d’ex­plo­ra­tion du corps comme l’ima­ge­rie médi­cale et les progrès en biolo­gie ont permis de chan­ger d’échelle, de consta­ter que tout se joue au-​delà de l’or­gane malade. « Tout est lié, le corps, l’es­prit, l’en­vi­ron­ne­ment. On ne peut plus conti­nuer à disso­cier ces éléments si on veut soigner nos patients ».

Les MAC béné­fi­cient égale­ment de la suspi­cion gran­dis­sante envers les médi­ca­ments et leurs effets secon­daires. Selon le dernier sondage IFOP, dimi­nuer la consom­ma­tion de médi­ca­ments est la première moti­va­tion des adeptes des méde­cines natu­relles (39%), devant l’ef­fi­ca­cité suppo­sée (28%).
Certes, les MAC n’ont pas réponse à tous les maux. Peu d’études cliniques confirment leur effi­cience, beau­coup ne leur trouvent qu’un effet placebo. La méde­cine scien­ti­fique reste de loin la plus effi­cace. Comme leur nom l’in­dique, la plupart des méde­cines « complé­men­taires » jouent surtout un rôle d’ac­com­pa­gne­ment. Beau­coup des MAC ne prétendent d’ailleurs pas guérir mais préve­nir les mala­dies en aidant le corps à conser­ver et à conso­li­der sa résis­tance naturelle. 

Quelle réponse des pouvoirs publics à cet engouement ?
La réponse à cette ques­tion est donnée ci-​après dans une note du Centre d’Analyse Stra­té­gique, rédi­gée par Mathilde Reynaudi :
« L’étanchéité entre soins conven­tion­nels et non conven­tion­nels n’est d’ailleurs pas totale. Ces derniers sont de plus en plus inclus dans les pratiques des profes­sion­nels de santé, voire rembour­sés. Paral­lè­le­ment, les usagers ont parfois recours à des théra­peutes, ni méde­cins ni profes­sion­nels para­mé­di­caux, exer­çant à la limite du soin et du bien-être.

Cet engoue­ment est mal connu en France, bien que l’essor du marché des plantes médi­ci­nales et la demande – davan­tage rensei­gnée – de soins non conven­tion­nels dans les pays voisins laissent à penser que le nombre de Fran­çais ayant recours à ces pratiques est consi­dé­rable. Certains s’en inquiètent, esti­mant les méthodes non conven­tion­nelles inef­fi­caces ou même dange­reuses. D’autres soutiennent au contraire que ces méde­cines pour­raient être utiles dans le champ de la préven­tion, des mala­dies chro­niques et de la douleur, voire en cas d’échec de la méde­cine conven­tion­nelle. Ces théra­pies pour­raient aussi contri­buer à une baisse de la consom­ma­tion médi­ca­men­teuse et à une approche plus globale de la santé et du parcours de vie.

Face aux risques et aux poten­tiels asso­ciés à l’augmentation conjointe de l’offre et de la demande en méde­cines non conven­tion­nelles, une action des pouvoirs publics semble néces­saire. D’une part, il convien­drait de s’assurer de l’innocuité de ces tech­niques et d’encadrer la pratique et la forma­tion des théra­peutes. D’autre part, il s’agirait d’organiser l’intégration de ces méde­cines au système de santé, lorsqu’elles peuvent contri­buer, en complé­ment des soins conven­tion­nels, à une prise en charge des patients plus complète. »

Les Char­la­tans
La prudence s’im­pose encore, car la plupart de ces théra­pies ne sont pas régle­men­tées et la forma­tion des théra­peutes reste rudi­men­taire. Ce qui laisse la voie libre aux incom­pé­tents et aux char­la­tans. A l’ins­tar de la « méde­cine nouvelle germa­nique » du guéris­seur alle­mand Ryke Hamer, qui prétend soigner 92% des cancers en détec­tant le choc émotion­nel à l’ori­gine du mal… Bien qu’il ait été condamné et incar­céré à la suite de plusieurs décès de malades, sa méthode conti­nue à faire des adeptes. 

Georges Fenech, président de la Mission inter­mi­nis­té­rielle de vigi­lance et de lutte contre les dérives sectaires (Mivi­ludes), prévient : « Autour des grands mouve­ments sectaires gravitent de petites struc­tures qui proposent à la carte toutes sortes de théra­pies alter­na­tives comme la kiné­sio­lo­gie, le reiki ou le déco­dage biolo­gique ». Si un théra­peute vous demande d’ar­rê­ter votre trai­te­ment, vous promet un miracle ou augmente sans cesse ses exigences finan­cières, fuyez !

En 2009, le minis­tère de la Santé et la Mivi­ludes ont créé un groupe d’ap­pui tech­nique chargé de recen­ser et d’éva­luer les « pratiques non conven­tion­nelles à visée théra­peu­tique ». Mais la tâche est immense. Comment se recon­naître en effet dans le maquis des MAC ? 

Parkin­son et méde­cines alternatives 
Quel est donc l’intérêt des méde­cines alter­na­tives pour le trai­te­ment de la mala­die de Parkin­son ? Tout d’abord, il faut bien insis­ter sur le fait que la MP béné­fi­cie de trai­te­ments tout à fait conven­tion­nels et cela dans tous les pays développés.

Les profes­sion­nels de santé trai­tants (neuro­logues, méde­cins géné­ra­listes, etc…), n’exercent qu’après avoir reçu une forma­tion profes­sion­nelle certi­fiée par l’état. Les stra­té­gies et les trai­te­ments (médi­ca­men­teux, chirur­gi­caux, etc…) ont fait l’objet d’essais cliniques avant leur prescriptions.

Les méde­cines alter­na­tives, même recon­nues par le corps médi­cal (homéo­pa­thie, acupunc­ture, …), ne peuvent se substi­tuer aux trai­te­ments anti­par­kin­so­niens conven­tion­nels. Par contre, elles peuvent être utiles au titre de théra­pies complé­men­taires, pour trai­ter des troubles qui accom­pagnent les patients, par exemple les troubles cutanés.
Enfin, pour la grande majo­rité des 300 MAC, il parait urgent d’attendre des avis auto­ri­sés des auto­ri­tés de santé. 

Rédigé par Jean Pierre Lagadec
Bibliographie
Claire Rouillon : Les théra­pies alter­na­tives Revue de la MGEN de janvier 2013
Mathilde Reynaudi : Centre d’Analyse Stratégique
Gwen­do­line Dos Santos : Articles du jour­nal Le Point

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