A propos de la Recherche, les 13 mars et 26 avril 2014 à Nantes
Publié le 15 décembre 2014 à 10:50Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°59
Le 13 mars 2014 « Le ventre, notre deuxième cerveau »
C’est sous ce titre qu’un documentaire de Cécile Denjean était diffusé en janvier dernier sur ARTE. Le 13 mars, il était projeté sur grand écran au Katorza en présence du Docteur Michel Neunlist. Chercheur à l’unité de neurogastroentérologie (INSERM U913) et directeur de l’IMAD (Institut des Maladies de l’Appareil Digestif) du CHU de Nantes, il était conseiller scientifique pour ce reportage
Dans ce film on y apprend que le système nerveux entérique est constitué d’environ 200 millions de neurones avec une structure très proche de notre cerveau. On l’appelle le 2ème cerveau alors que dans le processus de l’évolution des espèces il soit bien antérieur à notre système nerveux central. Il se répartit tout au long de notre tube digestif et son rôle est de gérer la digestion et l’absorption des aliments tout en protégeant l’organisme des agressions de l’environnement (bactéries, virus, toxiques). En relation étroite avec notre cerveau, il dialogue et interagit avec lui pour modifier nos comportements et nos émotions. Pour la petite histoire, il est démontré que la domestication du feu à jouer un rôle essentiel dans le développement du système du système nerveux central car elle a permis une plus grande consommation et une meilleure absorption des protéines, libérant ainsi de l’énergie qui était jusque-là consacrée à la digestion.
Certaines maladies du cerveau, comme la maladie de Parkinson, pourraient trouver leur origine dans le ventre et commencer à attaquer les neurones de l’intestin. Depuis plusieurs années, il a été démontré que les neurones du système entérique des sujets touchés par la maladie de Parkinson présentaient les mêmes atteintes que les neurones du cerveau, à savoir la présence anormale d’une protéine, l’alphasynucléine, sous forme d’agglomérats qu’on appelle les corps de Loewy. La saturation de la cellule par cette protéine entraînant la mort neuronale. Dans l’état actuel des connaissances, on ne sait pas ce qui déclenche ce dérèglement, ni comment il se propage. On suppose que c’est un processus très lent qui s’étend sur plusieurs années avant d’atteindre le système nerveux central, via le nerf vague, avec le rôle important d’un neurotransmetteur, la sérotonine. Les problèmes de constipation, très fréquents chez les parkinsoniens, pourraient s’expliquer par cette déficience des neurones du système entérique. Dans un avenir proche, on peut très bien imaginer un diagnostic précoce à l’aide d’une simple biopsie lors d’une coloscopie. Cet acte permettrait de prélever quelques neurones et de vérifier s’ils ne sont pas porteurs du marqueur de la maladie, à savoir les fameux agrégats d’a‑synucléine. Ainsi l’expression le ventre une fenêtre ouverte sur le cerveau prendrait tout son sens.
Dans ce reportage, on découvre également que notre ventre abrite une colonie spectaculaire de cent mille milliards de bactéries. Celles-ci agiraient « à l’insu de notre plein gré » au point d’intervenir sur nos humeurs et notre comportement. Ce qu’on appelle le microbiote intestinal, cet « organe » constitué de 10 fois plus de cellules que celles formant l’ensemble de notre organisme, hébergé dans notre tube digestif, joue un rôle décisif sur la santé et les maladies chroniques, si bien que certains commencent à parler de troisième cerveau pour évoquer cet écosystème bactérien. Le nouveau-né apparaît dénué de bactéries et la colonisation va se faire dès les premières heures. Ainsi chacun va développer un cocktail qui lui est propre en fonction de son environnement. Des excès ou des manques seraient à l’origine de certains dérèglements du comportement comme le sentiment de peur ou d’agressivité. La recherche a du pain sur la planche afin d’arriver à un rééquilibrage et à un bon dosage grâce à l’action des probiotiques… (en 2010, un travail pharaonique a été réalisé en décodant l’ensemble du génome bactérien !).
Durant l’échange qui a suivi cette projection, Michel Neunlist s’est réjoui de l’excellence de la recherche sur la place de Nantes et notamment de la dynamique qui existe entre la recherche clinique et la recherche fondamentale.
Le 26 avril 2014 Le point sur la Recherche
Parce que la recherche tient une place importante dans notre esprit car sur elle repose les espoirs de demain, parce que la recherche a beaucoup progressé ces dernières années et que les parutions se sont multipliées, nous avons jugé bon de faire le point, une sorte d’état des lieux de la recherche actuelle. Nantes étant un centre important et reconnu sur la recherche sur le Parkinson, nous ne pouvions inviter tout le monde, aussi nous avons décidé de limiter le nombre d’intervenants aux Professeurs Derkinderen et N’Guyen qui étaient intervenus, il y a 7 ans pour présenter leurs travaux.
Malgré la défaillance de la presse locale qui nous avait promis un article pour annoncer la conférence, plus de 150 personnes étaient présentes ce samedi après-midi.
Le Professeur Jean Paul N’Guyen avant d’être responsable du service de neurochirurgie au CHU de Nantes a travaillé avec le Pr Lefaucheur à Créteil. C’est donc riche de nombreuses années d’expérience qu’il nous dresse un tableau de la neurostimulation à ce jour.
La maladie de Parkinson est causée par la mort prématurée des neurones dopaminergiques. Le déficit de dopamine dans la voie nigrostriatale entraîne une hyperactivité de certains noyaux gris centraux. Le courant électrique de la stimulation va inhiber la suractivité de ces zones pour revenir vers la normale. Voilà pour le principe de la stimulation cérébrale profonde (SCP).
Dans le cadre de la chirurgie plusieurs stratégies sont possibles, on va choisir différentes cibles selon les cas rencontrés :
- si le patient présente un tremblement invalidant résistant aux médicaments, on optera pour une stimulation du thalamus, plus exactement du VIM du thalamus (noyau ventral intermédiaire),
- en cas de fortes dyskinésies, on choisira le pallidum ; la stimulation du GPi (globus pallidum interne) est efficace dans 74% des cas et on note une amélioration de l’akinésie de 30 à 60%,
- la stimulation du sous thalamus, le NST (noyau subthalamique), est la stimulation de référence, elle améliore l’ensemble des signes majeurs de la MP. Les critères pour être candidat sont stricts : bien réagir au traitement à la L‑Dopa, être plutôt jeune (environ 60 ans, moins de 70 ans), ne présenter aucun trouble cognitif ni d’antécédents psychiatriques. La stimulation n’a aucune efficacité sur les troubles non dopaminergiques.
Pour les personnes plus âgées (plus de 70 ans), il reste la stimulation du cortex moteur à l’aide de plaques posées sur la dure-mère mais les effets restent limités.
La stimulation magnétique transcrânienne, à raison d’une séance de 20 minutes toute les 3 semaines, permet une amélioration des scores, modeste mais non négligeable, en sollicitant la zone motrice du cerveau. Il s’agit plus d’optimiser le fonctionnement général du cerveau en jouant sur la plasticité du cerveau qui a tendance à diminuer avec l’âge.
Pour la chirurgie, les pistes de recherche actuelles se portent essentiellement sur la thérapie génique et les greffes de cellules souches.
La thérapie génique, menée par le Dr Stéphane Palfi, consiste en une injection d’un vecteur lentiviral qui exprime les gènes de 3 enzymes indispensables à la biosynthèse de la dopamine et permet de reprogrammer les cellules et ainsi de transformer les neurones du striatum en neurones dopaminergiques. La difficulté réside dans la capacité d’introduire du matériel génétique dans le noyau de ces cellules. Les enveloppes virales sont bien entendu débarrassées de leurs propriétés de multiplication et rendues non pathogènes. Les premières expériences sont prometteuses.
Les greffes de cellules souches n’en sont encore qu’à un stade de recherche en labo. Les CSE (cellules souches embryonnaires, fœtales) posent des problèmes de logistique et éthiques, on cherche à les remplacer par les CSA (cellules souches adultes) par exemple des cellules de la moelle osseuse reprogrammées ou encore par les iPS (cellules souches induites pluripotentes).
Pour mémoire, à l’INSERM de Nantes, est menée une recherche par Xavier Léveque sur la xénogreffe de neurones porcins (cf. « tout est bon dans le cochon »). La transplantation cellulaire étant une réponse possible à un problème de disponibilité de tissu fœtal (neuroblastes) mais on est confronté à des problèmes d’ordre immunitaire.
Interrogé sur la nicotinothérapie initiée par le Dr Gabriel Villafane à Henri Mondor, le Pr Derkinderen n’a pas voulu se prononcer. Le rôle de neuromodulateur sur les neurones du système nerveux central ainsi que l’aspect neuroprotecteur et anti-stress oxydatif que l’on prête à la nicotine ne sont pas, selon lui, suffisamment démontrés malgré les nombreux témoignages sur l’amélioration des symptômes et les réductions du traitement dopaminergique. Mais il n’empêchera personne de suivre un traitement à base de patchs.
Nous avons tout juste eu le temps de faire allusion à la recherche actuelle menée à l’INSERM de Bordeaux sur l’a‑synucléine. Cette protéine est naturellement présente chez le sujet sain mais elle apparaît chez le patient parkinsonien sous la forme agrégée. Ces amas protéiques, toxiques pour les neurones, entraînent des dysfonctionnements et la dégénérescence des cellules. La recherche porte sur l’étude d’un anticorps anti-a-synucléine car en bloquant l’agrégation de cette protéine ou en augmentant sa dégradation on pourrait prévenir la maladie.
Au final, tous les participants ont été enchantés et nous avons partagé le verre de l’amitié. En tant qu’organisateurs nous devrons veiller à ce que certains ne s’accaparent pas un temps précieux pour faire en public une consultation privée !!!!
Rédigé par Guy Seguin
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