Conférence du 12 avril 2003 dans le cadre des « journées de neurologie en langue française »
Publié le 24 juillet 2003 à 21:11paru dans Le Parkinsonien Indépendant n°13 — juillet 2003
Réunis à Nantes au palais des congrès, les journées de neurologie en langue française avaient réservé un temps d’intervention plus spécifiquement centré sur la maladie de Parkinson, ouvert largement au public : la salle de conférence était comble.
Professeur Hervé ALLAIN
Le professeur Hervé ALLAIN, de l’université Rennes 1, a entamé cette conférence en présentant les différents traitements pharmacologiques sous forme de diapositives réalisées par le Professeur DURIF de Saint Etienne.
Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler que le traitement le plus efficace est lié à la L DOPA. Cependant, elle provoque des complications sur la mobilité des patients : après cinq ans, apparaissent des fluctuations motrices, des dyskinésies.
Il est donc nécessaire d’engager une procédure de prévention en particulier pour les sujets jeunes :
— En absence de gêne : abstention, Deprenyl, Amantadine
— En cas de gêne fonctionnelle : agonistes dopaminergiques afin de retarder la mise sous L DOPA
Patients jeunes de 50 ans : — Quels agonistes choisir en fonction de la « demi-vie » des médicaments ? — S’il y a effets indésirables : troubles digestifs, hypotension artérielle, psychose orthostatique — Introduction secondaire de L DOPA
Sujets âgés >70 ans :
— Moins de dyskinésies que le sujet jeune
— Intérêt d’obtenir une « lune de miel » rapidement
— Prescription de L DOPA
Entre 50 et 70 ans, suivant l’état clinique du patient :
— Soit les agonistes dopaminergiques seuls.
— Soit les agonistes associés à de faibles doses de L DOPA
Traitement des tremblements pour les jeunes :
Les Anticholinergiques
Effets indésirables éventuels : troubles de la mémoire, assèchement.
Traitement des fluctuations : il s’agit de stabiliser les taux plasmatiques.
— Fractionnement des prises
— Utilisation de forme LP (à Libération Progressive)
— Association de médicaments : L DOPA + agoniste + Comtan (agissant sur le COMT)
— Possibilité de recours à l’Apokinon sous forme de stylo injecteur.
Traitement des dyskinésies :
— Stabiliser le traitement dopaminergique
— Médicament antidysnétique : Amantadine, Clozapine,
Traitement des autres complications :
— Hallucinations : réduction des agonistes et de la Levo Dopa
— Antipsychotique : Nepolix, Clozapine
— Troubles mnésiques : anticholinestéréasique
— Hypotension orthostatique : réduction Levo Dopa, contention élastique, vasopresseur
— Troubles sphinctériens : anticholergénique périphérique
— Instabilité posturale : rééducation
— Enrayage cinétique : rééducation
— Déglutition, dysarthrie : rééducation
— Hyper déglutition : anticholergénique, toxine botulique
Les pistes de recherche pour le futur :
L’essentiel de la recherche se tourne vers les neuroprotecteurs :
Mieux connaître les mécanismes de la mort cellulaire, son programme génétique :
— Le stress oxydatif
— Les disfonctionnements de la chimie réparatrice
— L’excitoxicité : les glutamates
— L’inflammation
— Le dérèglement des mouvements : l’apoptose
La recherche en génétique : fragilité, sensibilité aux risques, intervention sur les protéines
Les essais thérapeutiques de neuroprotecteurs, la difficulté étant de déterminer les médicaments les plus efficaces.
La neuroprotection par les agonistes
Réponse aux questions de l’assemblée :
A propos de la douleur exprimée par les malades :
Le professeur ALLAIN insiste sur la nécessité de connaître l’origine de la douleur et vérifier qu’il n’y a pas d’autres choses que la maladie de Parkinson
Le professeur DAMIER rappelle que la maladie est souvent associée à de l’arthrose. Si la douleur diminue avec les médicaments, il faut rechercher leur équilibrage. Par contre, si la douleur persiste, il y a matière à faire intervenir des médicaments antidouleur.
Les traitements spécifiques pour les tremblements :
Les deux intervenants répondent qu’il n’y a pas de traitement spécifique. Certaines personnes résistent plus que d’autres au traitement ; inversement de très faibles doses peuvent être très efficaces. L’analyse du taux de L DOPA dans le sang ne donne que des éléments très indirects de réponses par rapport à ce qui se passe dans le cerveau. Chaque cas est différent.
Les phénomènes d’ « impatience » peuvent être liés à des surdosages qu’il faut vérifier et tenter de rééquilibrer.
Jacqueline GEFARD insiste sur le rôle du malade qui doit participer pleinement avec son médecin à l’élaboration de son traitement, ce que confirment les deux intervenants.
La difficulté d’équilibrer avec d’autres médicaments nécessaires pour d’autres symptômes :
Les prescripteurs doivent être soucieux de vérifier les « associations » et les interactions entre les différents traitements. Le professeur ALLAIN déclare prendre parfois le risque de ne pas suivre à la lettre les préconisations. Le professeur DAMIER souligne l’évolution des formations qui tendent à aller d’une formation spécialisée vers une plus grande transversalité.
Professeur Philippe DAMIER
La recherche en matière de médicament s’appuie sur des éléments « pré cliniques » : Qu’est ce qui se passe dans le cerveau avant que les effets de la maladie ne se produisent ? Il faut donc analyser des cerveaux de patients en bonne santé et d’autres atteints par la maladie : c’est à cet effet que peut répondre le don « post mortem » du cerveau afin de faire avancer la recherche.
Recherche dans deux directions avant de passer aux essais sur l’homme : sur les cellules, puis sur les animaux ; sans eux, il n’y aurait pas de médicaments ni de neurostimulation. Seule une molécule sur 10 000 risque d’être, un jour, mise sur le marché ! Cela demande de longues années d’essais avant d’arriver jusqu’à l’homme.
Les essais se décomposent alors en quatre phases.
1ère Phase : la tolérance, le passage dans le sang, la durée de vie. Il s’agit d’abord de volontaires sains ; puis si la tolérance est bonne, de volontaires malades d’une classe d’âge correspondant aux objectifs recherchés. L’étude se fait sans bénéfice direct : l’objectif recherché étant la bonne tolérance exclusivement.
2ème Phase : Vérifier s’il corrige correctement les effets de la maladie, les variations, les tâtonnements en matière de posologie. Il s’agit de volontaires malades qui n’en retireront pas de bénéfice direct.
3ème Phase : Vérifier son efficacité par rapport à d’autres médicaments semblables. Il s’agit d’un système en « double aveugle » : la vérification se fait auprès de deux groupes de malades l’un bénéficiant de la nouvelle molécule l’autre gardant l’ancien traitement bien entendu sans que les patients ne le sachent. En cas de nouveau traitement, on utilise un Placebo.
Cette phase est indispensable mais tous les patients ne réagissent pas de la même manière ; les résultats sont donc à étudier avec précaution.
4ème Phase : Commercialisation après autorisation de mise sur le marché qui demande au moins deux études positives de phase 3.
L’ensemble de ce processus relève de la convention d’Helsinki au niveau international et de la loi Huriez de fin 80 : les volontaires doivent être informés, donner leur consentement ; la recherche doit être suivie par des centres spécialisés qui bénéficie de « Comité Consultatif de Protection de la Recherche en Biologie » CCPRB.
Il arrive que, après la mise sur le marché, quelques malades réagissent négativement et viennent apporter des réponses inattendues des études en cours : ainsi le TASMAR ou le DEPRENYL.
Les protocoles de recherche sont établis par le laboratoire de recherche ; la totalité des frais inhérents à l’étude sont pris en charge par le promoteur y compris les éventuels accidents de trajet qui ne sont pas imputés à la S.S.
On constate souvent des progrès pour les volontaires même lorsqu’il s’agit de placebo : cela est sans doute lié au fait que l’on s’occupe particulièrement de la maladie pour lequel le patient participe à l’étude.
La neurostimulation :
On est aujourd’hui assez au point ; mais il faut rappeler qu’elle ne concerne qu’une toute petite partie de la population (moins de 5%). Pourquoi ?
— Le traitement médicamenteux est amplement suffisant.
— La neurostimulation ne marche que sur certains cas.
— La neurostimulation est un traitement agressif pour le cerveau.
On en maîtrise mieux les critères aujourd’hui et cela concerne plutôt les plus jeunes. Il faut, à ce propos, parler « des » et non « d’une » maladies de Parkinson.
Généralement les traitements associés sont réduits mais pas complètement supprimés : il n’y a pas guérison mais amélioration ; la maladie continue d’évoluer. Les neurones dopaminergiques continuent de disparaître.
Les recherches en cours aujourd’hui au plan international :
1. Identifier les causes de la maladie : pourquoi ces cellules meurent-elles plus vite chez certaines personnes que chez les autres ?
2. Qu’est ce qui se passe dans le cerveau ? Améliorer les symptômes sans provoquer de dyskinésies ; comprendre comment ça marche.
3. Tenter de réparer avec des greffes : deux études américaines laissent planer un doute quant à cette piste de recherche, leurs résultats n’étant pas significatifs.
4. Un grand espoir : les cellules souches.
Questions de l’assemblée :
Vos recherches ont-elles des incidences sur d’autres maladies, P.S.P. par exemple ?
La maladie de Parkinson étant relativement simple dans son développement, en comprendre les mécanismes aide bien évidemment à comprendre les phénomènes en jeu dans des maladies plus complexes.
Y a‑t-il des recherches sur les conditions de vie des malades ?
Un projet ambitieux est en cours sur la création d’un grand réseau pour une étude très large sur : les situations évènementielles, la génétique, la pharmacocinétique.
Y a‑t-il suffisamment de moyens pour la recherche fondamentale et la recherche clinique ?
Pour la recherche clinique, bien évidemment se sont les laboratoires qui prennent en charge les frais de celle-ci. Par contre, cette année nous constatons un « gel » de 30% des crédits consacrés à la recherche : les meilleurs éléments partent donc à l’étranger poursuivre leurs études ce qui va provoquer un retard important de la recherche en France.
Qu’en est-il des nutriments tirés de la Papaye qui seraient soutenus par le professeur MONTAGNE ?
Il n’y a pas d’étude cette nature et le médecin personnel du pape affirme qu’il n’est pas concerné par ces articles sensationnalistes. Il s’agit d’une vaste fumisterie !
Les problèmes éthiques du clonage thérapeutique ?
La position française va ralentir la recherche et n’empêchera pas les recherches en la matière dans d’autres pays. Il est normal de prendre son temps pour éviter les dérives mais le clonage thérapeutique est indispensable pour avancer dans la connaissance. Il faut éviter de soutenir les charlatans.
Compte rendu établi par Jean GRAVELEAU, directeur de publication.
Propulsé par WordPress et le thème GimpStyle créé par Horacio Bella. Traduction (niss.fr).
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