Le point sur la Maladie de Parkinson en 2005 (seconde partie)
Publié le 31 mai 2005 à 13:27n.b. : Ce texte a initialement été publié sous forme de 10 messages adressés à la liste de diffusion Parkliste par le docteur Claude Mange, qui autorise aimablement le Gp29 à les reproduire sur ce site. La publication se fera en plusieurs parties au cours des mois de mai et Juin.
Mécanismes thérapeutiques de la MP.
Une cause inconnue déclenche la mort des neurones dopaminergiques dans le cerveau, notamment dans la substance noire, mais aussi dans d’autres systèmes neuronaux.
C’est la baisse du taux de dopamine qui est à l’origine des principaux signes de la maladie.
Depuis la découverte de la dopathérapie en fin des années 60, de nouvelles techniques ont été mises en oeuvre pour traiter la MP.
On peut classer ces techniques en 3 catégories :
1) traitements symptômatiques ;
2) restaurateurs ;
3) neuroprotecteurs.
Les traitements symptômatiques représentent l’essentiel sinon la quasi totalité des traitement actuels de la MP.
Ils essaient de corriger le manque de dopamine dans le cerveau ou ses effets : il s’agit de la L.Dopa, des agonistes et de la chirurgie.
Ils modifient nettement les symptômes mais non l’évolution de la MP, ni les symptômes dépendant des lésions non dopaminergiques.
Les traitements restaurateurs (ou réparateurs) veulent soit remplacer les neurones dopaminergiques atteints par la maladie (greffes de cellules nerveuses), soit apporter dans le cerveau des facteurs trophiques stimulant la repousse des neurones.
Ces techniques, bien que prometteuses, sont encore au stade expérimental (cellules souches, thérapie génique, etc.).
La neuroprotection veut empêcher ou tout au moins ralentir la mort neuronale.
Des essais sont actuellement en cours, mais à ce jour il n’a pas été possible de démontrer un effet neuroprotecteur quelconque.
Nous retrouverons ces différentes techniques prochainement.
Traitement par la Dopamine :
La L.Dopa (lévodopa) se transforme en dopamine dans le cerveau.
Elle est ssociée à des produits inhibant la transformation en dopamine avant d’atteindre le cerveau, le benséraside pour le Modopar, la carbidopa pour le Sinemet.
Elle est présentée sous des formes diverses, standard, à libération prolongée, dispersible et même une forme utilisable en infusion duodénale.
L’avantage de ces différentes présentations est de disposer de produits dont la concentration maximum aprés absorption et la demi-vie sont différentes, ce qui permet une souplesse de prescription.
Certains produits, les inhibiteurs enzymatiques, modifient le métabolisme de la dopamine dans le cerveau. Ainsi les IMAO‑B (sélégline ou Déprényl et rasagiline ou Aziltec) diminuent sa vitesse de dégradation.
D’autres comme les ICOMT ( Inhibiteurs de la catéchol-ortho-méthyl-transférase) (Tolcapone ou Tasmar et entacapone ou Comtan) en augmentent la concentration dans le cerveau et prolongent son action. (L’entacapone est associé au Sinemet dans le Stalévo).
En 2005 la L.Dopa reste le traitement de référence de la MP, améliorant l’akinésie et la rigidité, dans une moindre mesure les tremblements .
Elle peut donner des effets indésirables en début de traitement, notamment des nausées améliorées par la prise de dompéridone.
Elle doit être introduite trés progressivement pour en accroître la tolérance et surtout l’utiliser à la dose minimale efficace.
Avec l’évolution de la maladie il est nécessaire d’en augmenter les doses, mais au bout d’un certain nombre d’années peuvent apparaitre des « complications motrices » : fluctuations d’effets et mouvements involontaires (dyskinésies ) .
Pour retarder l’apparition des complications il a été recommandé de remplacer la L.Dopa par des agonistes dopaminergiques en début de traitement.
Il semble cependant que l’élément prépondérant pour eviter les complications motrices soit la « pulsabilité » de la stimulation dopaminergique : c’est à dire les « à‑coups » de concentration de dopamine aprés la prise du médicament.
Autrement dit la prescription de L.Dopa devrait chercher une stabilité de stimulation non seulement en début de traitement mais à toutes les étapes.
En fait avec l’évolution de la maladie, la sévérité de la dépopulation neuronale s’accroît et les neurones survivants sont incapables d’amortir les variations de concentration cérébrale de la L.Dopa.
Complications motrices de la L.Dopa .
Elles sont multiples et résultent d’une insuffisance d’action du traitement aprés un certain temps d’évolution de la maladie : il y a « résurgence » des signes parkinsoniens.
Classiquement on distingue des akinésies du petit matin, de fins de dose, nocturne…
Des dyskinésies de « pic de dose », de milieu de dose, intéressant la face, la langue, la bouche, de mouvements choréiques du tronc, des membres, de la tête. Ces dystonies peuvent être douloureuses, comme la dystonie « du petit matin » avec orteil en griffe, rotation du pied …
L’effet « on/off » traduit le passage en quelques minutes d’un état normal ou presque normal, à un état parkinsonien caractérisé.
L’enrayage cinétique (blocage) notamment de la marche, traduit, avec l’apparition de l’instabilité posturale, une aggravation de la maldie.
A côté de ces fluctuations motrices et parallèlement, existent des fluctuations non motrices, quelquefois non rattachées à la maladie et son traitement, souvent déconcertantes, toujours inattendues.
Il peut s’agir de troubles végétatifs : sueurs profuses, pâleur, sensations de chaleur, d’étouffement, des douleurs abdominales, des mictions impérieuses.
De troubles sensitifs, douleurs variées, syndrome de jambes sans repos.
De troubles cognitifs : angoisse, attaque de panique, irritabilité, dépression, asthénie intense, hallucinations.
Toutes ces manifestations, ces complications, rendent la maladie particulièrement pénible et justifient une adaptation du traitement, ce que nous verrons par la suite.
Les troubles moteurs non dopa-sensibles.
Les signes non « dopa-sensibles » apparaissent progressivemnt et compromettent l’autonomie du malade, son insertion sociale, professionnelle et familiale.
Ils sont sans doute en rapport avec d’autres systèmes que dopaminergique.
Au premier rang de ces troubles : les chutes !
Elles concernent 70 % au moins des parkinsoniens. La MP est la maladie neurologique la plus fréquemment responsable de chutes .
Rares lors des premières années de la maladie, leur apparition et leur répétition témoigne du » déclin moteur ». Leurs conséquences sont graves, fractures, hospitalisations, grabatisations …
Elles peuvent survenir en toutes circonstances : au lever, au demi-tour, au maintien de la station debout ou à l’occasion d’un blocage moteur (enrayage cinétique).
Le blocage moteur (freezing) se manifeste essentiellement au cours de la marche : les pieds restent collés au sol, soit à l’initiation de la marche, soit pendant la marche, au franchissement d’une porte, au demi-tour. Il est favorisé par l’émotion, la fatigue, un stimulus auditif ( appel, sonnerie du tél.) ou visuel.
Il peut s’observer lors de la parole ou de l’écriture.
Il concerne plus de trente pour cent des malades.
Avec l’aggravation de la maladie on peut constater d’autres signes non dopa-sensibles : difficultés à parler, à déglutir notamment.
Tous signes qui contribuent à l’isolement du malade.
Le point sur la maladie de Parkinson en 2005 (première partie)
Publié le 16 mai 2005 à 07:56Médecin généraliste retraité, conjoint de parkinsonienne depuis 30 ans, je suis convaincu de la nécessité pour les malades et leur entourage d’avoir le plus possible de connaissances sur la maladie et sa prise en charge, ne serait-ce que pour éviter le recours illusoire à des thérapeutiques non éprouvées.
C’est dans cet esprit qu’à la demande du GP29 je vous propose cette serie de messages sur ce que l’on sait aujourd’hui de la MP et son traitement.
n.b. : Ce texte a initialement été publié sous forme de 10 messages adressés à la liste de diffusion Parkliste par le docteur Claude Mange, qui autorise aimablement le Gp29 à les reproduire sur ce site. La publication se fera en trois parties au cours du mois de mai.
En ce début 2005 , la médiatisation de la mort du pape, parkinsonien , ne peut permettre de cacher ni les souffrances , ni la dégradation, pour ne pas dire la déchéance physique du parkinsonien « évolué » ..
Et effectivement les spécialistes français de la MP mettent l’accent sur les douleurs physiques, longtemps sous-estimées mais si fréquentes, les atteintes non motrices qui sapent le moral des parkinsoniens et déroutent leurs proches …
Et pourtant le grand public ( mais aussi des médecins … !) continuent de ne voir en les parkinsoniens que » des petits vieux qui tremblent .. » !
Nous savons tous que la MP c’est bien autre chose , c’est bien d’autres choses …
Si en 2005 on s’ouvre à d’autres horizons , malheureusement les causes de la MP sont toujours méconnues , les traitements toujours symptomatiques malgré les avancées de la recherche …
Car bien des inconnues subsistent , non seulement quant aux causes de la MP que sur les mécanismes de la mort neuronale et l’évolution de la MP ..
Nous essaierons de faire le point sur nos connaissances en 2005 …
Facteurs génétiques de la MP
Prés de 15 % des parkinsoniens auraient un proche ou apparenté atteint de la MP.
Ces cas de MP connaissent en général un début précoce mais une évolution beaucoup plus lente que les formes dites idiopathiques.
Ces cas familiaux peuvent correspondre à une mutation d’un gène.
Depuis 1997 on a ainsi découvert 5 gènes impliqués dans le developpement de la MP ; il y en a certainement d’autres …
Le premier gène découvert l’a été à l’occasion de l’étude d’un cas familial : il s’agit du gène de la synucléine alpha dont la mutation ( duplication ou triplication ) est à la base de certines formes de MP.
La synucléine est l’un des constituants essentiels des corps de Léwy.
Par ailleurs une anomalie du système ubiquitine-protéasome est impliquée dans de nombreux processus, peut-être dans la MP ?
Un deuxième gène, la parkine, est à l’origine de formes familales de la MP. Cette protéine est indispensable dans le bon fonctionnement du système ubiquitine-protéasome. Une mutation de la parkine pourrait aboutir à la formation de protéines toxiques pour les neurones. A noter que les inhibiteurs du protéasome sont capables chez l’animal de produire un syndrome parkinsonien.
Mais d’autres formes familiales de la MP paraissent liées plutôt à un dysfonctionnement des mitochondries, rappelant les effets nocifs du MPTP …
La roténone ( un herbicide ) a un mode d’action identique …
De toutes ces données, on peut penser qu’en dehors des cas familiaux liés à une mutation spécifique d’un gène précis, la MP pourrait résulter de facteurs génétiques prédisposant et de facteurs présents dans l’environnement, ces deux facteurs pouvant varier d’un individu à l’autre …
Mais il s’agit là d’hypothèses qui restent à démontrer par des études nécessaires sur de nombreux malades.
Symptômes au début de la maladie :
Classiquement la MP est caractérisée par une triade : tremblement de repos , rigidité et lenteur des mouvements. On pourrait y ajouter la variabilité des symptômes, plus fréquente que les tremblements.
Mais il s’agit là de symptômes notés lors d’une maladie évoluant depuis plusieurs années.
Les débuts sont souvent insidieux, discrets, trompeurs, non spécifiques, égarant d’autant plus le diagnostic qu’il n’existe aucun marqueur biologique confirmant ou non une MP.
(On reverra ces problèmes en parlant du diagnostic de la MP).
Tout d’abord l’âge du début est éminemment trompeur : si la moyenne d’âge au début se situe autour de 57/58 ans, on peut dire d’une MP qu’elle est précoce quand elle débute entre 20 et 40 ans, et qu’il s’agit de forme juvénile si elle débute avant 20 ans (souvent formes familiales, mutation du gène parkine). Il existe aussi des formes tardives débutant aprés 75 – 80 ans ..
Le début peut certes atteindre le système moteur, mais ici il faut insister sur les signes non moteurs inaugurant une MP qui ne sera reconnue quelquefois que plusieurs années plus tard !
Dans 40 à 60 % des cas il existe des manifestations douloureuses, articulaires, notamment la ceinture scapulaire, d’où les errances de diagnostic .…
Dans de nombreux autres cas le patient ressent des sensations difficiles à décrire, des impressions de serrement interne , de tremblement intérieurs, de brûlures … Toutes manifestations peu convaincantes et pouvant alors être étiquettées hystériques …
De même des troubles aussi variés que la constipation, des sueurs profuses, des sensations de froid, peuvent précéder les signes moteurs de la MP .. Sans oublier la fatigue qui touche 40 % des patients …
La séborrhée précède souvent les symptômes moteurs et peut s’aggraver nettement une fois la maladie diagnostiquée …
A signaler, un déficit olfactif trés précoce chez pratiquement tous les malades, mais dont ils n’ont généralement pas conscience. Des troubles oculaires visuels, difficulté à la lecture, sécheresse des yeux, troubles de la vision des couleurs, de la perception des contrastes …
Enfin des troubles du sommeil, un syndrôme de jambes sans repos, sans oublier bien sûr l’anxiété et / ou la dépression qui précède les signes moteurs chez 20 % des malades ..
Diagnostic de la MP
De la même manière que nous ne connaissons pas la (ou les ) cause de la MP, en 2005 le diagnostic de la MP est et reste avant tout clinique : aucun marqueur spécifique, imagerie encore du domaine de la recherche …
Nous avons vu que de nombreux signes plus ou moins trompeurs précèdent les manifestations motrices de la MP.
L’âge n’est pas un critère ; par contre l’asymétrie des symptômes en est un bon : la MP débute d’un côté, puis envahit le côté opposé quelques mois ou années plus tard.
Autre bon critère de diagnostic de MP : une réponse à la L.Dopa marquée et durable.
Certes ce problème concerne avant tout les médecins, et plus particulièrement les neurologues spécialisés dans les mouvements anormaux.
Mais l’annonce d’un tel diagnostic a un tel impact sur le patient et son entourage qu’il faut bien évoquer ce problème ! Ce diagnostic implique une atteinte de l’autonomie et des perturbations plus ou moins graves dans la vie personnelle, familiale et professionnele, ainsi que des nécessités thérapeutiques et un suivi prolongé et régulier !
D’où l’importance de ce diagnostic …
Qui reste clinique essentiellement, ce que ne comprennent pas toujours les malades ni leur entourage !
Cependant il faut savoir que le scanner et l’IRM sont normaux dans la MP . Ils ne sont indiqués que pour éliminer d’autres affections en cas de doute .
Mais les techniques d’imagerie dite fonctionnelles, tomographie par émission de positons (TEP ), tomographie par émission monophotonique ( SPECT ) permettent de visualiser trés précocément la perte neuronale dopaminergique, et ainsi de confirmer ou non une MP
Cependant ces examens sont rarement possibles dans la réalité en raison de leur prix et du manque d’équipements. En outre le SPECT ( DAT-Scan ) ne permet pas de différencier une MP dite idiopathique d’un autre syndrome parkinsonien dégénératif .
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