Ne pas être qu'un "patient" ...

Comment vivez-​vous avec la maladie de parkinson ?

Paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT N°29 – juin 2007

L’IMAGE DE SOI

Tout au long de notre vie, nous passons par une succes­sion d’étapes : nous sommes d’abord des bébés, des enfants, des adoles­cents, de jeunes adultes, nous entrons dans l’âge de la matu­rité puis dans celui de la vieillesse. L’image que chacun a de lui-​même se construit et évolue au travers de ces étapes.

Chaque étape consti­tue la recherche d’un équi­libre rompu par les nouveaux enjeux propres à chaque période de vie : par exemple, l’entrée dans l’âge adulte sera aussi le moment de la recherche d’emploi, de l’installation dans la vie… l’âge de la matu­rité sera celui de la descendance.

Chaque nouvelle étape de notre parcours de vie est donc une sorte de remise en ques­tion, une sorte de moment de déséqui­libre ; d’aucun parle­ront de « crises ».

Ces moments de crises seront accom­pa­gnés de divers senti­ments et émotions ; l’image de soi sera chan­gée parfois boule­ver­sée au cours de ces étapes.

Chacun aura besoin de l’ensemble de ces ressources person­nelles pour recons­truire un nouvel équi­libre et conser­ver ou retrou­ver une image de lui-​même positive.

De même, lors de la surve­nue d’un événe­ment, d’un chan­ge­ment impor­tant ou lors de l’annonce diag­nos­tique d’une mala­die, l’équilibre est rompu et cela consti­tue une période de « crise ».

L’annonce de la mala­die de Parkin­son boule­verse complè­te­ment l’univers de vie. Tout à coup, il y a une trans­for­ma­tion de la personne qui devient « malade ». A cette étape de début de mala­die, la ques­tion est celle de la recon­nais­sance de la mala­die : cette mala­die est la mala­die de « Parkin­son » et le malade doit accep­ter que cette mala­die soit là. Cette accep­ta­tion de la mala­die repré­sente un chemin d’acceptation de la réalité qui s’accompagne de senti­ments et d’émotions.

La mala­die de parkin­son est une mala­die neuro­dé­gé­né­ra­tive qui va petit à petit appor­ter des symp­tômes nouveaux ou accen­tuer certains d’entre eux. A chaque fois, la personne va être confron­tée à une rupture de l’équilibre anté­rieur et cela s’accompagnera de senti­ments et d’émotions néga­tifs (peur, refus d’y croire, colère, tris­tesse, découragement…).

La personne atteinte de la mala­die de Parkin­son devra vivre chaque nouvelle situa­tion comme une nouvelle crise pour tendre vers un nouvel équi­libre et tenter de préser­ver l’image qu’elle a d’elle-même.

Au début de la mala­die, puis à chaque nouveau symp­tôme, la mala­die est main­te­nue dans l’espace de l’intimité. Le malade cherche à taire ou à masquer ses diffi­cul­tés. On voit bien que l’image qu’il a de lui-​même est en train de chan­ger. Etre malade, avoir la mala­die de Parkin­son boule­verse l’image que le patient a de lui-​même et celle qu’il pense donner aux autres. Ces chan­ge­ments se traduisent par des senti­ments divers souvent néga­tifs qui néces­sitent la mobi­li­sa­tion de toutes les ressources de l’individu pour parve­nir à accep­ter la situa­tion et construire un nouvel équilibre.

Tour à tour le malade et l’aidant vont reje­ter la nouvelle réalité qu’est l’entrée dans la mala­die. Ils vont tenter de réduire l’impact de cet événe­ment en le gardant chacun dans l’intimité de soi. Ainsi, chacun d’eux se retrouve dans une soli­tude liée à la diffi­culté de mettre en mots ce que chacun ressent, ce que chacun vit.

Cette mati­née, axée sur l’expression des personnes atteintes de la mala­die de Parkin­son, a été l’occasion d’aborder ce ressenti, ces émotions diverses au détours de 4 étapes succes­sives isolées de façon sché­ma­tique et « cari­ca­tu­rale » dans le parcours de ces personnes face à la patho­lo­gie et dont l’objectif était d’aider à mettre en mots.

La première étape est consti­tuée par l’apparition des premiers symp­tômes, la seconde corres­pond à la période du diag­nos­tic, la troi­sième comprend l’acceptation de la mala­die et la quatrième aborde l’apparition de nouveaux symp­tômes ou l’accentuation de certains des symp­tômes de départ.

D’autre part, le fil conduc­teur de la réflexion a été de tenter de s’exprimer par rapport à l’image que la personne atteinte de la mala­die de Parkin­son a d’elle-même, mais aussi par rapport à l’image qu’elle pense donner aux autres ; comment pense-​t-​elle que les autres la voit. Toutes ces ques­tions ont été resi­tuées à chacune des périodes de la maladie.

L’apparition des premiers symp­tômes et avant d’avoir le diag­nos­tic se confond souvent avec le début de la mala­die ; la fron­tière entre le « avant la mala­die » et le « depuis la mala­die » est confuse mais douloureuse.

Cette période corres­pond à la rencontre avec des méde­cins, à la passa­tion d’examens médi­caux, à des hospi­ta­li­sa­tions avec parfois des pré-​diagnostics diffi­ciles à entendre.

Autour de l’annonce du diag­nos­tic, la néces­sité de multi­plier les visites auprès des méde­cins est appa­rue. On refuse d’y croire. Certains cherchent une autre écoute de la part du médecin.

Lorsque le diag­nos­tic est annoncé, des émotions très fortes appa­raissent. Une parti­ci­pante disait : « On vous emprisonne ».

A ce moment-​là un besoin d’informations concer­nant la mala­die existe. Il faut donner du sens à tout ce que l’on ressent pour en avoir moins peur. Pour certaines personnes atteintes de la mala­die de parkin­son cette quête d’informations est perma­nente même des années après. Une parti­ci­pante disait : « Quand je lis la brochure du Parkin­so­nien, j’attends de l’espoir… ». Cette soif de connais­sances corres­pond aussi souvent au désir de voir de nouveaux trai­te­ments arri­ver, des trai­te­ments qui aide­raient mieux au jour le jour. Certaines personnes ont parlé des éven­tuels patchs qui tardent à être disponibles.

Autour de cette étape du diag­nos­tic, certains s’interrogent sur les notions d’hérédité, de trans­mis­sions à leurs enfants.

Concer­nant l’image que la personne atteinte de la mala­die de parkin­son a d’elle-même, il appa­raît que dès le diag­nos­tic un boule­ver­se­ment existe. Une personne nous a dit : « J’avais une image de personne inva­lide, malade ». Le regard des autres sur soi devient diffi­cile à suppor­ter. Certains ont exprimé leur refus de sortir dès ce moment-​là, d’autres ont exprimé un senti­ment de honte : par exemple, devant leurs diffi­cul­tés graphiques, quelques uns ont souli­gné leur refus d’écrire, de remplir un chèque ou de signer dans un magasin.

Au fur et à mesure du temps, les personnes entrent dans une période d’acceptation de la mala­die. Qu’en est-​il de cette accep­ta­tion ? Nous avons vu ensemble que l’on ne parvient pas à une véri­table accep­ta­tion. Une personne disait d’ailleurs qu’elle « avait toujours beau­coup de mal à parler de cette mala­die ». Une autre de dire que « les gens qui parlent lui faisaient plus de mal ». Concer­nant l’acceptation de la mala­die et l’image de soi une personne a parlé de la perte de l’estime de soi.

D’autres personnes ont égale­ment rapporté les diffi­cul­tés rencon­trées lors de diverses hospi­ta­li­sa­tions, face à la mécon­nais­sance que les autres, person­nel soignant ou autre, ont de la mala­die de Parkin­son et de ses spéci­fi­ci­tés. Beau­coup de propos doulou­reux leur ont été dits dans ces moments de fragi­li­sa­tion. Par exemple, dans une situa­tion de blocage, on s’est entendu dire : « Quand on veut, on peut… ! ». Certains ont parlé de senti­ments d’humiliation devant certaines situa­tions. Ainsi, le senti­ment de ne pas être compris est très présent.

Même avec l’entourage proche ou moins proche, ces senti­ments se retrouvent parfois. Certains se sont lais­sés entendre dire : « Tu n’as rien » devant la fluc­tua­tion des symp­tômes, ou bien « tu n’as pas la mala­die de Parkin­son, tu ne trembles pas ».

Mais même si cette ques­tion d’accepter la mala­die reste en suspens, l’importance de parta­ger du ressenti, d’échanger des infor­ma­tions, par l’intermédiaire d’associations par exemple, a été évoquée : « Entre nous, on se comprend, on se complète ».

Enfin, avec l ‘évolu­tion de la mala­die et l’apparition de symp­tômes nouveaux ou la plus grande diffi­culté à les contrô­ler, les mêmes thèmes sont reve­nus dans les propos de chacun, avec ces senti­ments d’incompréhension, d’image de soi néga­tive et même de soli­tude face à la mala­die. Preuve que chaque fois, l’équilibre anté­rieur est rompu et qu’il faut de nouveau se mobi­li­ser pour tendre vers un nouvel équi­libre. Une personne ayant des diffi­cul­tés à s’exprimer disait : « Dans mon entou­rage, on ne me comprend pas, donc je ne parle pas ».

D’autres personnes ont souli­gné le senti­ment d’être un poids pour leur conjoint. Une personne de dire : « Je suis une enqui­qui­neuse, une empê­cheuse de voya­ger par exemple ». Une autre encore : « Par rapport à mon conjoint, je suis deve­nue un poids, je gâche la vie de mon mari ». Toutes ces expres­sions révèlent une souf­france intense.

Certaines personnes ont souhaité abor­der les senti­ments d’inquiétude ressen­tie par leur conjoint ou leurs enfants à propos d’eux malades et la culpa­bi­lité qu’ils ressentent à leur faire vivre cette situation.

Quelques uns ont souli­gnés des expé­riences qu’ils ont pu mettre en place depuis l’arrivée de la mala­die dans leur vie. Il s’agit d’activités manuelles, artis­tiques qui permettent « d’oublier tout » et de « donner aux autres une image posi­tive de soi-​même, qui permet de se revaloriser ».

D’autres ont insisté sur le fait que main­te­nant depuis l’arrivée de cette mala­die dans leur vie, ils ont recon­si­déré l’importance qu’ils donnaient précé­dem­ment à des riens.

Enfin, cette mati­née et la parti­ci­pa­tion active des membres du groupe ont renforcé l’idée selon laquelle s’exprimer, échan­ger, être écouté, entendu, peut appor­ter une aide impor­tante et multiple aux personnes atteintes de la mala­die de Parkinson.

Merci à tous.

Cathe­rine LAINE-​CACITTI neuropsychologue
Trans­mis par l’association de La Manche

10 Commentaires Cliquer ici pour laisser un commentaire

  1. Anne-​Marie Bardin, Votre ressenti est courant , cela peut être une cause de la mala­die Parkin­son, car la dopa­mine gère la tempé­ra­ture du corps. Un des médi­ca­ments peut créer cet effet si il ne rempli pas bien son rôle soit par un excès ou manque.

    Commentaire by Jean- claude PREVOST — 28 septembre 2021 #

  2. Bonjour, atteinte de la mala­die de Parkin­son, je ressens des sueurs froides et des nausées par moment, cela est-​il normal ? Merci pour votre réponse.

    Commentaire by Anne Marie Bardin — 22 septembre 2021 #

  3. Diane,

    Vous n’êtes pas la seule à avoir des crises de panique !
    Cf le site de France-Parkinson 

    « Troubles du compor­te­ment les plus fréquents chez les Parkinsoniens

    … Les attaques de panique (très forte angoisse, coeur battant, sueurs froides, troubles respi­ra­toires, inca­pa­cité à contrô­ler sa crainte) font partie des troubles du comportement.…

    Ne vous lais­sez donc pas humi­lier par votre entourage !
    Adhe­rez à des asso­cia­tions telles que GP29 et France-​Parkinson : vous y trou­ve­rez des petits livres trés simples que vous pour­rez ache­ter , et où ces symp­tômes sont bien décrits.

    Deman­dez conseil à votre neuro­logue pour trai­ter aussi correc­te­ment que possible ces sympômes : vous verrez alors que les trai­te­ments, même légers, peuvent vous aider.
    Bon courage !

    Commentaire by Marie-Paule Subarroque — 27 septembre 2011 #

  4. C’est une mala­die humi­liante avec des crises de panique et personne ne veut en entendre parler dans mon entou­rage. Ils ne me croit pas ils disent que j’ai un probleme psycho­lo­gique. Je n’en peux plus de me battre je suis épuisée.

    Commentaire by Dicaire Diane — 23 septembre 2011 #

  5. monique vous pouvez prler avec moi ‚je vous attend .paule

    Commentaire by paule — 13 mai 2009 #

  6. Paule, je viens de répondre à votre précé­dent message- je ne peux que vous redire de ne pas rester seule, de vous joindre à un groupe où vous pour­rez parler de vos problèmes — si vous n’avez pas de groupe, inscri­vez vous sur Park­liste. C’est vrai qu’il y a des moments bien diffi­ciles mais ensemble on y fait mieux face-​vous pouvez aussi m’écrire : gp29 @ altern.org — bien amica­le­ment ‑E.Six

    Commentaire by GP29 — 12 mai 2009 #

  7. comment vivez vous avec la mala­die de parkin­son ? JE NE SAIS plus vivre .J,ai de la haine j ‘ai meme honte d’avoir cette horible mala­die c’est un carcan que je promene (quand je peux marcher) quelque fois je reve que je vais bien j ‘espere que bien­tot on pourra guer­rir de cette mala­die .je ne suis pas quelqu ‘un degoiste je pense qu’il y a des mala­die plus grave ;mais j’ai besion de hurler en silence ma peine a.….….a bien­tot paule

    Commentaire by paule — 12 mai 2009 #

  8. bonjour — je ne peux répondre à votre première ques­tion — il faut voir votre neuro­logue, lui seul connaît l’évo­lu­tion de votre mala­die et peut vous donner le meilleur trai­te­ment possible.
    En ce qui concerne votre seconde ques­tion, là, je peux vous dire qu’ll ne faut pas rester seule. Voyez s’il y a une asso­cia­tion là où vous habi­tez . Si oui, rejoi­gnez la — vous pour­rez y parler de vos problèmes . Vous appren­drez à connaître la mala­die , plus vous la connaî­trez, plus vous pour­rez trou­ver le moyen de mieux vivre avec votre mala­die. Si non, repre­nez contact : gp29@altern.org , bien amicalement.

    Commentaire by GP29 — 25 avril 2009 #

  9. comment parle­ra­vec quel­qun de leur mala­die surtout celle de parkinson

    Commentaire by monique — 25 avril 2009 #

  10. quelle trai­te­ment prendre faut prendre pour ne pas tram­bler tout le temps

    Commentaire by monique — 25 avril 2009 #

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