Ne pas être qu'un "patient" ...

Le clonage thérapeutique

paru dans Le Parkin­so­nien Indé­pen­dant n°16 — mars 2004

Article paru dans le Nouvel Obser­va­teur du 19/​25 février 04
Ecrit par Michel De Pracontal

Des cher­cheurs sud-​coréens sont parve­nus à cloner des embryons humains. Une décou­verte réali­sée dans un but théra­peu­tique et non repro­duc­tif. Pour combien de temps ?

« Sans tapage média­tique, une équipe coréenne a réalisé une double première que nombre de spécia­listes jugeaient hier encore hors d’atteinte. A l’université natio­nale de Séoul, Hwang Woo-​suk et Moon Shing-​yong ont cloné une tren­taine d’embryons humains selon le prin­cipe qui avait donné nais­sance en 1996 à la brebis Dolly. A partir d’un de ces embryons, ils ont ensuite obtenu une lignée de cellules souches, ces « cellules de jouvence » qui peuvent virtuel­le­ment se trans­for­mer en n’importe quel tissu biolo­gique. Et grâce auxquelles les biolo­gistes espèrent déve­lop­per une méde­cine qui permet­tra, demain, de renou­ve­ler les tissus endom­ma­gés par des patho­lo­gies dégé­né­ra­tives comme le diabète, l’ostéoarthrite ou encore la mala­die de Parkinson. »

« Le clonage théra­peu­tique ne doit pas se confondre avec le clonage repro­duc­tif. Problème : une fois que l’on dispose d’un embryon capable de four­nir des cellules souches, il est simple de le réim­plan­ter dans l’utérus d’une mère porteuse pour réali­ser l’expérience inter­dite. D’où la pres­sion extrême qui s’exerce sur les recherches desti­nées au clonage théra­peu­tique. En France, ce type d’expérience reste suspendu à l’adoption défi­ni­tive de la nouvelle loi bioé­thique (cf. Ci-dessous). »

« L’équipe coréenne qui a publié ses résul­tats le 12 février sur le site Inter­net de la revue Science n’a pas été finan­cée par des inves­tis­seurs mais par le gouver­ne­ment de la Corée du Sud, pays qui inter­dit toute forme de clonage repro­duc­tif. »…Alors que « les promesses de la « méde­cine régé­né­ra­trice » sont telles qu’aux Etats-​Unis les finan­ceurs n’hésitent pas à finan­cer des start-​up pour déve­lop­per des cellules souches et le clonage théra­peu­tique. La concur­rence à la fois scien­ti­fique et écono­mique tend à faire de la biolo­gie un secteur de spécu­la­tion bour­sière où la valeur de l’action compte autant que la qualité de la recherche » !

« Les cher­cheurs ont donc fait appel à 16 femmes qui n’ont pas été rému­né­rées et ont signé un proto­cole préci­sant que le don était exclu­si­ve­ment destiné au clonage théra­peu­tique…. Les coréens ont sélec­tionné 176 ovules sur les 242 ovocytes obte­nus, avant d’en reti­rer le noyau qui contient les gènes. Le noyau a été remplacé par celui d’une cellule de chaque donneuse. Pour cette première, l’équipe coréenne a procédé à des clonages auto­logues, c’est-​à-​dire qu’à chaque fois la même donneuse a fourni l’ovocyte et le noyau cellu­laire. Géné­ti­que­ment, les embryons ainsi recons­truits sont donc des copies conformes à 100% de la donneuse. »

« Une fois clonés, trente embryons sont parve­nus au stade de blas­to­cyste, sphère de cellules entou­rant un amas central dans lequel appa­raissent les fameuses cellules souches. Hwang et Moon ont cher­ché à les isoler sur une ving­taine de blas­to­cystes. Mais un seul d’entre eux a fourni une lignée de cellules souches, ce qui consti­tue un taux de succès assez faible. L’équipe coréenne a toute­fois pu véri­fier que les cellules souches en ques­tion étaient bien analogues à celles que l’on obtient à partir d’un embryon norma­le­ment fécondé. Et que celles –ci s’étaient bien diffé­ren­ciées pour donner les prin­ci­paux tissus biolo­giques qui appa­raissent au début du déve­lop­pe­ment : os, carti­lages, muscles, cellules nerveuses immatures. »

« Tout indique donc que les cher­cheurs de Séoul ont réussi là où tout le monde avait échoué. A un bémol près : il se pour­rait que les cellules souches ne soient pas issues du clonage, mais d’un autre proces­sus, la parthé­no­ge­nèse. Il arrive en effet qu’un œuf non fécondé commence à se déve­lop­per spon­ta­né­ment. Or, dans l’expérience coréenne, comme les gènes du noyau trans­féré sont iden­tiques à ceux de l’ovocyte récep­teur, on ne peut tran­cher avec certi­tude. Diffé­rents indices suggèrent toute­fois que Hwang et Moon ont bien réussi à créer des cellules souches par clonage. L’objection de la parthé­no­ge­nèse reste donc de pure forme. »

La France hors jeu

« La France tourne-​t-​elle le dos à l’avenir ? Notre pays est spec­ta­cu­lai­re­ment absent de la course aux cellules souches. Une situa­tion « catas­tro­phique pour la recherche fran­çaise », selon René Fryd­man, « père » d’Amandine, le premier bébé éprou­vette né dans l’Hexagone le 24 février 1982. Adopté au mois de décembre en seconde lecture par l’Assemblée Natio­nale, le projet de loi bioé­thique bloque la recherche sur l’embryon et inter­dit les travaux sur le clonage théra­peu­tique en les punis­sant de sept ans de prison. Ironie du sort : la France condamne le clonage théra­peu­tique chez elle mais le défend au niveau inter­na­tio­nal. Quant au ministre de la santé, Jean-​François Mattei, il a jugé que l’expérience sud-​coréenne n’avait rien de « boule­ver­sant ». La poli­tique scien­ti­fique fran­çaise marche donc sur la tête à recu­lons. Torti­co­lis assuré. »

Compte rendu proposé par Jean GRAVELEAU

Pas encore de Commentaires Cliquer ici pour laisser un commentaire

Laisser un commentaire

XHTML: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Flux RSS des commentaires de cet article.

Propulsé par WordPress et le thème GimpStyle créé par Horacio Bella. Traduction (niss.fr).
Flux RSS des Articles et des commentaires. Valide XHTML et CSS.