Ne pas être qu'un "patient" ...

Présentation de la maladie de Parkinson (seconde partie)

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°50 – septembre 2012 

LES TRAITEMENTS DANS LA MALADIE DE PARKINSON

Actuel­le­ment on ne guérit pas la mala­die de Parkin­son, le trai­te­ment va cher­cher à compen­ser le défi­cit en dopamine : 

  • par voie orale : en appor­tant de la dopa­mine (Lévo­dopa) ou en stimu­lant direc­te­ment les récep­teurs dopa­mi­ner­giques (agonistes) ou en rédui­sant la dégra­da­tion natu­relle de la dopa­mine (IMAO B et ICOMT),
  • par injec­tion sous-​cutanée (pompe à Apokinon©)
  • par sonde gastrique (sonde à Duodopa),
  • par inter­ven­tion chirur­gi­cale (stimu­la­tion céré­brale profonde).

La dopa­mine : La dopa­mine ne passe pas la barrière héma­toen­cé­pha­lique, la lévo­dopa, précur­seur de la dopa­mine, est absor­bée dans le duodé­num et est ensuite décar­boxy­lée en dopa­mine. La L‑dopa repré­sente le trai­te­ment de réfé­rence et elle sera pres­crite en première inten­tion chez les patients de plus de 70 ans. Elle est le médi­ca­ment le mieux toléré et dont l’effet moteur est le meilleur. En début de trai­te­ment, pour éviter les problèmes de nausées et chute de pres­sion arté­rielle au lever, on pres­crit du MOTILIUM©.
Les doses de L‑dopa seront progressives :

  • une dose mini­male de 300 mg/​j pour pouvoir mesu­rer un effet,
  • une poso­lo­gie aux alen­tours de 500 mg/​j est consi­dé­rée comme moyenne,
  • au-​delà de 1000 mg/​j, il s’agit d’une forte posologie.

Il est impor­tant de respec­ter les horaires de pres­crip­tion (plus ou moins une ½ heure), jamais d’arrêt brutal (parti­cu­liè­re­ment en cas de chirur­gie), prendre les doses de préfé­rence une ½ heure avant les repas ou 1½ à 2 heures après les repas pour une meilleure efficacité. 

Les effets secon­daires : la L‑dopa :

  • stimule les récep­teurs dopa­mi­ner­giques sur les artères (hypo­ten­sion orthostatique),
  • stimule les récep­teurs du centre du vomis­se­ment situés à la base du cerveau (nausées, vomissements),
  • stimule les voies de la moti­va­tion et du plai­sir : risque de 15% chez les patients jeunes de troubles du contrôle des impul­sions ou d’addictions au trai­te­ment ; risque de confu­sion et d’hallucinations chez le sujet âgé.

Les agonistes dopa­mi­ner­giques : Les agonistes « miment » l’effet de la dopa­mine en stimu­lant direc­te­ment les récep­teurs dopa­mi­ner­giques. Avan­tages : leur durée d’action est plus longue que la L‑dopa et permet de dimi­nuer le nombre de prises. Incon­vé­nients : on note une moindre effi­ca­cité sur les symp­tômes moteurs et des risques accrus : troubles de contrôle des impul­sions chez le patient jeune, confu­sions, cauche­mars, hallu­ci­na­tions chez le patient âgé. Parmi les agonistes on distingue :

  • les déri­vés de l’ergot de seigle qui présentent tous des risques sur le plan pulmo­naire, rénal et cardiaque. On évite donc de les utiliser,
  • les agonistes non ergo­tés. Il s’agit d’une famille hété­ro­gène mais qui partage l’avantage sur les ergo­tés de ne pas induire de fibrose.

Les agonistes partagent les mêmes effets indé­si­rables que la lévo­dopa mais avec une plus grande sévé­rité proba­ble­ment du fait de la stimu­la­tion directe des récep­teurs dopa­mi­ner­giques. Comme pour la lévo­dopa, le sevrage doit être progres­sif. Quelque soit l’agoniste choisi : ne pas pres­crire chez le sujet âgé ou en cas de troubles cogni­tifs, poso­lo­gie progres­sive, hormis le cas parti­cu­lier de l’apomorphine, ne pas asso­cier d’agonistes dopa­mi­ner­giques entre eux du fait du risque de poten­tia­li­sa­tion des effets indé­si­rables, en parti­cu­lier en cas de confu­sion hallu­ci­na­toire. Pour les agonistes non ergo­tés, on trouve : le ropi­ni­role©, le prami­pexole©, le piri­bé­dil©, la roti­go­tine© et l’apomorphine©.

L’apomorphine est un puis­sant agoniste d’efficacité compa­rable à la lévo­dopa. Elle est utili­sée en admi­nis­tra­tion sous-​cutanée soit sous forme de stylo injec­teur, soit sous forme d’ampoule pour utili­sa­tion de perfu­sion sous-​cutanée en continu à l’aide d’une pompe. L’absorption sous-​cutanée est rapide, l’efficacité motrice appa­rais­sant dès les 10 à 15 minutes. Sa durée d’action est courte, de l’ordre 30 minutes à une heure, mais en terme d’efficacité, 10 mg d’apomorphine serait l’équivalent de 100 mg de lévo­dopa. Les troubles psychiques sont moindres qu’avec les autres agonistes.

Les inhi­bi­teurs de la MAO B : La Sélé­gi­line® (DEPRENYL©) et la Rasa­gi­line® (AZILECT©) sont des inhi­bi­teurs sélec­tifs de la MAO B (mono­amine oxydase B) et donc réduisent la dégra­da­tion de la dopa­mine au niveau du cerveau et renforcent ainsi l’efficacité de la L‑dopa (10%). Les effets secon­daires sont iden­tiques à la lévo­dopa. On note un effet poten­tiel­le­ment « ralen­tis­seur » pour la Rasa­gi­line. Indi­ca­tions : soit en mono­thé­ra­pie (sans la lévo­dopa) pour un parkin­son peu évolué, soit en asso­cia­tion avec la lévo­dopa chez les patients présen­tant des fluc­tua­tions motrices de fin de dose. 

Les inhi­bi­teurs de la COMT : La COMT (cathécol-​O-​méthyltransférase) est une enzyme présente dans la paroi intes­ti­nale, elle dimi­nue la biodis­po­ni­bi­lité de la dopa­mine. En admi­nis­trant un ICOMT avec la lévo­dopa, on augmente à la fois la biodis­po­ni­bi­lité de la lévo­dopa et sa demi-vie. 

L’entacapone® (COMTAN© ou STALEVO©) en asso­cia­tion avec la lévo­dopa : augmente de plus de 10% l’efficacité motrice, colore les urines en jaune orangé ; effets indé­si­rables : nausées, diar­rhées, douleurs intestinales. 

La tolca­pone® (TASMAR©) : effi­ca­cité de 30%, soup­çonné d’hépatotoxicité, néces­site un bilan hépa­tique ; effets indé­si­rables iden­tiques à tout trai­te­ment à la lévodopa. 

L’amantadine® (MANTADIX©) : L’amantadine était utili­sée comme anti­vi­ral. Son effi­ca­cité anti­par­kin­so­nienne a été décou­verte par hasard, elle est plus faible que celle de la lévo­dopa. Il a été montré un effet anti­dys­ki­né­tique inté­res­sant. Sa demi-​vie est longue ; pas de prise après 17H du fait du risque d’insomnie. Ses effets indé­si­rables : hypo­ten­sion ortho­sta­tique et nausées. Elle peut provo­quer des hallu­ci­na­tions et des confusions. 

La cloza­pine® (LEPONEX©) : La cloza­pine est le seul neuro­lep­tique compa­tible avec un trai­te­ment anti­par­kin­so­nien. Elle est indi­quée lors des psychoses dopa-​induites dans la mala­die de Parkin­son. On a observé des effets anti­dys­ki­né­tiques. Elle est utili­sée en cas de troubles hallucinatoires. 

Pour tous les autres symptômes : 

  • consti­pa­tion : laxatifs
  • chute de tension : en prio­rité, utili­ser des bas de conten­tion puis Moti­lium, Gutron, Fludrocortisone
  • Mouve­ments brusques ou agita­tion nocturne : RIVOTRIL en gouttes
  • sali­va­tion exces­sive : injec­tion botulique
  • diffi­cul­tés de mémoire, manque de moti­va­tion : EXELON
  • anxiété, dépres­sion : SEROPLEX, EFFEXOR
  • sensa­tion de déprime ou hallu­ci­na­tions : LEPONEX
  • Free­zing, insta­bi­lité ou chute : Kinésithérapie
  • Voix chucho­tée, diffi­cile à comprendre : orthophonie 

La pompe à apomor­phine : La pompe délivre en perma­nence en sous-​cutané de l’apomorphine, avec la possi­bi­lité d’ajouter une quan­tité supplé­men­taire (bolus) en cas de blocage. Elle s’adresse au patient fluc­tuant (phases ON/​OFF) ou en cas de phases de dyski­né­sie prolon­gées. Elle permet : de réduire le trai­te­ment oral, d’améliorer la qualité de vie du patient et de renfor­cer son auto­no­mie, de dimi­nuer les fluc­tua­tions motrices, de dimi­nuer progres­si­ve­ment les dyskinésies.

Le béné­fice théra­peu­tique est très net, l’impression clinique globale d’amélioration se situe entre 50 et 70%, tant d’après le patient que d’après son entou­rage. En dehors d’une dété­rio­ra­tion cogni­tive sévère et de symp­tômes psycho­tiques, il n’y a pas de contre-​indications, en parti­cu­lier l’âge n’est pas une limi­ta­tion. La pompe à apomor­phine repré­sente une alter­na­tive en cas de contre-​indication à la stimu­la­tion céré­brale profonde.

La première mise en place néces­site un séjour hospi­ta­lier (envi­ron 10 jours). Ensuite, au domi­cile, une infir­mière ou une personne de l’entourage inter­vient pour la mise en place quoti­dienne de la pompe. Il faut comp­ter près de 6 mois pour arri­ver au bon débit (envi­ron 3 mg par heure). Elle est posée le matin au réveil et reti­rée le soir au coucher. Il faut éviter de la poser 24h/​24h, sauf en cas d’akinésie doulou­reuse nocturne sévère, en raison du risque d’échappement théra­peu­tique au fur et à mesure du temps (perte de l’effet du trai­te­ment au fur et à mesure du temps lorsque la pompe est posée 24h/​24). Il faut chan­ger régu­liè­re­ment de site d’injection pour éviter les nodules. Du fait de son coût, la pompe à apomor­phine est mal accep­tée dans les EHPAD (Etablis­se­ment hospi­ta­lier pour personnes âgées dépendantes). 

La sonde à Duodopa : La sonde permet une admi­nis­tra­tion intes­ti­nale en continu de lévo­dopa en suspen­sion dans un gel. Elle assure un débit continu 24/​24 H avec la possi­bi­lité de bolus si besoin. Cette tech­nique est réser­vée au patient à un stade avancé, répon­dant bien à la dopa­thé­ra­pie : lorsqu’il n’y a pas de résul­tats avec les anti­par­kin­so­niens oraux, lorsque la pompe à apomor­phine est mal tolé­rée ou insuf­fi­sam­ment effi­cace, lorsque le patient est exclu de la stimu­la­tion céré­brale profonde.

Après des tests à l’aide d’une sonde naso­duo­dé­nale pour mesu­rer l’efficacité de la Duodopa, une sonde à demeure est mise en place lors d’une gastro­to­mie endo­sco­pique percu­ta­née. La Duodopa en continu permet de réduire les périodes OFF aussi bien que les dyski­né­sies. Les contre-​indications sont les mêmes que celles de la lévo­dopa. L’utilisation de cette tech­nique est limi­tée par son coût.

La stimu­la­tion céré­brale profonde : Avant la décou­verte de la dopa­thé­ra­pie, le trai­te­ment neuro­chi­rur­gi­cal de la mala­die de Parkin­son se limi­tait à de la chirur­gie lésion­nelle, jusqu’aux années 1970/​1980. Puis vers les années 1990, face aux limites du trai­te­ment dopa­mi­ner­gique et grâce aux progrès de la connais­sance et des tech­niques, la stimu­la­tion céré­brale profonde (SCP) a pu être envisagée.

Au niveau des ganglions de la base, le défi­cit en dopa­mine de la voie négros­triée entraîne une hyper­ac­ti­vité du palli­dum et du noyau subtha­la­mique. Le courant élec­trique de la stimu­la­tion à haute fréquence inhibe la surac­ti­vité de ces zones et permet d’améliorer les symp­tômes moteurs parkin­so­niens. La 1ère SCP a été prati­quée en 1993 à Lyon.

La stimu­la­tion céré­brale profonde se fait sur 3 cibles précises :

  • le thala­mus : la stimu­la­tion du noyau central inter­mé­diaire du thala­mus (VIM) permet de contrô­ler le trem­ble­ment de repos et s’adresse à des patients présen­tant un trem­ble­ment inva­li­dant résis­tant au trai­te­ment à la lévodopa,
  • le palli­dum : la stimu­la­tion du globus palli­dum interne (GPI) a une action effi­cace sur les dyski­né­sies. Elle est indi­quée chez les patients présen­tant une contre-​indication au NST. Elle est réali­sable jusqu’à l’âge de 75 ans, sous réserve d’un bon état géné­ral. Elle ne permet pas de réduire le traitement.
  • le noyau subtha­la­mique (NST) : la stimu­la­tion bila­té­rale du NST est la stimu­la­tion de réfé­rence, elle est la plus prati­quée. Elle permet d’améliorer l’ensemble des symp­tômes moteurs de la triade parkin­so­nienne, elle est effi­cace dans 8 cas sur 10. Elle n’est pas effi­cace sur les troubles non dopa­mi­ner­giques (free­zing, dysar­thrie…). Le rapport bénéfice/​risque doit être bien évalué. Moins de 10% des malades peut prétendre à la SCP du NST. Le patient doit répondre à des critères stricts : présen­ter un parkin­son idio­pa­thique sans aucun autre argu­ment en faveur d’un autre syndrome parkin­so­nien, sujet jeune de préfé­rence, en tous les cas infé­rieur à 65/​70 ans, avoir au moins 5 ans d’évolution de la mala­die, présen­ter des dyski­né­sies et des fluc­tua­tions motrices, avoir une bonne réponse à la dopa­thé­ra­pie, n’avoir aucun trouble cogni­tif, pas de signes axiaux en condi­tion ON, pas de troubles psychia­triques, pas de mala­die géné­rale grave.

La chirur­gie n’est pas une solu­tion miracle et ne fera pas du patient un homme nouveau. L’amélioration appor­tée se limite au mieux atteint avec le trai­te­ment à la lévodopa.

L’opération se déroule en plusieurs étapes : un repé­rage par IRM 3 ou 4 mois avant, l’implantation des élec­trodes (1,27 mm de diamètre). L’intervention dure en moyenne 5h sous anes­thé­sie locale. Le malade ne doit pas bouger mais parti­cipe acti­ve­ment. La pose du stimu­la­teur en région sous clavi­cu­laire sous anes­thé­sie géné­rale (SOLETRA – KINETRA). La durée des piles varie entre 6 et 10 ans.

Les étapes du suivi : opéra­bi­lité, bilan d’inclusion, chirur­gie, contrôle à 3, 6 et 12 mois 

Parmi les effets secon­daires, on note : compli­ca­tions motrices, insta­bi­lité postu­rale, diffi­culté d’initiation au pas, free­zing, festi­na­tion, chute, dysar­thrie (trouble de l’articulation), accès de confu­sion, perte de moti­va­tion, syndrome dépres­sif, aggra­va­tion des capa­ci­tés de concentration.

Par Tiphaine ROUAUD, neuro­logue à l’hôpital de NANTES
Inter­ven­tion à la Maison des Aidants à Nantes en janvier 2012.

1 Commentaire Cliquer ici pour laisser un commentaire

  1. bonjour je viens de rece­voir duodopa pas de chan­ge­ment pour­quoi attendre aussi lontemps pour avoir la simu­la­tion cérébrale

    Commentaire by laffon — 4 décembre 2017 #

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