Le tube digestif est-il plus perméable chez les parkinsoniens ?
Publié le 08 juillet 2013 à 06:20Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°53
Thomas Clairembault, Pascal Derkinderen, Michel Neunlist
INSERM U913, Neuropathies du système nerveux entérique et pathologies digestives, Nantes
Sous ce titre un peu mystérieux, se cache un projet de recherche qui est actuellement mené par Thomas Clairembault, étudiant en thèse à l’U913 (Neuropathies du système nerveux entérique). Il est désormais bien établi que les patients parkinsoniens ont des lésions dans leur tube digestif en tout point semblables à celles présentes dans le cerveau. Ces lésions, appelées corps de Lewy sont des petits agrégats présents dans les neurones et sont considérées comme la véritable signature de la maladie. Il est important de souligner que ces corps de Lewy sont présents dans les neurones du tube digestif des patients parkinsoniens et qu’ils apparaitraient très précocement au cours de l’évolution de la maladie. Il a même été proposé par Braak, un anatomiste allemand, que le tube digestif serait touché en premier par le processus pathologique, le cerveau ne l’étant que secondairement, après propagation via les connexions qui existent entre cerveau et intestin (on parle désormais de l’hypothèse de Braak). Cette hypothèse intéressante est largement débattue. En faveur de cette hypothèse, nous retiendrons le fait que les signes digestifs, qui seraient liés à l’atteinte des neurones du tube digestif et en particulier la constipation sont très précoces au cours de l’évolution de la maladie et peuvent précéder de nombreuses années la survenue des signes moteurs classiques de la maladie (tremblement, difficulté à effectuer les gestes alternatifs rapides). Toutefois, il existe aussi de nombreux arguments qui vont contre l’hypothèse de Braak et qui ont été avancés et discutés dans la littérature scientifique. Nous retiendrons le fait que l’hypothèse de Braak ne s’appuie que sur quelques cas d’autopsie sélectionnés et qu’il est difficile d’étendre les conclusions à l’ensemble des cas de maladie de Parkinson.
L’organisation des neurones du tube digestif et plus largement du système nerveux entérique (SNE) est tellement proche de celle du cerveau que le SNE est parfois appelé « second cerveau ». Une des caractéristiques de notre cerveau est d’être relativement imperméable aux éléments présents dans la circulation et dans le sang, grâce à une barrière sang-cerveau appelée barrière hémato-encéphalée. Cette barrière est indispensable pour éviter que notre cerveau ne soit en contact avec des pathogènes, des médiateurs de l’inflammation ou autres toxiques. De façon remarquable, le SNE a la même organisation avec un système de barrière, appelé barrière épithéliale intestinale. Cette barrière qui est contrôlée par les neurones du tube digestif permet d’éviter que des pathogènes ou des toxiques passent du tube digestif à la circulation sanguine et joue donc un rôle protecteur. Si l’hypothèse de Braak est vrai et en particulier si le tube digestif est une porte d’entrée vers le cerveau pour des toxiques ou des pathogènes, il est logique d’avancer que la barrière épithéliale intestinale des patients parkinsoniens est plus poreuse que celle de personnes sans maladie neurologique et que l’intestin des parkinsoniens serait donc plus perméable…Une équipe américaine dirigée par Kathleen Shannon et Jeffrey Kordower ont étudié ce sujet au cours d’un travail préliminaire sur 9 patients. Leurs résultats sont discordants suivant les méthodes d’analyse de la perméabilité qui ont été utilisées et ne permettent pas de conclure.
Nous avons donc décidé de lancer au laboratoire un projet de recherche sur la perméabilité digestive des patients parkinsoniens, à plus grande échelle et avec d’autres techniques d’analyse de cette perméabilité. La perméabilité digestive peut être analysée en utilisant de simples biopsies digestives (prélèvements de la taille d’un grain de riz) réalisées en routine au cours d’une courte coloscopie.(figure) Les biopsies sont placées dans une chambre appelée chambre d’Ussing dans laquelle la diffusion d’un produit fluorescent peut être évaluée : plus le produit fluorescent passe à travers la biopsie, plus elle est poreuse, plus la barrière digestive est perméable.(figure). Ce projet appelé PerméaPark inclura 30 patients parkinsoniens et 15 témoins qui n’ont pas de maladie neurologique. Nous ferons des analyses complémentaires en biochimie sur des protéines impliquées dans la perméabilité de la barrière et dans un modèle animal de maladie de Parkinson. Thomas a déjà analysé la perméabilité chez 10 patients parkinsoniens et commence à étudier en biochimie les protéines d’intérêt
Figure : Analyse de la perméabilité d’une biopsie digestive
Ce projet nous semble indispensable et ce pour deux raisons principales. Il nous permettra de trancher la question toujours en suspens de l’existence ou non d’une augmentation de la perméabilité digestive chez le patient parkinsonien. Ceci sera un élément important en faveur ou en défaveur de l’origine digestive de la maladie. De plus, s’il s’avère que des modifications de la perméabilité digestive sont présentes chez les parkinsoniens, cette technique pourrait être utilisée pour diagnostiquer la maladie du vivant du patient sur une simple biopsie.
Nous profitons de cette mise au point dans le Parkinsonien Indépendant pour remercier l’ADPLA et CECAP, qui financent nos travaux et la thèse de Thomas Clairembault.
Professeur Pascal Derkinderen
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63 ET65 ANS maries depois 40ans et pk depuis 10 ans.ts ls 2!! gros probleme de constipation .mon mari suppore de violantes douleurs au nieau du gros colon depuis des semaines.rien ne le calme.…sommes partants pour Permapark
merci et courage
Commentaire by pesez frederique et j luc — 3 septembre 2013 #