Ne pas être qu'un "patient" ...

Les incontinences urinaires

Article paru dans LE PARKINSONIEN INDÉPENDANT n°58

Intro­duc­tion
Les troubles urinaires sont fréquents au cours de la mala­die de Parkin­son. Ces troubles peuvent appa­raitre dès le début de la mala­die et parti­ci­per au diag­nos­tic neuro­lo­gique initial, mais cela est assez rare. Par contre, ils appa­raissent souvent alors que la mala­die est déjà instal­lée, à un âge où on peut obser­ver chez le patient les diffé­rentes patho­lo­gies urolo­giques, comme l’adénome de la pros­tate chez l’homme ou une carence hormo­nale chez la femme. La possi­bi­lité de diffé­rentes patho­lo­gies pose un problème diag­nos­tic de la compé­tence de l’urologue. Les troubles urinaires au cours de la mala­die de Parkin­son sont variés. La dysurie (diffi­culté à uriner), voire la réten­tion chro­nique sont assez rares. Le plus souvent, le patient se plaint d’incontinence urinaire.

L’incontinence urinaire se défi­nit par une perte acci­den­telle ou invo­lon­taire d’urine.
Ce trouble est large­ment répandu, puisque les spécia­listes s’accordent pour esti­mer à 3 millions en France (les 3/​4 sont des femmes), le nombre de personnes sujettes à des épisodes d’incontinence urinaire, lors de la miction (miction = action d’uriner). L’incontinence urinaire est pour beau­coup de ces personnes un sujet dont on ne parle pas, ni en famille ni même au méde­cin. Et pour­tant, il existe des solu­tions pour pallier certains troubles urinaires. 

C’est pour­quoi, il a paru inté­res­sant de reprendre un article paru en septembre 2009 dans le PI n°38 sous le titre «  les impé­rio­si­tés urinaires » et de le réac­tua­li­ser. Pour écrire ce nouvel article, nous avons plei­ne­ment utilisé les infor­ma­tions four­nies dans le Site Inter­net de Sphère Santé (L’incontinence urinaire par le docteur Dahan, urologue à Paris, mis à jour par Isabelle Eustache).

Un peu de vocabulaire
Il y a plusieurs formes d’incontinence urinaire : 

  • l’incontinence urinaire d’effort est carac­té­ri­sée par une fuite invo­lon­taire d’urine par l’urètre surve­nant à l’occasion d’un effort physique, à la toux ou aux éternuements.
  • L’incontinence urinaire par urgences miction­nelles est carac­té­ri­sée par une fuite invo­lon­taire d’urine, accom­pa­gnée ou immé­dia­te­ment précé­dée d’un besoin urgent et irré­pres­sible d’uriner abou­tis­sant à une miction ne pouvant être rete­nue. Les termi­no­lo­gies d’incontinence par impé­rio­sité ou d’impériosité urinaire (IU) sont aussi utili­sées. Les spécia­listes parlent aussi de vessie hyperactive.
  • L’incontinence urinaire mixte qui combine les deux formes d’incontinence

Quelles sont les victimes ?
Bien que l’incontinence soit un sujet tabou, on sait qu’elle touche un large public de tous les âges, hommes et femmes confon­dus. En effet, contrai­re­ment aux idées reçues, l’incontinence urinaire n’est pas l’apanage des troi­sième et quatrième âges. Les études de préva­lence montrent par exemple que l’incontinence des femmes est de 12% entre 20 et 29 ans et atteint 32%, après 80 ans. 

Chez la femme, l’incontinence est le plus souvent de type urinaire d’effort et concerne 50% des patientes, plutôt chez les femmes jeunes (moins de 50 ans), on ne trouve que de 10 à 20 % d‘impériosités urinaires, plutôt chez les femmes âgées. Les femmes sont plus touchées que les hommes par les problèmes de fuites urinaires. Cela est la consé­quence des gros­sesses, des accou­che­ments et de la ménopause. 

Chez l’homme, l’incontinence par impé­rio­sité est équi­va­lente à celle de la femme, soit de 12% à 16% pour la popu­la­tion jeune et la préva­lence augmente avec l’âge. L’incontinence urinaire d’effort chez l’homme est souvent consé­cu­tive à la présence d’une patho­lo­gie de la prostate.

Descrip­tion et fonc­tion­ne­ment de l’appareil urinaire
Pour mieux comprendre comment les choses se passent, faisons un peu d’anatomie, et décri­vons tout d’abord l’appareil urinaire. En premier, on trouve les reins qui filtrent et épurent le sang et produisent l’urine. L’urine sort des reins et s’écoule en perma­nence, via les uretères, vers la vessie. La vessie est reliée à l’orifice urinaire par un tuyau, l’urètre, long chez l’homme, plus court chez la femme. La vessie comprend 2 parties : 

  • la partie supé­rieure appe­lée « dôme vési­cal » ou « dôme de la vessie » Le dôme vési­cal est très élas­tique et permet à la vessie de jouer un rôle de réser­voir d’urine entre chaque miction. Il contient un muscle puis­sant, le détru­sor qui en se contrac­tant lors de la miction évacue l’urine vers l’office urinaire.
  • la partie infé­rieure appe­lée « col vési­cal » : Le col vési­cal est le point de départ de l’urètre. Il est consti­tué par 2 muscles en forme d’anneau, les sphinc­ters urétraux, interne et externe, dont le rôle est d’empêcher l’urine de sortir de la vessie. Ces sphinc­ters interne et externe sont ouverts pendant la miction et fermés en dehors de la miction (ils fonc­tionnent comme des robinets).

Comment fonc­tionnent norma­le­ment la vessie et l’urètre ?
Le fonc­tion­ne­ment de la vessie comprend 2 phases : une phase de remplis­sage et une phase de vidange. Pendant le remplis­sage, l’urine sort en perma­nence des reins et s’écoule vers la vessie, via les uretères. Entre 2 mictions, la vessie se remplit progres­si­ve­ment d’urine. A partir d’une certaine quan­tité d’urine, appa­rait un besoin d’uriner. Plus la vessie se remplit, plus le besoin d’uriner augmente. Cette sensa­tion se ressent grâce à des capteurs placés dans la paroi de la vessie. Pendant le remplis­sage, les 2 sphinc­ters sont fermés.

La phase de vidange est déclen­chée volon­tai­re­ment par la personne qui décide d’uriner. L’ordre part du cerveau et entraîne les actions suivantes simul­ta­nées et cordonnées : 

  • les 2 sphinc­ters se relâchent et s’ouvrent comme des robi­nets pour permettre à l’urine de sortir de la vessie vers l’urètre.
  • le détru­sor se contracte vigou­reu­se­ment et chasse l’urine vers l’urètre et l’office urinaire
  • la contrac­tion du détru­sor empêche l’urine de remon­ter vers les reins

Après la miction, le détru­sor se relâche et les sphinc­ters se ferment. Quand le fonc­tion­ne­ment de l’appareil est normal, comme il vient d’être décrit, il y a de 4 à 8 mictions par jour et géné­ra­le­ment aucune, la nuit.

Impé­rio­sité urinaire
Que se passe-​t-​il en cas d’impériosité urinaire ? La personne atteinte éprouve bruta­le­ment et sans aver­tis­se­ment préa­lable le besoin impé­rieux d’uriner. Ce besoin doit être satis­fait et ne peut être différé que de quelques dizaines de secondes, quel­que­fois après avoir mouillé ses sous-​vêtements, son panta­lon ou sa jupe ! Cela oblige la victime à étudier ses dépla­ce­ments et ses sorties du domi­cile en repé­rant à l’avance les toilettes et consti­tue un handi­cap fami­lial, social et professionnel.

De plus, pour le Parkin­so­nien atteint d’akinésie, se lever la nuit en toute hâte en cas d’impériosité, accroît le risque de chutes, pouvant entraî­ner des fractures.

Quelles sont les causes de l’impériosité ?
Les causes en sont des contrac­tions anor­males du détru­sor, alors que la vessie est peu remplie. Les sphinc­ters urétraux sont fermés, mais la pres­sion dans la vessie, en raison de la contrac­tion du détru­sor, devient supé­rieure à la pres­sion des sphinc­ters. Alors les sphinc­ters s’ouvrent et l’urine sort vers l’urètre. Cette miction se fait de façon invo­lon­taire et par ailleurs peut être favo­ri­sée par des stimuli (eau qui coule, clé dans une porte). On constate une augmen­ta­tion du nombre de mictions par jour et par nuit (parfois le double). On parle parfois « d’hyperactivité vési­cale » et aussi de « vessie hyperactive ».

Comment expli­quer la contrac­tion anor­male du détrusor ?
La contrac­tion du détru­sor est sous la dépen­dance de récep­teurs (appe­lés récep­teurs musca­ri­niques) conte­nus dans la paroi de la vessie. La contrac­tion du détru­sor se produit, lorsqu’une molé­cule appe­lée acétyl­cho­line, libé­rée par des neurones et trans­mise à la vessie par le nerf para­sym­pa­thique, se fixe au niveau des récep­teurs muscariniques.

Chez une personne non incon­ti­nente, la molé­cule acétyl­cho­line est libé­rée sous commande du cerveau, lorsque l’envie d’uriner se fait ressen­tir. La contrac­tion du détru­sor est comman­dée et la miction est contrôlée. 

Chez une personne atteinte d’impériosité urinaire, la molé­cule acétyl­cho­line est libé­rée par le cerveau, sans contrôle conscient et volon­taire de la personne, d’où des mictions incon­trô­lées. L’impériosité urinaire, dans ce cas, a donc une raison neuro­lo­gique, et se retrouve par exemple chez les patients atteints de la sclé­rose en plaques ou de la mala­die de Parkinson. 

On notera toute­fois que l’impériosité urinaire peut aussi avoir d’autres causes, par exemple des causes urolo­giques, comme les irri­ta­tions de la muqueuse vési­cale, dues à des cystites.

Les trai­te­ments médicamenteux
Parmi les diffé­rents types d’incontinence, seule l’incontinence urinaire par impé­rio­sité béné­fi­cie de médi­ca­ments effi­caces pour son trai­te­ment. On a vu comment la molé­cule acétyl­cho­line est émise de façon intem­pes­tive, puis captée par les récep­teurs musca­ri­niques, provoque la contrac­tion du détru­sor. Le rôle des médi­ca­ments sera donc de bloquer les récep­teurs musca­ri­niques et ainsi de dimi­nuer la capa­cité de la vessie à se contracter. 

Les médi­ca­ments les plus utili­sés sont les anti­cho­li­ner­giques /​ anti­spas­mo­diques. Tous ces médi­ca­ments utili­sés dans le trai­te­ment de l’hyperactivité vési­cale agissent comme anta­go­nistes des récep­teurs choli­ner­giques musca­ri­niques, à l’origine des contrac­tions du détru­sor. Les médi­ca­ments les plus courants : le Tros­pium® (Trosec®), l’Oxybutynine® (Ditro­pan®), la Dari­fé­na­cine® (Enablex®), la Soli­fé­na­cine® (Vesi­care®).

Tous ces médi­ca­ments présentent des effets indé­si­rables (séche­resse buccale, maux de tête…), ainsi que des contre-​indications (risque de glau­come avec ferme­ture de l’angle). Mais ils ont fourni à certains patients atteints d’impériosités urinaires des solu­tions non inva­sives (en parti­cu­lier le Vesi­care®). Ces médi­ca­ments sont décrits dans le bulle­tin d’information du Centre Hospi­ta­lier Univer­si­taire du Québec. 

Consul­ter un urologue
Le patient parkin­so­nien au fur et mesure de l’évolution de sa mala­die consulte, après son méde­cin géné­ra­liste, tout d’abord un neuro­logue, puis assez rapi­de­ment après la confir­ma­tion des premiers troubles Parkin­so­niens et l’annonce du diag­nos­tic, un kiné­si­thé­ra­peute et un orthophoniste. 

Les troubles urinaires n’apparaissent géné­ra­le­ment pas tout de suite, et le parkin­so­nien n’éprouve donc pas la néces­sité de consul­ter un urologue. Le sujet des troubles urinaires est tabou pour beau­coup de personnes qui préfèrent ne pas en parler. Plus de la moitié des personnes atteintes garde le silence. Ce compor­te­ment est très domma­geable, car à partir d’un certain âge, le risque de surve­nue de patho­lo­gies urolo­giques, d’origine ou non Parkin­so­nienne, croit rapidement. 

Quand se mani­feste chez le Parkin­so­nien un trouble urinaire, quel qu’il soit, il faut en parler à son géné­ra­liste et au neuro­logue et consul­ter un urologue. L’urologue a la compé­tence et les moyens tech­niques pour analy­ser le problème et propo­ser des solutions. 

Par ailleurs, parler d’un trouble urinaire, par exemple de ses impé­rio­si­tés urinaires, à son entou­rage fami­lial, reste encore un sujet tabou pour beau­coup de personnes. En parler sobre­ment permet pour­tant de suppri­mer bien des incompréhensions. 

Pour conclure, il serait souhai­table, à partir d’un certain âge, par exemple 60 ans de consul­ter par préven­tion un urologue (éven­tuel­le­ment un gyné­co­logue pour les femmes).
Enfin, la consul­ta­tion d’un urologue est indis­pen­sable en cas de surve­nue de troubles urinaires, comme les impé­rio­si­tés urinaires. 

Biblio­gra­phie : Site Inter­net de Sphère Santé (L’incontinence urinaire par le docteur Dahan, urologue à Paris).
Rédigé par Jean Pierre Laga­dec

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